Il fut une époque où la littérature était censurée parce
qu'elle avait une influence sur les gens. Or la littérature n'a plus
d'influence parce qu'elle est inapte à fournir le stimulus nécessaire : ceci
est une conséquence de la modernité technologique. La littérature écrite va
rejoindre ce que furent les hiéroglyphes égyptiens à l'époque pré-napoléonienne
: une énigme incompréhensible. Les gens qui ont connu l'époque de De Gaulle
savent encore lire, ils ont connu aussi la censure, heureux hommes : la censure
c'est le désir. L'absence de censure ne reflète pas une avancée des libertés,
mais un recul de la sensibilité pour la littérature. Ce qui fournit
l'excitation aujourd'hui c'est l'image pornographique (sexuelle, ou violente,
tous les types de fantasmes sont visibles) directement accessible, alors
qu'elle était autrefois tabou, et véhiculée de manière sublimée par la
littérature. C'est d'ailleurs un genre d'image pornographique que diffusent les
terroristes de l'"état islamique", avec leurs exécutions filmées. Contre
eux se dresse la dernière censure, car quand l'image libérale (violence et
sexe), fait encore semblant pour vendre (publicité), les terroristes font
"pour de vrai", avec les armes du libéralisme (violence gore), pour
vendre.
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