vendredi 9 septembre 2016

Une société dénuée du sens du sacré est-elle viable ?

Anonyme : "Quand on ne croit pas en Dieu, on ne parle pas du catholicisme" drôle de raisonnement! Justement les catholiques ne sont pas forcément les mieux placés pour parler de Dieu qui est le bien de tous les croyants, même des musulmans."

Le philosophe : "Ne faites pas l'idiot : les croyants, chrétiens ou musulmans, nous parlent mieux de Dieu que les athées qui ne croient pas en son existence."

Moi : "On peut être athée et reconnaître la nécessité du mécanisme psychique, pour ma part du catholicisme, qui repose sur la bouc-émissarisation symbolique d'un tiers, pour que cette bouc-émissarisation ne soit pas réelle : sur ce point Sarkozy a raison quand il admet la prééminence spirituelle du curé sur l'instituteur. Pourtant je suis instituteur et justement je vois les failles du système : qui repose sur l'exclusion d'un ou plusieurs tiers, toujours (et même si ce sont les communicants de Sarko qui lui ont sans doute insufflé l'idée pour des raisons électoralistes)."

Le philosophe : "Il faut comparer ce qui est comparable : l'ordre spirituel n'est pas l'ordre séculier, le curé n'est pas à opposer à l'instituteur, il n'y a pas à les hiérarchiser. C'est cela la laïcité, l'indépendance respective de la sphère religieuse et de la sphère profane. Sarkozy avait tort."

Moi : "L'ordre séculier est mauvais, Nietzsche avait tort : "Dieu est mort" et on ne voit pas fleurir toutes sortes de créations artistiques ou aristocratiques, on voit au contraire fleurir toutes sorte de génocides et de crimes inédits. Le monde séculier et laïque (fierté de la république d'inspiration kantienne) est très laid, ne nous voilons pas la face."

Le philosophe : "Certes, la beauté est dans le sacré. Mais une salle de classe, à la différence d'une église, n'a pas besoin d'être belle : il lui suffit d'être fonctionnelle et utile. Quant aux génocides, ils sont de tout temps et la Bible en est remplie.

Moi : "En gros le monde "n'a pas besoin d'être beau", on lui demande juste d'être fonctionnel et utile : c'est bien ce que je lui reproche et que lui reprocherait Nietzsche. CQFD, Nietzsche s'est complètement planté, lui qui se voulait le pourfendeur de la laideur et l'apôtre du beau. Par contre cet imbuvable Kant doit être très satisfait."

Le philosophe : "Le sacré n'est pas de ce monde, qui est laid et utilitaire, depuis que le monde est monde. Ce n'est d'ailleurs pas si grave : l'utilité est aussi une vertu."

Moi : "Il y a un film de Pasolini, Médée, qui parle précisément de cette perte du sens du sacré, à un moment donné, où un centaure se transforme finalement en humain normal aux yeux de Jason : moment donné qui n'est certainement pas un âge de l'humanité, mais plus un âge de l'humain."

Le philosophe : "En classe de terminale, nous étions allés voir ce film avec notre prof de philo. Je n'avais pas compris grand chose. Il faut dire que j'étais moins intelligent qu'aujourd'hui."

Moi : "Ne te sous-estime pas, tu es "né" intelligent, c'est le propre des philosophes. A moins qu'un "Socrate" nommé Chédin (qui sait !) ne t'ait fait advenir à toi-même, par l'art de la maïeutique. Je crois plus à l'hypothèse du caractère et du destin propre à Schopenhauer : tu ne pouvais pas y échapper, peut-être le fameux "sentiment d'éternité" dont tu te sens investi depuis la petite enfance, rien de très extraordinaire, mais juste ce qu'il faut de sentiment du sacré (enfant de chœur par dessus le marché !)."

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