vendredi 16 septembre 2016

Les promesses déçues

Moi : "Non Emmanuel, pas la peine de rêver, la gauche, ou le PS qui se prétend tel, n'arrivera pas au second tour. Philippe a raison, le paysage politique va considérablement se droitiser, et la polarité va consister dans le clivage droite républicaine/extrême droite : c'est quasiment déjà écrit. Et tu auras beau avoir l'impression de "lutter", tes mouvements saccadés de refus de la réalité, ressembleront à l'agitation d'un poisson dans un bocal : ta lutte est absurde comme les mouvements d'un poisson d'aquarium. Peu à peu ta liberté de mouvement se rétréci, et ne va cesser de se rétrécir. Tout cela est la conséquence logique de l'hétérogénéité qui règne dans la société française, issue de l'"esprit de 68". Toute société, et même tout être humain a besoin pour se construire, d'homogénéité, du même, par opposition à la différence. L'être humain doit se reconnaître en l'autre pour lui-même se reconnaître, si il voit dans l'autre trop d'hétérogénéité, alors il ne se reconnaît plus lui-même, et c'est alors, partant d'une fragmentation individuelle, au départ, que par un jeu de domino, c'est l'ensemble de la société qui s'effrite. D'où les mouvement de réaction, très forts, actuels, qui ne vont cesser de s'amplifier, avec les mauvais échos que renvoie l'actualité, et les événements de plus en plus tragiques et choquants. Comme l'égorgement d'un prêtre, qui d'un point de vue symbolique, est un signe très fort, qui ne s'effacera pas facilement des consciences, pas d'ici les élections en tout cas. Mais c'est bien, tu es consciencieux, tu fais ton devoir d'homme de gauche républicaine."

Le philosophe : "Faire son devoir est encore une des meilleures choses que l'homme ait inventée."

Moi : "Ce qui compte le plus, et les militaires le savent, c'est que les troupes aient suffisamment le moral pour être en mesure d'accomplir leur devoir. Quand le moral est trop entamé, les troupes refusent de monter à l'assaut, et il n'y a plus aucune possibilité de faire s'accomplir le devoir. Tu as toujours sous-estimé le rôle du moral, et surestimé le rôle du devoir. Or ce qui mine la société française, est qu'elle n'a plus le moral, ce que tu ne cesses de dénoncer "à coups de pied au cul", au lieu d'essayer d'en trouver les causes. Autre question, pourquoi, toi, tu échappes à cette perte de moral ? J'en attribue la cause, au fait que tu es l'héritier de l'époque gaullienne et pleine de promesses, toutes déçues, les unes après les autres. Quand la société française aura touché le fond, alors elle pourra rebondir. Mais sur d'autres bases, certainement religieuses, car c'est désormais une nécessité de survie."

Le philosophe : "Non, si j'ai le moral, de Gaulle n'y est pour rien. Question de naturel, sans doute. Et puis, quand on a la chance de ne pas venir d'un milieu petit-bourgeois, on se fait à tout, on prend la vie comme elle vient, on ne se plaint pas, on ne recherche pas la reconnaissance. J'aime beaucoup cette chanson de Serge Lama, "Les ballons rouges" : "J'ai rien demandé, j'ai rien eu, j'ai rien donné, j'ai rien reçu, mais j'ai fait ce que j'ai voulu". C'est terrible, mais il y a quand même toute une morale là-dedans."

Philippe : "Le PS est foutu, on passe à autre chose... 
Très progressivement le paysage politicien français va se scinder en deux tendances : d’un côté les européistes c’est à dire les partisans de l’intégration européenne et de l’autre côté les europhobes c’est à dire les partisans du maintien des états-nations. 
NB : L’européisme est un néologisme, utilisé par Jules Romains dès 1915 d’où le mot dérivé « européiste ». Ce néologisme n’est absolument pas une création de l’extrême droite ! Ce n’est pas pour autant que le débat économique entre social-libéralisme et libéralisme (« pur et dur ») ne va pas reprendre force et vigueur dans cette nouvelle configuration des années à venir. Au sein de ce que l’on appelle, selon la propagande des dominants politiques en place depuis 1969, « l’extrême droite » actuelle les débats sont déjà en cours, alors même qu’elle n’a pas encore accédé à la moindre parcelle de pouvoir. Marine Le Pen est considérée, à mon avis à juste raison, comme ayant une philosophie plutôt socialisante, il suffit de fréquenter certains forums privés de « la droite de la droite » pour le savoir.  Notre belle utopie européiste d’une Europe fédérale a été construite sur un jeu de dupes. 
Quand j’ai voté pour Maastricht en 1992 ce fut en comblant mentalement (grave illusion) les vides de ce traité, c’est à dire en pensant qu’il y aurait, par le haut/par le mieux disant, convergence sociale et fiscale de tous les pays membres. A la place il y a eu dumping généralisé et sauvage entre les pays membres dans ces deux domaines social et fiscal. Le « carburant » de ce remodelage politicien français/européen est donné par la carence de cette UE à protéger son pré carré d’un afflux massif incontrôlé de réfugiés économiques et de guerre dans un contexte de chômage structurel.  En France ce « carburant » est dopé par un risque maximum d’attentats visant la population en raison de la détestation que la France provoque, avec d’autres, chez les tenants de l’Islam politique par son attitude guerrière de « croisés » de ses dirigeants depuis janvier 1991 en Afrique. 
Cette population française présente un surplus de détestation particulière en raison de sa laïcité intolérable idéologiquement, à la vieille hérésie Wahhabite née en Péninsule arabique et paresseusement assise pour faire sa propagande depuis plus d’un demi siècle sur « mille milliards » de pétrodollars."

Moi : "C'est vrai qu'un désir de reconnaissance totalement déçu, à 100%, peut contribuer à anéantir totalement le moral, voire conduire tout droit à la folie (c'est ainsi que j'interprète la folie de Nietzsche, par exemple). Mais cela provient-il d'un excès de vanité, comme toi tu l'interprètes (donc une faute morale de la petite-bourgeoisie, qui aujourd'hui lui retombe dessus) ? Ou alors la reconnaissance n'est-elle pas un besoin humain, profondément ancré, par lequel l'humain se construit (se reconnaître dans le miroir : c'est le premier stade de construction de soi selon Lacan, non ?). Disons que même chez toi la reconnaissance joue un rôle, mais trop enfoui, et que tu dénies pour des raisons politiques (haine de la petite-bourgeoisie), donc finalement d'ego, propre à notre époque pleine de promesses déçues, pour quelqu'un comme moi, mais pas pour toi je le reconnais. 
Ça et là, quelques exceptions, comme toi échappent au destin de notre époque et à son caractère propre, encore une conséquence de 68, bénéfique pour toi. Mais le destin de l'époque qui touche des masses de plus en plus considérables de concitoyens aliénés, te rattrapera, et alors fatalement tu te sentiras moins libre à ton tour, mais je conçois que tu lutteras de toutes tes forces, jusqu'au bout, pour conserver ta liberté, au nom du combat qui te semble le plus juste : le combat pour la conservation de la gauche républicaine. Et détrompe-toi sur mon compte, le mal est bien plus grand qu'un simple petit désir de reconnaissance petit-bourgeois, même si le point de départ de la problématique semble effectivement se trouver là : quand on a des enfants, on aspire à autre chose qu'à un simple désir de reconnaissance petit-bourgeois, j'ai dépassé ce stade depuis la fac."


Le philosophe : "C'est trop de psychologie pour moi."

mercredi 14 septembre 2016

Conversation autour de l'injustice de toute société fondée par les hommes

Moi : "Je vais citer quelques chiffres, même si Emmanuel Mousset n'aime pas ça. 10% de la population mondiale possède 86% des richesses mondiales, ils pèsent de tout leur poids sur le contrôle décisionnaire : finance, médias, politique... 40% de la population mondiale possède 14% des richesses mondiales, c'est la fameuse classe moyenne. Par sa bonne volonté, et sa crédulité optimiste, son travail aussi, cette classe fait tourner le système, elle a encore foi et pense que "ses" valeurs sont supérieures (des valeurs qu'on lui fourre dans la tête). 50 % de la population mondiale ne possède rien, ce sont les damnés de la terre, ceux qui fuyant les conflits ou la famine, migrent au péril de leur vie vers l'Occident, qu'ils voient comme un Eldorado. Une vraie politique de gauche serait un effort de redistribution des richesses, à l'échelle mondiale, et l'épanouissement de chacun par le travail et l'amour, la normalité en fait, dans son milieu de vie, dans son pays d'origine : le système actuel est pervers et ne permet pas ça ; la perversion intrinsèque du système, explique la prolifération des mouvements nihilistes encore plus pervers et ouvertement sadiques, de contestation par les crimes de masse, dont le modèle type est Daesh ou l'allégeance à ce mouvement. Le clan Hollande, avec Macron et Valls et le reste du gouvernement, est totalement vendu à l'oligarchie, il ne lutte pas sur le plan social, uniquement sur le plan sociétal, pour garder l'étiquette "réformiste". Les "factieux" donnent l'impression d'être moins "à droite" que le clan Hollande, mais sont-ils à gauche ? Reste Mélenchon qui cite les mêmes chiffres que moi, s'inspirant certainement d'Alain Badiou comme moi. Badiou a foi dans le communisme, pas moi. Il faut bien retenir ça : le système est intrinsèquement pervers, la politique n'y peut et n'y pourra jamais rien, car c'est dans la nature humaine d'être génocidaire, et de se diviser outrageusement entre bourreaux et victimes, entre possédants et démunis. Comme la nature humaine ne se réformera pas, le système va continuer ses ravages, jusqu'à l'éclatement de la bulle oligarchique, certainement au prix de crimes atroces. Car les 10% voudront garder leurs privilèges, à n'importe quel prix, et jusqu'au bout du bout (les 10% spéculeront à n'en pas douter, sur la destruction de la planète). Et le monde de toute façon ne peut pas être meilleur qu'il ne l'est actuellement, c'est-à-dire globalement mauvais, à l'image de la nature humaine. Comme le dit Houellebecq s'inspirant de Schopenhauer : "ce qu'il y a de meilleur en l'homme c'est le chien.""

Le philosophe : "Eh bin, c'est pas gai tout ça. Autant te flinguer tout de suite ..."

Moi : "Disons que le monde est plutôt gai pour 10% des gens sur Terre. Pour 40% c'est le purgatoire, et pour 50% c'est l'enfer : c'est comme ça que vit l'espèce humaine, je n'y suis strictement pour rien."

Le philosophe : "Statistiques aléatoires : on ne sonde pas les cœurs et les reins, il y a peut-être beaucoup plus de gens heureux que tu ne crois, et surtout encore plus de gens qui se contentent de vivre, qui sont indifférents au paradis, au purgatoire et à l'enfer."

Moi : "On peut être "pauvre" et heureux, si l'environnement n'est pas trop dégradé. On peut être tellement pervers quand on est riche, que l'on a de fortes chances de rendre ses enfants très malheureux. Donc oui le bonheur est tout sauf une science exacte. Mais globalement la richesse rend plutôt plus heureux, et même plus sain, que la misère selon moi. De plus le bouddhisme est selon moi la religion qui rend le plus heureux, le christianisme est trop mortifère, et l'islam globalement trop guerrier, pour faire vite et en caricaturant un peu. De plus me fiant à Houellebecq et Elisabeth de Fontenay, j'ai fait l'acquisition d'un chien, donc je ne peux pas être tout à fait malheureux."

Le philosophe : "Tu as un chien, j'ai un chat. Encore une différence entre nous ! Mais celui qui a du chien n'est peut-être pas celui qu'on croit. Pour le reste, le dalaï lama fait sa tournée en France cette semaine. Va l'écouter : la spiritualité décadente te convient."

Moi : "J'ai aussi un chat figure-toi. Les deux sont complémentaires et n'ont pas le même caractère, comme chacun sait : c'est bizarre, un chat ne fait jamais de bêtises, alors qu'un chien, si. Pour ce qui est du bouddhisme, je ne l'aime que dans son contexte, c'est-à-dire en pays bouddhiste, sinon, cela me semble effectivement une spiritualité hors-sol, hors environnement, donc dégradée : mais le bouddhisme dans son contexte, rien de plus merveilleux. La religion qui convient à la France est le catholicisme, et je n'aime pas trop les "auberges espagnoles", contrairement à toi. Et puis toi en tant que prof, tu es le gardien ou le chien de garde de ce qui fait tourner le monde : un certain espoir, une foi en la vie, au bénéfice des 10%. Tu es ce qu'il n'y a pas si longtemps on appelait un "chien de garde" de la bourgeoisie, c'est pour cela que tu soutiens un gouvernement, qui est peut-être le moins mauvais des gouvernement, mais sur la toile de fond d'un monde rendu mauvais par l'action de l'espèce humaine, depuis l'aube des temps. Comme c'est la nature qui parle au travers de l'espèce humaine, c'est en réalité la nature qui est globalement mauvaise et perverse, l'homme n'en est qu'un produit perverti, peut-être un produit raté, un animal raté, ce qui le rend peut-être encore plus mauvais qu'un pur produit de la nature, car intelligent à la différence d'un animal réussi : plus d'efforts d'adaptation au milieu, rend plus intelligent qu'un animal parfaitement adapté, c'est-à-dire réussi. Car l'homme est le produit de la nature, mais surtout de la culture, donc du contexte qu'il s'est créé, et Rousseau avait déjà remarqué que la vie en société et la culture étaient mauvaises. Ce qu'il ne savait pas, c'est que la nature globalement, est sans doute assez mauvaise, partagée entre prédateurs et victimes ; donc que poser un produit de la nature bon, est une utopie. Tu es chargé aussi de trier entre ce qui fonctionne bien, moyennement ou pas du tout, sans états d'âme, dans le cadre d'une culture laïque du fonctionnement, sur fond d'hyper consumérisme. Comme tu es un bon fonctionnaire, loyal et reconnaissant, tu ne peux pas critiquer le système sur le fond, mais un peu sur la forme, ça et là : ce qui te révolte le plus c'est la paresse et la passivité des gens, mais es-tu réellement davantage acteur ? N'es-tu pas rempli de préjugés sur ce que tu es toi-même ?"

Le philosophe : "Oh que si, les chats font des bêtises, sans doute moins spectaculaires que les chiens. L'image du chat à sa mémère est un cliché."

Anomyme : "C'est qui Erwan Blesbois qui se prend pour LE penseur du 21e siècle? Peut-être devrait-il relire Boileau( au fait il connaît?) : Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement - Et les mots pour le dire arrivent aisément ; mais ça "il sait pas faire"."

Moi : "La difficulté d'expression est bien plus grave qu'une mauvaise conception du sujet abordé. "mal vu, mal dit, vraiment ?", disait Deleuze pour se moquer. Cela dénote une difficulté communicationnelle, donc un handicap, d'autres plus tolérants diront une "différence", certainement d'ordre sensoriel, pour des raisons peut-être génétiques. Mais pour ma part je privilégie l'option du caractère : une sorte de fatum relationnel qui remonte certainement à la petite enfance ; un rapport pervers à l'adulte peut être un destin pour une vie entière. Et il faut dire que l'école encourage les phénomènes de bouc-émissarisation, précisément dans le domaine de l'expression ; ce qui est "différent" est banni ou ostracisé, au nom de sentences scolaires, quasiment martiales, comme : "Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément." J'ai l'impression qu'Emmanuel Mousset a publié ce commentaire d'un "anonyme" lambda, pour me montrer que mon caractère ne peut s'accorder avec la pensée réactionnaire, homogénéisatrice, qui précisément bouc-émissarise ce qui est différent. Or précisément selon moi, c'est la "pensée 68", la pensée de la "différence", qui est responsable de beaucoup de maux de nos contemporains, qu'une éducation catholique, ou même purement et "durement" laïque, rigides et homogénéisatrices certes, auraient pu éviter. Maintenant il faut faire avec toutes ces "différences" qui ne s'accordent pas entre elles, qui se font la guerre de façon perverse, et compter sur la psychiatrie pour se soigner, plus que sur la religion ou sur l'école, qui n'arrivent plus à homogénéiser. Emmanuel Mousset s'en félicite, lui qui a reçu une éducation rigide, issue de l'époque de de Gaulle et des trente glorieuses, je le déplore, moi qui ai reçu une éducation laxiste, issue de l'"esprit de 68"."

vendredi 9 septembre 2016

Une société dénuée du sens du sacré est-elle viable ?

Anonyme : "Quand on ne croit pas en Dieu, on ne parle pas du catholicisme" drôle de raisonnement! Justement les catholiques ne sont pas forcément les mieux placés pour parler de Dieu qui est le bien de tous les croyants, même des musulmans."

Le philosophe : "Ne faites pas l'idiot : les croyants, chrétiens ou musulmans, nous parlent mieux de Dieu que les athées qui ne croient pas en son existence."

Moi : "On peut être athée et reconnaître la nécessité du mécanisme psychique, pour ma part du catholicisme, qui repose sur la bouc-émissarisation symbolique d'un tiers, pour que cette bouc-émissarisation ne soit pas réelle : sur ce point Sarkozy a raison quand il admet la prééminence spirituelle du curé sur l'instituteur. Pourtant je suis instituteur et justement je vois les failles du système : qui repose sur l'exclusion d'un ou plusieurs tiers, toujours (et même si ce sont les communicants de Sarko qui lui ont sans doute insufflé l'idée pour des raisons électoralistes)."

Le philosophe : "Il faut comparer ce qui est comparable : l'ordre spirituel n'est pas l'ordre séculier, le curé n'est pas à opposer à l'instituteur, il n'y a pas à les hiérarchiser. C'est cela la laïcité, l'indépendance respective de la sphère religieuse et de la sphère profane. Sarkozy avait tort."

Moi : "L'ordre séculier est mauvais, Nietzsche avait tort : "Dieu est mort" et on ne voit pas fleurir toutes sortes de créations artistiques ou aristocratiques, on voit au contraire fleurir toutes sorte de génocides et de crimes inédits. Le monde séculier et laïque (fierté de la république d'inspiration kantienne) est très laid, ne nous voilons pas la face."

Le philosophe : "Certes, la beauté est dans le sacré. Mais une salle de classe, à la différence d'une église, n'a pas besoin d'être belle : il lui suffit d'être fonctionnelle et utile. Quant aux génocides, ils sont de tout temps et la Bible en est remplie.

Moi : "En gros le monde "n'a pas besoin d'être beau", on lui demande juste d'être fonctionnel et utile : c'est bien ce que je lui reproche et que lui reprocherait Nietzsche. CQFD, Nietzsche s'est complètement planté, lui qui se voulait le pourfendeur de la laideur et l'apôtre du beau. Par contre cet imbuvable Kant doit être très satisfait."

Le philosophe : "Le sacré n'est pas de ce monde, qui est laid et utilitaire, depuis que le monde est monde. Ce n'est d'ailleurs pas si grave : l'utilité est aussi une vertu."

Moi : "Il y a un film de Pasolini, Médée, qui parle précisément de cette perte du sens du sacré, à un moment donné, où un centaure se transforme finalement en humain normal aux yeux de Jason : moment donné qui n'est certainement pas un âge de l'humanité, mais plus un âge de l'humain."

Le philosophe : "En classe de terminale, nous étions allés voir ce film avec notre prof de philo. Je n'avais pas compris grand chose. Il faut dire que j'étais moins intelligent qu'aujourd'hui."

Moi : "Ne te sous-estime pas, tu es "né" intelligent, c'est le propre des philosophes. A moins qu'un "Socrate" nommé Chédin (qui sait !) ne t'ait fait advenir à toi-même, par l'art de la maïeutique. Je crois plus à l'hypothèse du caractère et du destin propre à Schopenhauer : tu ne pouvais pas y échapper, peut-être le fameux "sentiment d'éternité" dont tu te sens investi depuis la petite enfance, rien de très extraordinaire, mais juste ce qu'il faut de sentiment du sacré (enfant de chœur par dessus le marché !)."

La société française est-elle raciste ?

Moi : "Oui Emmanuel, on sait bien que les races n'existent pas, puisque tout membre de l'espèce humaine peut se reproduire avec un autre membre de l'espèce humaine, nous sommes tous des descendants de l'homme de Cro-Magnon. Selon moi, comme de l'union des sexes des deux représentants de la Terre féconds les plus différents du monde, au point de vue morphologique et/ou moral et/ou intellectuel, peut éclore un parfait petit homme à tout point de vue, les races n'existent pas : il n'y a pas de "bâtards" ou de "purs". Mais Cro-Magnon a bien "génocidé" l'"homme" de Neandertal, parce qu'il était d'une autre espèce et qu'il ne pouvait pas se reproduire avec lui (mais s'agissait-il d'un "homme" puisqu'il était d'une autre espèce ?) : c'est la théorie de certains scientifiques et aussi la mienne. Ce qui énerve les gens, et qu'ils ne supportent pas, c'est que tu sembles appartenir à une petite aristocratie locale (mais bon sang, qu'est-ce que tu as de plus que les autres ?), post soixante-huitarde, et que les gens désormais vomissent cette idéologie et surtout ses conséquences actuelles : la montée de la virulence islamiste, l'augmentation du chômage, l'appauvrissement voire le déclassement redouté de la classe moyenne. Il n'empêche que le fond de l'espèce humaine semble bien, être l'aspect génocidaire, alors elle s'invente des clivages, des "races", qui n'existent pas il faut bien le reconnaître. C'est pour cela que selon moi il faut abolir les différences, et que je suis un partisan de l'assimilation : c'est surtout un moyen d'éviter les logiques de bouc-émisseration et génocidaires ; c'est ainsi que j'interprète l'œuvre d'Eric Zemmour, qui au fond est un grand humaniste, qui veut du bien à l'espèce humaine. La France n'est pas une auberge espagnole, elle a un fond commun que l'esprit de 68 et le libéralisme économique ont ruiné, et il faut bien reconnaître aussi que finalement tu sembles sous estimer les effets néfastes et délétères, du laisser-faire économique et social : atavisme propre aux post soixante-huitards, dont le credo est "après moi le déluge"."

Le philosophe : "D'après ce que je crois savoir, Néandertal et Cro Magnon ont longtemps cohabité sans problème, comme toi et moi à la Sorbonne. Au contraire de toi, l'idée d'une France, "auberge espagnole", me plait beaucoup."

Moi : "Il est vrai que toi et moi, n'aurions pu nous reproduire ensemble : comme Neandertal et Cro-Magnon. Tu marques un point (cependant c'est un génocide qui a eu lieu sur plusieurs milliers d'années, la technique de l'extermination manquait encore à nos ancêtres Cro-Magnons : ce qui manque de moins en moins à nos contemporains, d'où la multiplication des génocides avec les temps modernes, et même si les juifs insistent pour que l'on reconnaisse la spécificité et l'unicité de "leur" génocide. Alors qu'en réalité tous les génocides ont un fond commun : la spécificité de l'espèce humaine). Cependant la France n'est pas un hôtel, ce qu'elle est devenue, comme le déplore un autre maître : Michel Houellebecq."

Le philosophe : "Arrêtons avec cette métaphore hôtelière, qui est ridicule, appliquée à un pays. Houellebecq est un artiste, pas un politique. Le génocide juif est réellement unique, en tout cas dans l'époque moderne. Ça n'enlève rien à la tragédie des autres génocides. Pour en revenir à ton ancêtre Neandertal, un génocide "sur plusieurs milliers d'années" n'est pas à proprement parler un "génocide"."

Moi : "La mise en concurrence des génocides est encore un élément typique de la nature humaine : tout le monde veut être le "plus" victime, pour avoir le plus de droits."

Le philosophe : "Non, cette concurrence est un vice contemporain, très indécent. Un être humain normal n'a aucune envie d'être victime."

Moi : "Nous sommes d'accord faisons en sorte que l'humain regagne sa dignité en faisant en sorte qu'il ne soit plus en situation de victime : homogénéisons l'espèce humaine contre une altérité extérieure, extra-terrestre pourquoi pas ? Evidemment nous nageons là, en pleine utopie. En réalité tout groupe humain a besoin d'une victime expiatoire pour se structurer : d'où l'extra lucidité d'une religion comme le catholicisme. Mais tu vas me traiter de rêveur. Non en réalité je me rallie aux théories d'un grand philosophe comme René Girard. Comme le dit Nietzsche dans Aurore : malheureusement tout être humain est d'abord le bouc-émissaire de ses parents ; dans ces conditions qu'est-ce que la normalité : un être théorique détaché de tout lien viscéral à la parentalité ? Tu vois l'être humain beaucoup plus beau qu'il ne l'est réellement, en réalité tout être humain qui a "réussi" est souillé de vices, de crimes, et de passions étouffées : c'est pour cela que généralement je n'aime pas les hommes de pouvoir, exception faite de de Gaulle (l'exception qui confirme la règle, exception née de circonstances exceptionnelles)."

Le philosophe : "Quand on ne croit pas en Dieu, on ne parle pas du catholicisme.
De Gaulle n'a aucune raison d'échapper à la règle que tu établis."


Moi : "Qu'est-ce qu'il me reste alors ? Adhérer au macronisme ?"

Phil : "J'ai aimé la métaphore hôtelière très révélatrice de la pensée bisounours.
L’analogie de la France avec «l’auberge espagnole» était possible à l’époque du boum de l’industrialisation pendant lequel la main d’œuvre locale devenait rapidement insuffisante dans les bassins d’emplois des industries minières, sidérurgiques et textiles en expansion.
Actuellement nous avons au contraire un chômage structurel chronique important.
Ces nouveaux arrivés risquent d’être exploités, nouveaux esclaves, dans le cadre de filières de travail au noir. Ils seront coincés dans cet état, sans possibilité de retour chez eux, car ils ne pourront jamais rembourser les membres de leur communauté qui se sont cotisés pour leur payer le voyage. Et qui dit exploités dit exploiteurs."

Le philosophe : "Phil, ne parlez pas à la place des autres. Si des immigrés viennent en France, c'est qu'ils y trouvent un intérêt. Et c'est notre devoir de les accueillir. Vous parlez de "bisounours" parce que vous cherchez à tout prix à rabaisser de nobles sentiments dont vous êtes incapable. Quant au chômage, il serait exactement le même, si aucun immigré ne venait."

lundi 5 septembre 2016

Manifestation contre le racisme anti-asiatique

La communauté asiatique réclame avant tout plus de sécurité : elle pointe du doigt les mêmes membres les plus virulents de certaines communautés, qu'Eric Zemmour pointe lui-même du doigt. L'essence du totalitarisme n'est pas dans l'homogénéité, mais dans le rejet et la négation de l'altérité, ce n'est pas tout à fait la même chose : le totalitarisme est la maladie de l'action politique, ou même de l'action tout court, chez les extrémistes. Les sociétés les plus harmonieuses sont souvent des sociétés homogènes, comportant peu de membres, les tribus primitives par exemple, où Rousseau va chercher le modèle de l'homme bon : ces sociétés qui n'impliquent pas le rejet des différences. Le problème en France, c'est que plus aucune communauté ne sert de modèle aux autres, notamment celle qui légitimement pourrait s'en prévaloir. Celle qui était là avant les autres, celle que l'on dit de souche, et qui s'est constituée sur mille ans : le rôle de l'école républicaine est encore selon moi, une tentative d'homogénéisation des différences et des idiosyncrasies, pour les fondre dans le moule républicain. Modèle républicain en crise, mis en situation d'échec : ce qui explique la crise de l'éducation et de la culture, et l'ultra-violence banalisée dans certains quartiers, que l'on appelle "les territoires perdus de la république", et ce n'est pas un vain mot ! Les sociétés hétérogènes provoquent des mécanismes de défense de la part de leurs membres les plus faibles, qui se replient par réaction et peur de l'autre, se renferment sur leurs identités particulières, cela engendre la maladie de la négation de l'altérité : l'islamisme est effectivement un totalitarisme, l'extrémisme des identitaires de souche, également. Maladie de la négation de l'altérité causée par la démission des élites, par le laisser-faire, qui sert de modèle à l'action politique et économique. Dans l'ordre des raisons, ce n'est pas l'islam qui crée le totalitarisme chez certains extrémistes. Mais le totalitarisme, donc la maladie de l'action, lorsqu'elle ne peut se vivre que dans la négation d'autrui, qui crée l'islamisme. Le libéralisme économique et le règne de l'argent roi, ont une grande part de responsabilité dans la genèse de cette forme virulente de maladie de l'action qui se développe essentiellement sous la forme du terrorisme islamiste, en Europe, et plus particulièrement en France.
Le logiciel post soixante-huitard, et son idéologie des années 80 : "SOS racisme" et son slogan "touche pas à mon pote", n'est plus opérant pour penser le fascisme aujourd'hui. Le fascisme le plus virulent aujourd'hui n'est pas le fait des identitaires de souche, mais des islamistes, donc des musulmans (une infime partie d'entre eux, mais parmi eux quand même). Emmanuel Mousset semble effectivement être resté bloqué à cette époque des années 80, et ne voit le fascisme que dans le FN. Or le FN de la fille, n'est plus tout à fait le FN du père, et se réclame désormais de de Gaulle, et de la plus intransigeante laïcité : mais n'est-ce pas un légitime retour du bâton, face à tous les excès violents, voire totalitaires, du communautarisme islamiste induit par le libéralisme et le règne de l'argent roi ? Reste à savoir si le FN n'avance pas masqué, pour lui aussi faire prévaloir, à l'instar de l'islamisme, une logique identitaire, donc contenant en germes de nouvelles formes de totalitarisme. Il est évident en tout cas que les partis dits classiques (PS et LR), ne soupèsent pas à sa juste mesure, la gravité de la situation : il est logique et légitime que le FN s'engouffre dans la brèche idéologique, laissée par les partis dits républicains. Quant à Zemmour, c'est un excellent journaliste, chroniqueur et écrivain, qui s'exprime sans tabou, et qui en gêne plus d'un, notamment ceux du côté du politiquement correct.

dimanche 4 septembre 2016

Problème de père, de pair ou de paire ?

Toute l'énergie de nos hommes politiques se dépense dans les stratégies de conquête du pouvoir, une fois au pouvoir, c'est un encéphalogramme plat. C'est passionnant les stratégies de conquête du pouvoir, je comprends que tout le monde se focalise là-dessus : surtout si l'on aime le jeu politique, comme d'autres ont pour hobby le jeu des échecs par exemple. Il n'empêche, le dernier homme politique à avoir gouverné fut Charles de Gaulle. Il s'est passé des choses en ce temps-là, de Gaulle était lui-même l'idéologue de sa propre politique, et cette idéologie, c'était la France. Après plus rien, une lente, et très systématique entropie (une transformation vers un état toujours plus grand de désorganisation du système), vers ce qu'est l'état de la France aujourd'hui : une désorganisation sociale résultant de l'absence de normes communes. Et le triomphe du laisser-faire, de la paresse, de l'abandon de l'humain, représenté par la toute-puissance du libéralisme économique. Les hommes politiques aujourd'hui n'ont plus la "foi" en un idéal supérieur comme Charles de Gaulle. Ils ne se fient qu'à leur propre image, dont la caricature est Macron notamment, ou Sarkozy, uniquement préoccupés de stratégies de communication pour la conquête du pouvoir. Avec notre "bon client" ou "idiot utile" régional, Emmanuel Mousset, qui tente de donner un cohérence idéologique à ces expressions du vouloir-vivre absurde, aussi absurde que peut l'être la trajectoire du vol d'une mouche dans une pièce. Parler encore de Bernanos à l'ère de la communication et de l'image, ère sans valeurs supérieures, sans transcendance, sans religion (si ce n'est la religion de réaction que constitue l'islam, et non religion d'affirmation), écrivain que plus personne n'est en mesure d'entendre, c'est comme parler le bas-breton au journal télévisé pour se faire comprendre de tous les Français.
Il est vrai qu'en son temps, Charles de Gaulle était vu comme le "père symbolique" de la nation. C'est tellement facile de se révolter contre le "père" (mai 68). Aujourd'hui aucune révolution ou même contestation n'est plus possible, ni audible, ni efficace, car plus personne parmi nos hommes politiques n'est assez fort (ou assez masochiste) pour endosser le rôle du père, ou même de l'autorité. Le paradigme du libéralisme économique dans lequel nous vivons, du laisser-faire et de la paresse idéologique, est une société de la perversion et de l'hypocrisie institutionnalisée entre pairs (une société de "potes"), et une société sans père. Je sais que je suis né durant le règne du général de Gaulle, et j'ai ressenti confusément que c'était un "âge d'or", qui s'effritait à mesure que j'évoluais. 
Donald Trump par exemple est un faux père, et un vrai pair... (pervers narcissique), avec une grosse "paire" qu'il exhibe. On va vers ça, y compris en Europe très certainement. MLP semble aussi en avoir une "grosse paire". Il faut effectivement en avoir une "grosse paire", dans une société sans garde-fous, sans protection, et soumise au règne de l'argent roi. L'ensemble de la société, et pas seulement ma petite personne, a effectivement un problème de père (l'héritage symbolique), de pair (le relationnel), et de paire... de couilles (le charisme). Mais en réalité les trois notions sont étroitement liées, et soit s'enrichissent mutuellement, soit pâtissent les unes les autres de leurs carences.