mardi 31 août 2021

D'un siècle à l'autre

 


J'ai lu le dernier livre de Régis Debray. J'ai trouvé l'ouvrage très richement documenté et rempli de culture, mais manquant de relief, il consiste en une succession de pirouettes stylistiques plus ou moins humoristiques, et enfin comme si l'auteur se résignait (comme les pauvres) à sa propre disparition. Bien sûr s'en exhale un parfum de nostalgie pour ce qui était mieux avant - ce que je ne nie pas, les années 70 politisées n’ont rien à voir avec notre époque de décrépitude morale, culturelle et intellectuelle.

On dirait un vieux farceur qui ne s'est jamais réellement pris au sérieux, ni lui ni la révolution cubaine, et il ne partage pas une vision heideggérienne de la technique, restant optimiste quant au destin de cette dernière, ce que je déplore.

Pas assez désespéré, un incorrigible optimiste. Pour se souder malheureusement, une nation a besoin de frontières et de s'unir contre un ennemi commun, sinon elle implose de l'intérieur comme aujourd'hui (guerre de tous contre tous), et se cherche des boucs-émissaires dans toutes les catégories de la population. Depuis de Gaulle qui incarnait parfaitement le père de la nation, je ne vois pas bien qui a repris le flambeau de cette symbolique qui pourrait nous dépasser ("une certaine idée de la grandeur de la France"), la société suivant un principe d'entropie a tendance à se fragmenter.

La mondialisation est sans doute un mythe imposé par le cosmopolitisme financier pour s'enrichir de façon exponentielle et qui risque d'imploser de l'intérieur, déchiré qu'il sera par les conflits de civilisations, et je ne crois pas aux bienfaits de la société protestante américaine, avec sa sous-culture qu'elle déverse sur les masses pour mettre tout le monde d'accord comme sous un bombardement continuel.

En outre chaque société a besoin de sacrifices, qui sont sa part maudite, autrefois c'étaient les héros qui remplissaient cette fonction sacrificielle de façon désintéressée et non les victimes, qui aujourd'hui revendiquent des droits - société victimaire intéressée. D’ailleurs j'avais lu dans l'un des livres de Debray qu'il avait beaucoup d'admiration pour Du Guesclin, ce vieux héros breton du Moyen-Âge dont il déplore ne pas être arrivé à la cheville.

Quoiqu'il en soit, ne pensez-vous pas qu'il s'agit d'une forme de masochisme, du point de vue de celui qui se sacrifie pour son pays et peut y perdre la vie - c'est sans doute l'opinion de beaucoup de nos contemporains qui dans leurs vies développent des comportement anhéroïques, voyant dans l'héroïsme le comble de l'absurde et du ridicule (influence de Céline ?) ? C'était le reproche que vous me faisiez, lorsque j'évoquais la logique sacrificielle, celle du crime fondateur, à la base selon moi de toute société humaine. C'était la fonction que remplissaient les religions (du latin religare : relier les hommes entre eux et à dieu), des polythéismes avec leurs sacrifices rituels, jusqu'aux monothéismes (on pense au sacrifice du Christ dans la religion chrétienne). Dans mon esprit quand je pense à l'"avenir d'une illusion", cela m'évoque plutôt la psychanalyse, cette pseudo science, que la religion.

Parce que la psychanalyse (et je vous rappelle que ma mère en est une, qui se distingue par son absence totale de la moindre pitié y compris pour sa progéniture) n'est pas une morale, difficilement mais possiblement un fondement à partir duquel tout recommencer (ce que je ne nie pas pour tous ceux que ça peut soulager), mais surtout un business où le bonheur des uns fait le malheur des autres (j'en sais quelque chose), et qui est parfaitement adapté à tous les systèmes politiques, donc d'où ne peut sortir aucune contestation sociale.

C'est une forme de conservatisme de l'ordre établi au nom du principe de réalité.

"Pointer du doigt, pour en fait, espérer un brin de massacre populaire" ?

Pour l'instant c'est surtout le peuple qui se fait massacrer : énucléations, mains amputées, gazages. Au niveau économique ce sont les classes moyennes et populaires qui se font massacrer, passées à la moulinette des reformes néolibérales depuis le début des années 80, détruisant en une ou deux générations tous les acquis des Trente Glorieuses et du CNR.

Il y a beaucoup de survivants, de gueux, assez peu de vivants encore libres et capables de ressentir la pitié ; ce n’est pas mon modèle de société : la société compétitive et élitiste (qui repose sur l’amour propre des acteurs et non l’amour de soi).

Si les peuples de la Terre pouvaient ne pas se satisfaire des exactions, privations, humiliations, etc. qu'ils subissent, et étaient capables de s'unir contre un ennemi commun ; leurs dirigeants corrompus et dictatoriaux, ou alors dans le cadre du néolibéralisme un ennemi bien plus subtil - le cosmopolitisme financier. Alors oui ce serait bien.

Mais rassurez-vous ce genre de discours n'est plus trop à la mode aujourd'hui, et les "gueux" n'ont plus assez de conscience de classe pour pouvoir s'unir ; donc cela n'arrivera jamais, vous pouvez dormir sur vos deux oreilles.

L'espèce a tout le temps pour pouvoir se suicider en paix.

mardi 24 août 2021

Afin d'empêcher que le monde se défasse

 


« Tous les perturbateurs, des gilets jaunes aux opposants au pass sanitaire en passant par le type qui a giflé Macron, sont des homophobes antisémites d'extrême droite manipulés par des hackers russes », sont un peu nos Vendéens postmodernes selon la logique culturelle du capitalisme tardif ; des "bêtes sauvages", des cyniques, qu'il convient de gazer, énucléer, amputer. Ils sont la part maudite de la République macroniste, qu'il faut sacrifier, pour que puisse advenir un nouveau commencement, celui de la start up nation qui se fonde sur le cosmopolitisme financier.        

J'ai donc lu le dernier livre de De Fontenay, un ouvrage court et très facilement accessible, elle y parle des Vendéens, exterminés par les bleus. Sur ce crime fondateur et relativement occulté, un commencement faisant table rase du passé s'est produit : l'avènement de la République.

Toujours le besoin d'un crime fondateur, d'un sacrifice, pour que puisse advenir un commencement ; tout comme la religion chrétienne s'est fondée sur le sacrifice du Christ ; tout comme le triomphe de la raison platonicienne et aristotélicienne, en rupture avec la philosophie des présocratiques, s'est fondé sur le sacrifice de Socrate ; la fondation de Rome sur le meurtre de Rémus ; celle des États-Unis sur le génocide des Amérindiens. On peut dire que le massacre des Vendéens constitue la part maudite de la République naissante.

Mariages consanguins et "dégénérescence" de la "race", des hommes devenus si bestiaux - des idiots, parlant par idiomes (quoique la Bretagne bretonnante à cette époque, à l'ouest d'une ligne allant de Saint-Nazaire à Plouha, et sa langue qui n'a absolument rien à voir avec le français, ne furent pas toute proche de la Vendée) ; que les écrivains de l'époque les comparaient à des bêtes sauvages et sanguinaires, tuant et égorgeant exactement de la même façon qu'ils allaient à la messe, dansaient lors des fêtes de village et jouaient de leur étrange musique traditionnelle ; les révolutionnaires ont-ils eu raison ?

Fallait-il exterminer ces masses superstitieuses et obscurantistes, ces "Gaulois réfractaires au changement", pour faire advenir un nouveau commencement reposant sur l'idée de raison scientifique et expérimentale d'origine cartésienne ? Pour faire advenir l'idéologie de la raison dirait Heidegger ?

Quel est l'héritage cartésien de la Révolution ? C’est à tort que l’on imputerait à Descartes la responsabilité de la table rase, alors qu’il n’emploie jamais cette expression par ailleurs classique dans toute l’histoire de la philosophie. Le doute méthodique ne vise pas à mettre en place quelque cire vierge mais à suspendre provisoirement le jugement. Car non seulement Descartes affirme la présence dans l’esprit humain d’idées innées mais, pour ce qui est de la conduite de la vie, il recommande, à la manière stoïcienne, de changer ses idées plutôt que l’ordre du monde, et s’en tient donc à la prudence, à l’acceptation des choses comme elles sont. Faire de Descartes un révolutionnaire est donc un contresens, c'était plutôt un réformateur.

Un peu comme Nietzsche finalement : accepter le monde tel qu'il est, sauf que ce dernier surenchérit en y ajoutant la volonté de puissance, l'éternel retour et l'amor fati. Et Nietzsche a pourtant lui aussi inspiré d’autres révolutionnaires qu'étaient les nazis, qui voulaient fonder un commencement sur un autre crime fondateur, le sacrifice des Juif d’Europe, qui aurait constitué la part maudite du IIIème Reich qui devait durer 1000 ans si toutefois il avait survécu à son désastre final très prématuré ; alors que son œuvre déformée par sa sœur ne s'adressait pas seulement au peuple allemand, mais avait une vocation plus universaliste que nationaliste, et même voulait faire des Juifs les maîtres et les guides de l’Europe en raison de leur héritage singulier, culturellement (Aurore), plutôt que les Allemands.

Nietzsche n'a jamais été du côté du peuple mais de celui de l'aristocratie. Peut-on comparer le cosmopolitisme financier actuel à une nouvelle forme d'aristocratie ? Je ne le pense pas car cette "élite" se caractérise par son manque de culture et sa vulgarité, son goût du bling-bling et du cash money. Elle n'a peut-être en commun avec l'aristocratie que le goût du luxe et de la domination, et les people qui se font lifter, refaire les seins et toutes les autres parties du corps, en sont les représentants les plus caricaturaux. On pourrait dire qu’ils singent l’aristocratie, sans le début du commencement de valeurs en commun.

 « Actuellement en croisière en Grèce sur le yacht de son mari milliardaire, Diane von Fürstenberg a dédié sa baignade quotidienne aux femmes afghanes : « Bénie au milieu des flots, je me sens libre et pourtant mon cœur saigne pour les femmes en Afghanistan… » »

Cosmopolitisme financier vs peuples = montée de l’extrême-droite ?

Je crois qu'il y a moins de différences entre un représentant lambda du peuple afghan, même inféodé aux Talibans, et un représentant lambda du peuple français, qu'entre un représentant de n'importe quel peuple du monde et un membre de l'élite financière cosmopolite. En quoi cette femme milliardaire peut-elle se permettre de parler au nom des femmes occidentales lambdas, alors qu’elle n’appartient pas du tout au même monde et n’affiche absolument pas les mêmes valeurs, de sueur et d'efforts du struggle for life qui au final abrutissent bien plus qu’elles n’épanouissent les femmes occidentales.

Si un intellectuel a quelque chose à dire sur la puissance du cosmopolitisme financier, qu’il le dise. Si c'est vraiment un intellectuel il est capable de le dire avec force. Non, je crois que la plupart s'accommodent très bien du monde tel qu'il est. D'ailleurs le nihilisme selon Nietzsche est dans la volonté des philosophes de changer le monde tel qu'il est ; et un peu plus tard Heidegger lui répondra que le nihilisme est dans la volonté de puissance.

Dans ce combat inactuel entre les deux philosophes, dont l'un est désormais directement assimilé à l'idéologie nazi selon les travaux d'Emmanuel Faye (qui en fait même LE théoricien du nazisme et du "racisme ontologisé"), il semble aujourd'hui que c'est Nietzsche qui ait vaincu quand on voit la façon dont se comportent nos contemporains et les effets de la propagande publicitaire.

Apparemment il n'y a pas d'alternative au camp du bien, c'est à dire au cosmopolitisme financier, si ce n'est l'extrême droite, et comment, et doit-on s'y résoudre ?

Sans doute une majorité d'intellectuels se contentent-ils de faire du mieux qu'ils peuvent leurs métiers d'universitaires, de profs, en accord avec leur conscience et afin d'empêcher que le monde se défasse. C'est sûr que Macron prend un peu les gens pour des cons ; alors qu'il est un pur produit du cosmopolitisme financier, il flatte la probité du petit peuple des intellectuels qui fait honnêtement son travail de mémoire sur les jeunes générations, avec en toile de fond le "plus jamais ça" induit par la Shoah, mais qui en "même temps" paralyse toute action politique susceptible de remettre en cause l’ordre établi autrement que par des réformes nous projetant en arrière socialement.

Par analogie donc avec les Vendéens, le sacrifice des gilets jaunes pourrait faire advenir le fameux « nouveau monde » (le meilleur des mondes ?), le nouvel ordre mondial d'où la richesse des milliardaires que l'on encourage à s'enrichir toujours plus, avec toutes les aides possibles et inimaginables de l'État, pourrait "ruisseler" sur les classes moyennes et pauvres.

samedi 14 août 2021

Misère de la femme afghane

 

Beaucoup de nos contemporains sont comme Monsieur Jourdain, ils font du Nietzsche sans le savoir, sans même l'avoir lu. Tout le discours publicitaire me semble imprégné de nietzschéisme de façon paroxystique. On y incite toutes les catégories sociales, les particularismes ethniques et religieux, les sexes dans ce qu'ils ont de singulier, à la volonté de puissance.

Jamais l'Europe n'aura été aussi douce et pacifiée qu'au XVIIIème siècle, sous l'action du long travail du christianisme et de la monarchie, d'ailleurs en voie de se réformer à son rythme lorsqu'on lui a coupé la tête, pas si autoritaire, patriarcale et autocratique que la propagande bourgeoise veut bien le laisser entendre. Cette douceur de vivre a permis d'élaborer des idées en très grand nombre sur la façon de rendre le monde encore meilleur, que nous sommes bien incapables de reproduire, aveuglés que nous sommes par une volonté de puissance nietzschéenne qui nous divise, et nous fait être en guerre, tous contre tous, au nom de nos particularismes.

La laïcité c'est quelque chose d'assez jeune, qui a des racines bien plus vieilles et bien plus profondes, des racines religieuses. La laïcité est la sécularisation de l'idée de religion dont l'étymologie est relier (du latin religare : relier les hommes entre eux et à dieu). La difficulté de la laïcité c'est d'arriver à relier des gens entre eux, afin de faire citoyenneté, malgré tous leurs particularismes ethniques, religieux, de sexe...

Et les particularismes entendent faire entendre leur voix. Donc la laïcité est vécue par beaucoup comme étouffante, comme une contrainte. Pour adhérer à la laïcité il faut mettre de côté ses différences, ce que de plus en plus de gens n’acceptent pas. Ils refusent d’adhérer à des règles du jeu communes, et se font procéduriers, ils portent plainte contre l’institution, le professeur, pour un oui, pour un non. Cela d’ailleurs dépasse le simple cadre de leur appartenance ethnique, religieuse ou de genre. N’importe qui désormais entend porter plainte contre l’institution, pour faire valoir ses droits : c’est l’idéologie des droits de l’homme, l’individualisme, qui se retourne contre le désintéressement de la laïcité.

On assiste surtout à une judiciarisation des rapports humains, car les rapports ne vont plus de soi, jusqu'au sein du couple et de la famille. Les gens sont devenus tous très procéduriers, ils portent plainte contre leur conjoint(e), leurs parents, leurs enfants, pour un oui, pour un non.

Notre société va faire la fortune des avocats et des tribunaux.

Nous assistons effectivement au règne des fils de... j'entends par là que la transmission se fait désormais au sein des familles qui ont la chance de s'entendre encore, exclusivement, puisqu'elle ne peut plus se faire dans un cadre public et apaisé (crise de l’école).

La volonté de puissance ? Voilà le nihilisme pour Heidegger, alors que pour Nietzsche elle était dans la volonté des philosophes à vouloir changer le monde tel qu'il est.        

Nietzsche n'est pas net du tout dans cette affaire de nazisme. Qu'un Deleuze, un Foucault ou un Derrida lui aient voué un véritable culte en dit assez long sur l'impensé de la French Theory, cette idéologie racialiste et identitariste qui nous revient des Etats-Unis - où l'avait importée l'ignoble Paul de Man - en pleine figure ces derniers temps.

Effet pervers de la French Theory : elle ne nous rend pas plus ouvert à l'Autre et à ses différences, elle fait que l'Autre se retranche dans sa différence, elle favorise plutôt l'intolérance anti-universaliste arcboutée sur soi.

La grande guerre est moins entre les banlieues et le reste de la société, entre l'islam et le reste de la société, entre les grands centres urbains et la France périphérique, qu'entre les hommes et les femmes ; plus grave encore entre les mères et les fils qu'elles castrent à défaut de pouvoir en faire des Amazones comme elles (j'en sais quelque chose).

Et les Talibans, et les femmes afghanes, qui va parler des femmes afghanes ? Que fait BHL ? Que fait Caroline Fourest ? La pensée religieuse : le bien/le mal ?

Cependant la notion d'ambivalence est plus exacte que ce manichéisme simplet propre à "nos" médias et la plupart de "nos" intellectuels, inféodés au camp du bien.

Dans ce combat manichéen entre le bien et le mal, il faut faire bonne figure désormais en conspuant Heidegger. Certains lisent effectivement Heidegger comme un penseur nazi stricto sensu, ayant été enchanté par la mécanisation de l'homme qui n'était pas digne de faire partie de l'élite.

Moi je lis plutôt Heidegger comme une dénonciation de la mécanisation de l'humain, comme la dénonciation de l'arraisonnement du monde qui se fait sur le mode de la provocation aboutissant à la mécanisation de l'humain. Descartes parlaient des animaux-machines alors qu'en fait il annonçait l'advenue des hommes-machines. 

Les "élites" à lire Heidegger, seraient plutôt ceux qui ont su garder des modes de vie ancestraux, artisanaux, artistiques, où le rapport à la nature se fait sur le mode du dévoilement et non de la provocation. Les "élites" pour lui ce sont ceux qui sont encore capables de célébrer la nature, de lui rendre hommage, en refusant de rentrer dans le jeu de son exploitation totale donc totalisante ; l'arraisonnement de la nature est en réalité une forme de totalitarisme écocidaire qui nous retombera sur la tête à un moment ou à un autre. Je crois aussi que c’est l'exploitation totale de la nature, qui permet l’expression dans tout son paroxysme nihiliste de la volonté de puissance chez nos contemporain, par le biais de la consommation, aspect qu’Heidegger voyait d’un mauvais œil. Vu sous cet angle, on pourrait considérer les derniers Indiens d'Amazonie, voire si je voulais être provocateur les Talibans, comme des "élites" heideggériennes, des Êtres (capable d’esprit ou de grâce) rescapés au sein des étants (les hommes mécanisés).

Certes toutes les civilisations à un moment ou à un autre ont fait appel à la technique, elles se mécanisent, sauf qu'à la différence des civilisations antiques qui se sont mécanisées, et même de la civilisation du Moyen Âge et de la Renaissance, cet arraisonnement, cette exploitation totale du monde, a été planifiée ; tout comme l'a été le génocide des Juifs. Ce qui le distingue des autres génocides, celui des Amérindiens par exemple. Dans le cas de la mécanisation des civilisations antérieures, elle n’obéissait à aucun plan, elle n’était l’objet d’aucune métaphysique fondée sur la subjectivité prédatrice du cogito ergo sum.

On ne pourra pas dire qu'on ne savait pas, lorsque la planète se retrouvera exsangue, ruinée, soumise aux dérèglements climatiques les plus violents, homicides et écocides. La "solution finale" si je puis dire, concernant la nature, a été élaborée et mise noire sur blanc sur le papier, et l’on peut dire que c’est Descartes qui l’a inaugurée.

Si je voulais être très, très, provocateur je dirais que les Talibans sont des Êtres, et que nous sommes nous Occidentaux, des étants...

Les Occidentaux se donnent pour caution morale la dignité humaine, les valeurs de l'humain et ses droits, et se choisissent des hérauts personnifiant le bien (intellectuels, journalistes, politiques...) ; tout le reste est rejeté dans le camp du mal, toute voix discordante dans ce bel unanimisme est assimilée à du fascisme rouge-brun. Les femmes occidentales sont selon moi les plus sensibles à ce genre de discours manichéen dénuée de toute ambivalence, et considèrent avec horreur les exactions de l’islam concernant les femmes, qu’elles soient réelles ou exagérées par un genre de propagande dont nous avons le secret.

Les libertaires radicaux, les partisans de l'émancipation féminine, veulent tout casser, tous les équilibres "naturels", ancestraux, traditionnels, ils ne jurent que par le progressisme, l'émancipation de l’« odieux patriarcat » ; ils sont semblables en cela aux anarcho-capitalistes de la Silicon Valley, tel Jeff Bezos, pour ne citer que le plus emblématique d'entre eux. Libertaires radicaux, black blocs vs anarcho-capitalistes de la Silicon Valley = même combat. La seule différence notable entre les deux c'est l'épaisseur du porte-monnaie. Cela fait bien longtemps que le capitalisme a changé son fusil d’épaule, qu’il n’est plus patriarcal, et que les libertaires d'extrême-gauche figurent parmi leurs idiots utiles.

Nietzsche disait que la femme était le repos du guerrier ; mais comme les femmes sont devenues des guerrières, qui sera le repos du guerrier ? Il ne reste possible que des associations de malfaiteurs.

En Afghanistan la femme est encore le repos du guerrier, voire même plutôt le butin du guerrier. En Occident, l'homme est devenu subrepticement le repas de la guerrière (Lacan profondément touché par le film d'Oshima ; L'empire des sens). Vous avez encore l'illusion que dans la société en passe de devenir avec brutalité (celle de la police et des magistrats aux ordres de Schiappa) matriarcale, que constitue l'Occident, vous pourrez faire mieux que les hommes ? Qui vivra verra.

Nous sommes en plein dans cette lutte, dans la guerre de tous contre tous, et surtout la lutte entre les sexes ; au départ pour les capitalistes mettre la femme sur le marché du travail était une façon de réduire le coût de la main d’œuvre par salarié, d’augmenter la valeur ajoutée, et donc les bénéfices de ceux qui possèdent l’appareil de production. Puis cela s’est transformé en combat sociétal au sein de chaque famille. Je ne suis pas sûr que les femmes soient plus pacifiques que les hommes, c'est un préjugé. Ma mère en tout cas ne m'a pas fait de cadeaux, j'ai été sa victime, son petit bouc-émissaire de poche sur qui planter les aiguille de la perfidie. Dans le fond du discours féministe il ne s'agit pas d'égalité, les femmes souhaitent en réalité l'hégémonie, et c'est véritablement une lutte à mort avec les hommes qui s'insinue jusque dans le couple, jusque dans le rapport aux enfants.

C'est bien parce qu'il s'agit de féminicide, d'un crime qui s'apparente à un génocide du genre féminin, que Darmanin et Schiappa ont décidé de faire des violences faites aux femmes la priorité des priorités de tous les flics et magistrats de France, devant toutes les autres formes de délinquance, voire le terrorisme. C'est vrai que ces violences sont abjectes, mais là il s'agit d'une forme de propagande d'État dont des maris innocents peuvent faire selon moi les frais (j'en sais quelque chose). 

C'est une propagande idéologique, dans le cadre d'une "guerre des sexes" qui a existé de tout temps - dont Nietzsche dit d'ailleurs qu'elle fait tourner le monde, à la condition qu'elle s'accompagne d'un minimum d'élégance... ce qui n'est plus le cas. Voudrait-on faire absolument gagner les femmes et accéder à un genre de matriarcat pour détrôner l'odieux patriarcat, que l'on ne s'y prendrait pas autrement. On a déjà coupé la tête au roi en 1789, coupons maintenant la b... aux hommes, car ce mouvement s'inscrit dans la même mouvance que celui qui fait la chasse aux hommes qui harcèlent les femmes et/ou les violent (Weinstein, Depardieu, Poivre d'Arvor, Bruel, Besson etc.).

Je ne pense pas que les maris ou les conjoints tuent leurs femmes parce qu'elles sont des femmes. On ne peut pas assimiler ça au fait de tuer un Juif parce qu'il est juif. Ce terme est idéologique et politique : c'est vouloir faire d'un crime passionnel qui est déjà abject, quelque chose de bien plus abject encore. Comme si dans l'âme de tout homme rôdait un nazi en puissance à l'égard de sa femme, selon une logique binaire : bien/mal(mâle). Le pire est que les gens gobent : plus c'est gros plus ça passe. En fait le crime conjugal ne touche qu'une femme sur 350 000 en France, soit 0,0000028% de la population féminine, c'est déjà sans doute beaucoup trop, mais comme on fait un zoom énorme sur ce phénomène qui a existé de tout temps, il nous paraît absolument monumental et inédit.

« La bonne vieille expression « crime passionnel » est déjà une façon d’atténuer la responsabilité de l’auteur. Le pauvre, la passion l’a poussé au crime... ». Je sais, cela fait partie de la doxa féministe selon laquelle : « il faudrait plutôt parler de féminicide, au même titre que l'on parle de génocide pour la Shoah. Tous les hommes sont potentiellement des nazis qui s'ignorent. Ce n’est donc pas par passion, mais par véritable nazisme viscéral et intrinsèque, que des hommes tuent leurs femmes (90 en 2020, pour 16 hommes tués par leurs conjointes, mais eux l'avaient sans doute bien cherché). Ce sont des monstres qui n’ont plus rien d’humain, rien ne permet d'expliquer, de comprendre et encore moins d'excuser, le motif de leurs gestes, comme pour les nazis nous sommes dans le domaine de l'indicible. »

Dans la doxa binaire de nos contemporains, l’homme est forcément un salaud, il représente le mal (mâle) et toutes les casseroles qui vont avec (croisades, esclavagisme, colonialisme, racisme, antisémitisme, misogynie, homophobie…), et la femme est éternellement pure et fraîche comme la rosée du matin. Si l’on a le malheur de nuancer, c’est comme commettre un matricide.

Dans chaque combat, chaque lutte à mort, le vainqueur qu'il soit femme ou homme en retire des forces, il augmente sa volonté de puissance. Aujourd'hui l'Occident globalement a mis la femme dans le camp du bien et l'homme dans le camp du mal, on le voit en France à la façon dont sont traités les hommes par Marlène Schiappa.

L’égalité mâles-femelles n'existe nulle part dans la nature (la mante-religieuse dévore le mâle après, voire pendant l'accouplement), et je crois que ce sera toujours la même chose dans la société humaine. Au terme de ce combat pour l'émancipation des femmes qui est en réalité une lutte à mort, un seul sexe sortira vainqueur et renforcera sa volonté de puissance pour asservir l'autre sexe. Les compagnons des féministes sont déjà des hommes castrés.

D’un point de vue sociétal nous en sommes au stade d’un totalitarisme dit soft. Avec un camp du bien clairement défini ayant des frontières qui sont celle du monde occidental, et un camp du mal à sa périphérie ; et dans chaque famille un "mauvais" père et une "bonne" mère. Or la façon qu'a chacun d'aborder le problème de la vérité est unique. En cette matière il ne devrait pas exister de police de la pensée dispensant de bons conseils (pour le bien de tous évidemment), et la tolérance devrait être absolue, y compris pour les fous, les déficitaires, les victimes, les hommes, a fortiori pour les musulmans.

D’autant plus que le mal est la chose du monde la mieux partagée, que l’on soit de gauche ou bien de droite, que l'on soit femme ou homme, même les nazis pouvaient être de bons pères de famille, là où un démocrate peut-être encore de nos jours, un véritable bourreau pour ses enfants.

Le mal qu'on le fasse volontairement ou "involontairement" (acte manqué) reste toujours le mal. L'inconscience est une excuse trop facile qui vient toujours après coup, comme après un génocide : "on ne savait pas". En réalité on n'a pas voulu savoir.

L’inconscience aujourd’hui c’est celle de nos démocraties qui ne veulent pas voir sur quel moteur ignoble elles fonctionnent : l’exploitation des "ressources humaines" jusqu'au burn-out et la mise en demeure de la planète de nous livrer toutes ses ressources.





vendredi 13 août 2021

Un patriarcat abusif ?

Marlène Sciappa ne parle que de punir, comme ma génitrice elle n'a que ce mot à la bouche.

Quand toute la société considère à peu près tous les hommes comme des porcs bons à être incarcérés au moindre dérapage, et sans aucune explication possible avec les magistrats, ça ne vous choque pas le moins du monde. Quand la priorité de tous les flics et magistrats de France est la lutte contre les violences faites aux femmes, devant le terrorisme et toutes les autres formes de délinquance, vous trouvez ça tout à fait normal. J'en ai fait l'amère expérience, et j'ai tout perdu, mais peu importe mon cas particulier - même si je trouve son traitement absolument injuste et disproportionné par la Justice sous les ordres de Schiappa. Dès qu'un homme ose dire que finalement les femmes ne valent pas beaucoup mieux que les hommes, et que penser le contraire relève d'un préjugé qui remonte à l'amour courtois ; alors là c'est absolument insupportable aux yeux des femmes, ces "déesses" complètement idéalisées en Occident chrétien contrairement à l'islam, où ces coutumes de toutous bien dressés par leurs femmes et leurs mères, paraissent complètement ridicules et disproportionnées. Il a dû souvent vous arriver de considérer que certains hommes se comportaient comme des porcs (Depardieu, DSK, Weinstein, Polanski, Matzneff...), mais il ne vous est jamais venu à l'idée que des femmes pouvaient se comporter comme des truies ; là aussi j'en ai fait l'amère expérience, avec ma propre génitrice.

Je parle de Schiappa, et je livre mon intuition la concernant : je pense qu'il ne s'agit pas d'une "belle personne", et qu'elle profite de sa situation d'autorité pour émasculer les hommes (volonté de puissance ; Nietzsche). C'est vrai que cela vient de ma propre expérience, ma mère ayant fait exactement la même chose avec moi depuis que je suis tout petit, ce qui a contribué à torpiller mes deux couples, m'a obligé à me séparer de deux femmes que j'aimais, enfin m'a conduit directement 6 mois en prison.

Oui, pour moi c'est comme un trauma, qui malheureusement ne disparaît pas avec le temps, ayant dû causer de graves dommages cérébraux (lire Cyrulnik) ; la résilience est pratiquement impossible quand c'est la mère qui n'a pas apporté de soins et en plus s'est livrée à des sévices sadiques de l'ordre du caprice - c'est aussi pour cela que j'apprécie Schopenhauer et Houellebecq qui ont eu un peu la même expérience avec leurs mères respectives. Mais je peux comprendre que votre expérience de vie soit totalement différente, je peux comprendre les femmes ayant été victimes d'un patriarcat abusif.

Je sais aussi qu'une fois dans ma vie, une femme extrêmement intelligente, grâce à la relation que j'avais eu avec elle, m'avait permis de sortir de cet engrenage mortifère que constitue la relation avec ma mère ; il s'agissait d'Élisabeth de Fontenay. Mais par bêtise et inconscience j'avais tout foutu en l'air.


jeudi 12 août 2021

Agnosticisme ou athéisme ; faut-il brûler les églises ?

 


Je n’ai toujours pas rencontré de personne qui fût athée autrement que par conviction fondée sur l’émotion, la répugnance ou l’antipathie coléreuse. Aucun argument digne de ce nom n’est allégué, si ce n’est de laborieuses tautologies. Sur un continent modelé par le christianisme, faire l’économie de dieu n’est pas à la portée du premier bafouilleur venu.

Les agnostiques sont plus probes, tout le reste ressemble à de la haine contre soi-même, et c'est suspect. On n'a pas plus de preuves de l'existence de dieu que de son inexistence, et ça la science et le prêchi-prêcha maçonnique n'y pourront jamais rien changer.

L'idée d'humaniser dieu est absurde comme le disait Spinoza ?

C'est tout sauf absurde d'un point de vue anthropologique, c'est la déshumanisation du monde sous l'action des sciences et techniques qui rend le monde absurde. Surtout la technique moderne qui est un arraisonnement du monde sur le mode de la provocation, la nature étant sommée de livrer toutes ses ressources et ses richesses à l'homme " son maître et possesseur". Franchement on pourrait dire : de quel droit ? C'est bien plus violent que d'humaniser la nature par anthropomorphisme, ou d'humaniser dieu en vieux barbu installé dans un nuage.

Même si le dit Nietzsche toutes les religions sont, au plus profond d'elles-mêmes, des systèmes de cruauté, le capitalisme me paraît encore bien plus cruel.

Révolution, droits de l'homme, séparation de l'église et de l'État, laïcité, mai 68... sur fond de capitalisme triomphant… Sade triomphant !

Ce sont davantage à mon avis ces causes-là qui ont ruiné l'austérité nécessaire à la patience de penser. Mais vous avez tout à fait le droit de ne pas aimer Nietzsche. N'empêche que la volonté de puissance est un concept opérant, c'est d'ailleurs selon moi l'aspect le plus inquiétant de son œuvre, celui qui mène tout droit au nihilisme contemporain et que les publicitaires de tout acabit ne cessent de recycler pour vendre leurs produits dont l'obsolescence est programmée.

Schiappa la grande castratrice ou la volonté de punir. Un gouvernement au service du capitalisme.

Parfaite représentante de notre laïcité à la française, absolument privée de toute idée de grâce et glorifiant l'amour propre, l'arrogance, l'autoritarisme, la volonté de punir émanant également de tous les autres "bons élèves" de la classe, qui ensuite deviennent nos gouvernants nocifs et nuisibles. Avec des femmes qui au nom du féminisme n'ont qu'un seul fantasme : émasculer.

« J'veux du cuir, pas du peep show, du vécu, j'veux des gros seins, des gros culs, ah, ah » Alain Souchon

Elle a des gros seins et un gros cul. Tout est un peu trop gros chez elle. Elle doit être très complexée, c'est pour ça qu'elle est si méchante avec les hommes.

Comme en plus elle a un caractère de pétasse tout juste bonne à écrire des livres cochons, ayant dû recevoir quelques baffes de la part d'hommes peu galants dans son adolescence ; elle a fixé la priorité à tous les flics de France : la lutte contre les violences faites aux femmes. Haro sur les sales mecs ! Enfin son fantasme de punir les hommes, de leur taper dans les couilles (ballbusting), de les émasculer, se réalise, avec la bénédiction des braves gens votant Macron.

Au temps de l'amour courtois les femmes étaient dignes de respect, car elles avaient de l'élégance à défaut de savoir aimer les hommes. Elles n’en ont plus du tout, et la dissymétrie dans le rapport homme/femme est que les hommes aiment encore les femmes (les adulent toujours même, beaucoup trop, conséquence fâcheuse de l'amour courtois), alors que le contraire n'est pas vrai le moins du monde ; dans un contexte de guerre de tous contre tous, d'extension du domaine de la lutte, dans le monde du travail et jusque dans les rapports "amoureux".

Je sais ce que je dis n’est pas fait pour flatter la vanité des femmes, qui est immense.

Les terroristes et les islamistes peuvent dormir sur leurs deux oreilles, les magistrats sont occupés à pourchasser et punir les hommes "violents", blancs de préférence ! 

Si l'École sert à produire ça, mieux vaut encore se passer d'École !

Sexualité, consommation, travail. La devise du capitalisme triomphant.

Vous mesurez la validité d'un système à l'enrichissement d'une infime minorité qui profite du système, pour exploiter des masses incroyables d'individus décérébrés, privés de toute grâce et considérés comme des robots productifs ; bons à être mis au rebut s'ils ne produisent pas comme il faut, c'est-à-dire en réalité s’ils sont incapables d’être des consommateurs trouvant suffisamment de satisfactions dans l’acte de consommer.

Des cons, des peines à jouir du système qui n'ont pas su trouver une sexualité épanouissante au préalable (doxa freudienne ; ou Freud pour grands débutants ; ou vulgarisation de Freud pour les masses). D'ailleurs au fronton des mairies on ne devrait plus trouver écrit "liberté, égalité, fraternité", mais "sexualité, consommation, travail".

Vous n'êtes pas "libre" car vous êtes un néotène tout comme moi, un animal inachevé et mal fini pour qui la liberté est en réalité un manque et non une plénitude (celle de l'instinct inscrit chez tous les autres animaux), un être hétéronome et non pas autonome (erreur de Kant) comme l'est l'animal, créateur de dieux et de civilisations (contrairement aux animaux) en raison de ce manque même, alors que le contraire est le nihilisme contemporain - les hommes ne créent plus puisque tout est automatisé et qu'ils pensent manquer de rien. Les progrès des sciences et techniques et la richesse infinie qui semble en découler, se sont substitués à l'instinct que nous n'avons pas, faisant de nous des bêtes tout juste bonnes à consommer et à se déplacer, et semblent avoir pour rôle de combler ce manque que les philosophes du passé appelaient liberté. D'ailleurs pas mal de milliardaires à l'instar de Jeff Bezos se disent libertariens, c'est-à-dire anarcho-capitalistes, sans autre "dieu" que le veau d'or. Cela nous ramène pas mal de temps en arrière votre "liberté" !

Pascal avait tout prévu : misère de l'homme sans dieu.

mardi 10 août 2021

Lou Reed contre Macron


 

« A 45 ans, Lou Reed se fait volontiers dénonciateur, renvoyant dos à dos les bigots de toutes les couleurs, qu'il s'agisse de Reagan ou de Farrakhan, "qui parlent religion et fraternité" tout en prêchant la haine. La "violence vidéo" ne lui plaît pas non plus : "Le matin, buvant son café/ Il allume la télé et tombe sur un slasher/ Des femmes en sueur attachées, sorties d'un dessin animé/ Haletant et hurlant/ Merci et bonne journée".

Dans une interview de 1982, Lou Reed déclarait : "Je me suis toujours dit que je devrais adapter de grands discours en musique. Pourquoi s'arrêter à des choses simples ? On peut faire penser ses personnages comme on veut, on peut les rendre schizophrènes, contents, malheureux, on peut leur faire faire ce qu'on ne peut pas faire dans la vie réelle."

En 2003, avec "The Raven", concept-album en forme d'oratorio, avec l'aide d'intervenants talentueux, tels Bowie ou Buscemi, l'artiste met en scène la vie et les œuvres de l'un des plus grands écrivains américains, Edgar Allan Poe.

Le résultat est inégal, contrasté, mais a le mérite, comme avec Metal Machine Music, de secouer nos certitudes. A 61 ans, Reed reste irrécupérable. » Arnaud de la Croix.

N'est-ce pas aujourd'hui Macron qui prêche la haine, et fracture la société comme jamais avec ses "idées" de "nouveau monde", de start up nation, et a fortiori de pass sanitaire ?

Lou Reed est à l'évidence un génie intemporel (tout comme Bowie, les Rolling Stones, les Pink Floyd etc.). Je me suis trompé sur lui, sur eux, mea culpa, ainsi que sur toute la musique rock, qui s'est épanouie selon moi avec le plus d'intensité et de virtuosité au cours des années 60/70, ayant quelque chose de géniale ; les années 80 constituant un virage dangereux et plutôt déclinant (pardon de le dire) de ce type de musique contestataire à l'origine, mais peu à peu récupéré selon moi par l'idéologie du capitalisme. Comme on a vu faire les Rolling Stones un concert à Cuba (vraiment innocemment ?), ou Keith Richards jouer dans un film Disney.                         

Mais cela n'enlève rien à la valeur de mon opinion selon laquelle les circonstances pour développer des forces créatrices sont devenues très défavorables depuis le début des années 80. S'il y a encore des créateurs, ce dont je ne doute pas, je pense qu'ils seront de plus en plus obligés de créer dans un état de clandestinité, bref de se cacher pour développer leurs talents à l’abri de la toxicité. Car les forces destructrices et toxiques à l'œuvre dans le néolibéralisme, puisqu'il s'agit de leur principe et de leur moteur (les forces à l’œuvre dans la destruction créatrices), sont bien plus fortes que les forces créatrices et même les étouffent souvent dans l'œuf. Et l'on assiste à l'apparition d'un nouveau type d'homme pour qui c'est détruire qui est le bien, je pense notamment à tous nos archi-milliardaires dont la façon de concevoir les rapports humains ruisselle sur les masses à défaut du moindre denier.

J’espère de tout cœur que vous ne trouverez pas mon commentaire stupide.

Le scientisme, le positivisme, sont une croyance, pas la science. Kant et Schopenhauer n'ont pas dit que les causes premières n'existaient pas, mais qu'on ne pouvait pas les connaître.

J'entends souvent autour de moi cette expression qui m'interpelle : "j'ai foi en la science" ; c'est une forme de croyance assez répandue. Or je pense que la science est incapable de sauver quelqu'un spirituellement, du point de vue du salut de l'âme j'entends. Cela, seules les religions en sont capables. C'est pour cela que Kant disait qu'à partir d'une certaine limite qui est celle de la critique, la raison devait laisser place à la croyance. Ce que nos contemporains matérialistes et totalement déspiritualisés ont totalement oublié pour leur plus grand malheur.

Le terme d'"âme" est une invention de la religion, qui a été repris par de nombreux métaphysiciens, qui est finalement tombé en désuétude avec le déclin de la métaphysique sous l'impulsion de Kant. Aujourd'hui ce terme d'"âme" ne veut plus rien dire pour la très grande majorité de nos contemporains, effectivement.

Le terme de conscience quant à lui garde encore une certaine valeur aujourd'hui, et l'on dit notamment que les Juifs dans le monde en sont la conscience ; on dit aussi que "science sans conscience n'est que ruine de l'âme", ce qui nous ramène assez ironiquement au terme d'âme qui finalement n'a pas totalement déserté la sagesse populaire sous la forme de ses dictons qui ont encore lieu d’être.

Si ce terme est tombé en désuétude, il n'a pas tout à fait déserté la sagesse populaire comme je vous l’ai dit. Personnellement je pense que ce terme n'est pas sans rapport avec la notion de grâce. Et je crois qu'entre la raison et la grâce, la grâce est plus proche de la "vérité" ; mais elle est malheureusement rendue beaucoup plus fragile par ce que Heidegger nomme "idéologie de la raison", c’est pour cela que ce philosophe préconisait un retour aux présocratiques et qu’il affirmait que seul un dieu pouvait nous sauver.

La raison ? Il s'agit effectivement d'une idéologie et rien d'autre, puisqu'en dernier ressort la raison ne nous permettra jamais d'accéder aux causes premières, donc de donner du sens à nos vie alors que la grâce le peut.

C'est toute la critique que Nietzsche fait déjà du statut de la vérité dans le platonisme, et qui est la conception de la vérité que la science a. Même ceux qui "sortent" de la caverne remplacent une illusion par une autre illusion selon lui, une illusion plus ectoplasmique nous dit Nietzsche, donc finalement plus spiritualiste (une sorte de chasse aux fantômes par un genre de magie occulte que constitue la technique), fruit d’un idéal ascétique. La vérité n'appartient pas au monde des idées parce-que le monde des idées n'existe pas nous dit Nietzsche, il s’agit d’un idéalisme, le scientisme est un idéalisme tout comme le positivisme. C’est seulement en termes d’efficience que l’on peut dire que le monde de la science est davantage valide que le monde de la religion ou non, mais en soi il n’a pas plus de valeur. Et sur le plan de l’efficience, il est en réalité bien plus destructeur : c’est l’objet de toute la critique de la technique moderne et son rapport avec la nature constituant une provocation sur le mode de l’arraisonnement qui est faite par Heidegger.

Moi ce que je vous dis c'est que le monde de la science est bien plus diaphane, bien plus "spiritualiste" au sens d'ectoplasmique et de fantomatique, que le monde de la religion ou encore avant celui des mythes et légendes, qui eux étaient bien plus "réels" pour leurs acteurs. Notre monde actuel offre une impression d'irréalité pour ses acteurs, qui leur font croire notamment, à tort ou à raison, à toutes les thèses complotistes, et qui explique l'apparition de bien des maladies mentales. Le "salut" aujourd'hui pour la plupart de nos contemporains, c'est déjà de ne pas être un malade mental ; et pour beaucoup le chemin est long et difficile, parsemé d'embûches et d'épines, alors que l'adhésion allait de soi au temps des polythéismes puis des monothéismes.

L'adhésion allait davantage de soi et le sentiment de rejet et d'exclusion ne causait pas alors tant de maladies mentales comme aujourd'hui, certes il y avait des bannis, des exilés, on a même condamné Socrate à mort, car les Grecs dans leur grande sagesse avaient senti le caractère subversif de ses propos sur la jeunesse, voire même leur caractère fatal pour la postérité (Socrate tout comme Nietzsche était un inactuel, un intempestif). 

Le monde était habité, il ne l'est plus, il est désormais stérile et vide bien que rempli de biens et de marchandises, il a perdu son âme. Les hommes y perdent très rapidement la leur, ils se perdent dans la jouissance qu'on leur impose, voire davantage pour les plus radicaux dans la drogue et dans l'alcool. Le monde étant devenu un vaste parc d'attraction où toutes les ressources sont exploitées, rapportant un maximum de richesses, on pourrait croire que les hommes sont revenus au jardin d'Eden, or il n'en est rien ; au sens religieux ils sont plus damnés que sauvés de leur vivant même. Je ne pense pas que Heidegger commette une erreur de raisonnement lorsqu'il affirme que l'arraisonnement du monde, sur le mode de la provocation et non plus du dévoilement, en est la cause, et cela s'origine au Socrate tel que rapporté par Platon. C'est bien pour cela qu'il voulait inciter à revenir à une sagesse présocratique et qu'il affirmait que seul un ou des dieu(x) pourrai(en)t nous sauver.

"Un brin de tyrannie, capitaliser sur les morts."

Rien que dans l'entre-deux-tours de l'élection, Macron a pris en otage la communauté juive en se rendant au mémorial de la Shoah, il s'agissait de jouer sur l'implicite en amalgamant MLP aux "heures les plus sombres de notre Histoire" et à la "Bête immonde au ventre toujours fécond", et ça a plutôt bien marché. Depuis les amalgames ne cessent de pleuvoir sur ses opposants, 76 ans se sont écoulés depuis 1945, et c'est toujours pour la meute macroniste comme si nous étions toujours en 1933 lorsque rien n'a été fait pour empêcher Hitler d'accéder au pouvoir. Je pense qu'il s'agit aujourd’hui de la mauvaise foi la plus totale et même d'une instrumentalisation crapuleuse, alors qu'en fait ils versent des larmes de crocodile sans ressentir la moindre émotion pour les victimes. Or le contexte a totalement changé, radicalement changé, nous ne sommes plus dans les années 30, les macronistes sont totalement anachroniques, mais leur propagande fonctionne sur les esprits faibles et formatés.

Le danger aujourd'hui c’est le néolibéralisme sans décence commune et dans toute sa démesure (hybris), ainsi que la mondialisation. Avec le « nouveau monde » et la France start up nation, Macron porte pleinement ce nouveau projet ; c'est donc lui le type dangereux qu'il faut combattre. C'est lui le "fasciste" d'un type nouveau. Si rien n’est fait pour l’arrêter à temps, nos enfants en paieront le prix, et nous nous en mordrons les doigts lorsqu’ils nous lanceront ce reproche : « pourquoi n’avez-vous rien fait quand il en était encore temps ? »

Macron est un orgueilleux, or l’homme à la différence des autres animaux n'est pas souverain dans la nature, c'est un néotène, un animal inachevé. Dans son grand orgueil il s'est cru souverain avec la déclaration des droits de l'homme qu'il a jeté comme ça à la face du monde avec un souverain mépris en pensant qu'il s'agissait d'un fabuleux progrès, je crois qu'une telle manifestation d'orgueil est assez inédite dans l'Histoire des sociétés humaines. J'ai bien peur que cette manifestation ne nous retombe dessus, non par châtiment divin car je ne suis nullement superstitueux, mais parce qu'elle n'est pas conforme à notre nature d'être hétéronomique, donc créateur de dieux et de civilisations, à la différence des animaux qui eux sont autonomes. La grande erreur d'interprétation remonte certainement à Kant, avec son idée d'autonomie morale, comme si chaque homme pouvait faire comme s’il était le législateur des propres lois qui le gouvernent ; alors qu'en réalité il a besoin d'un père pour le guider, au moins durant son enfance. 

Cet orgueil a des conséquences : il conduit en réalité aujourd'hui les pères à ne plus s'occuper de leurs enfants ; l'idée d'autonomie va même jusqu'à toucher le monde de l'enfance dans la conception moderne que nous avons de la pédagogie.

Bref pour le dire plus brièvement, de Gaulle était le père de la nation et tout tournait bien, les soixante-huitards l'ont "tué". Ils ont tué le père, c'est très œdipien, et aujourd'hui notre chef d'État a épousé sa mère.

dimanche 8 août 2021

Petit message à mes contemporains macronistes, optimistes quant à l'état du monde actuel

 


Vous êtes scientistes ? Vous pensez que la science peut donner un sens à la vie ou qu'elle est complètement neutre, et qu'il faut rechercher un sens à la vie ailleurs ? En tout cas la science ne permet pas de remonter aux causes premières des choses qui seraient susceptibles de donner du sens. Or les religions étaient là pour donner du sens, et on ne leur a rien substitué de valable. On peut comprendre les musulmans qui essaient de vivre leur foi, comme un acte de résilience, pour résister à une société néolibérale destructrice (dont le principe est l'innovation sur le modèle de la destruction créatrice mis en évidence par Schumpeter). Tous les gens que je connais dans mon milieu n'ont plus qu'une seule ambition : se protéger du monde, se protéger des autres, protéger leurs enfants. Vous pensez que le monde va tenir encore combien de temps à ce rythme-là ?

Je vous trouve bien optimistes et positivistes, adeptes de Comte, et je trouve ça suspect. Je ne vois pas trop quel intérêt pour pourrez tirer de vos convictions, en tout cas soyez sûr que vos enfants et vos petits-enfants vivront dans un monde invivable ou ne vivront pas parce qu'il n'y aura plus de monde, sans aucune discrimination de couleur de peau, de sexe ou de religion.

Vous êtes plutôt climato-sceptiques ? Vous pensez que la science pourra tout régler, et que globalement les gens parlent sans savoir parce qu'ils n'ont pas les connaissances scientifiques adéquates ? Moi j'appelle ça du positivisme et du scientisme.

Il ne s'agit même pas de tuer les hommes, car ils vont s'autodétruire eux-mêmes sans que l'on ait besoin de les aider ; vous pensez que c'est une bonne nouvelle pour moi ? Non car je pense à mes enfants et j'aurais aimé leur offrir un monde plus sain, je suis extrêmement triste pour eux. Les sciences ne nous sauveront pas, Schopenhauer le savait déjà il y a deux siècles. Heidegger affirme que seul un dieu pourrait nous sauver, et il n'a pas tout à fait tort.

C'est vrai que l'on peut haïr les hommes quand on voit ce qu'ils ont fait du monde alors qu'ils avaient toutes les cartes en main pour en faire autre chose. Tout s'est joué au XVIIIème siècle qui était riche de potentialités et de promesses. Désormais les dés sont jetés, et il ne reste plus qu'à dire comme Nietzsche, « oui au monde tel qu'il est » si l'on veut y survivre.

Le bon temps, c'était Diderot, Rousseau, le XVIIIème siècle... quand le monde était encore riche de promesses et de potentialités fécondes. Pourquoi a-t-on choisi les voies les plus stériles et mortifères ? Je n'en sais rien ! J'ai juste une petite intuition : l'homme étant un néotène, un animal inachevé, il aurait dû essayer d'aménager ses religions et ses traditions dans un sens plus humaniste, sans les détruire ; malheureusement il a choisi la radicalité et de dynamiter tout ce qui le rendait humain. La radicalité, c'est la disparition de l'homme dans la société, l'incitant à avoir une trop haute estime de lui-même en raison de son amour-propre que tout encourage à se développer (l'école, le regard des femmes, la société mondaine, les honneurs officiels etc.). La radicalité n'a rien à voir avec Heidegger.

L’exclusivité des sciences et des droits de l’homme sont une impasse mortifère. La trop haute estime que l’homme a de lui-même qui est le fruit de son amour propre en société, se pensant totalement autonome vis-à-vis des forces de la nature et spirituelles, est dangereuse. Il y a une certaine nécessité pour les hommes de donner un sens à leur vie que la science ne remplit pas. Le scientisme est une attitude qui consiste à penser, quasiment une croyance selon moi, que la science peut donner un sens à la vie ; or la science n'est pas une croyance. Le scientisme rend l'homme handicapé du point de vue de son "âme", car il ne répond pas aux aspirations profondes de l'homme puisque les sciences sont privées de tout sens spirituel. La connaissance en elle-même est un chemin qui ne mène nulle part, elle est stérile du point de vue de ce qui nourrit l'"âme" (un terme métaphysique que les scientiste ont contribué à totalement détruire, car reposant davantage sur la foi que la raison). Il faudrait rétablir les droits de dieu, c'est-à-dire du père, pour que les droits de l'homme retrouvent un sens ; en l'état actuel des choses ils sont devenus absurdes et contribuent à alimenter la guerre de tous contre tous.

Je pense que l'homme est globalement bon comme l'affirme Rousseau. Et si vous pensez que je pense en même temps que l'homme est mauvais et que la nature est bienveillante, pour faire de moi un romantique, sachez que vous faites une erreur de raisonnement puisqu'alors l'homme ne peut pas être mauvais car il en est le fruit.

Vous cherchez à tout prix à me coller une étiquette de romantique pour faire de moi un nazi, mais je pense avant tout que ce qui rend l'homme mauvais c'est la destruction de son âme par la société, par le moyen de l'amour propre (droits de l'homme). Oui je pense que la nature est globalement bienveillante et que l’on devrait la célébrer plutôt que de l’exploiter et de la violer, nous nous comportons en enfants ingrats qui ne paient pas leurs dettes à leur créatrice. Notre comportement d'enfants gâtés, orgueilleux et égoïste, est d’ailleurs assez inédit dans l’Histoire des sociétés humaines.

L'amour propre (vanité, orgueil) est une création de la société et n’est pas fécond en l'homme à l'état de nature ; par conséquent si ce qui rend l'homme mauvais est l’amour propre, il lui faudrait une société qui en préserve son âme à l'abri. C’était tout le sens de la philosophie de Rousseau qui pensait trouver la société parfaite chez les Spartiates. C'est pour cela aussi que Rousseau est un philosphe tant haï, surtout de nos jours, alors que les autres philosophes des Lumières sont tous globalement célébrés.

Enfin je ne sais pas si vous êtes de la communauté juive, et cela ne me regarde pas. Ma première femme l'est et ma fille que j'ai eue avec elle l'est, donc forcément je le suis un peu. En tout cas si c'est le cas, je n'apprécierais pas que ma communauté soit prise en otage par le pouvoir macroniste pour faire passer ses lois liberticides, notamment sur le pass sanitaire. À votre place je me rebellerais, je n'accepterais pas que mes morts soit mis au service d'un pouvoir néolibéral, capitaliste et extrêmement violent vis-à-vis des précaires et des plus fragiles. Bref vous devez savoir ce que je pense du monde néolibéral et de la mondialisation : un monde où les rapports humains reposent sur la perversion et le sadisme.

C'est d'actualité, et la communauté juive est prise en otage par le pouvoir macroniste depuis son élection, et c'est très grave. Car cette communauté se retrouve de facto associée à ce que le capitalisme produit de pire. Si j'étais juif je chercherais à tout prix à me désolidariser d'une telle instrumentalisation crapuleuse.

samedi 7 août 2021

Sade, précurseur des capitalistes ?


Justice, loi, loi juste, dans la bouche de Sade ça sonne complètement faux. Sade a plutôt l'habitude d'inverser totalement les termes de la loi morale. Il instaure dans ses bouquins des rituels pervers constitués d'ingestion d'excréments, de sévices sexuels, de tortures physiques, très dogmatiquement réglementés ; des lois très rigoureuses auxquelles les victimes choisies généralement au sein d'un petit éventail de jeunes gens innocents, doivent se soumettre catégoriquement sous peine de châtiment pouvant aller jusqu’à la mort (il a un peu anticipé l’impératif catégorique d’obéissance de Kant, ce qui a fait dire à Onfray que Sade était le chaînon manquant entre Kant et le nazisme), et dont les principes sont l'immoralisme et l'injustice absolus, pour le plaisir d'une petite caste d'aristocrates jouisseurs et voyeurs. Sade très jeune était convaincu de sa supériorité en tant qu’aristocrate, et qu’il pouvait abuser de ceux qui n’avaient pas les mêmes droits.

Chez Sade il me semble que le faible qui n'a rien d'autre que son innocence doit se soumettre à celui qui a tout ; le puissant pervers, et que cela constitue la voie de la nature. L’injustice est le principe de la loi sadienne parce qu’elle est conforme à l’ordre du monde tel que Sade le conçoit. Je pense que Sade méprisait profondément tout idéal de justice, cela devait lui paraître totalement niais et contre-nature comme la religion. Du point de vue de sa vision du monde considéré comme destructeur par essence, il a tiré un immoralisme existentiel qu’il pensait conforme aux lois de sa conception de la nature. Et je crois qu’il faut prendre tout ce qu’il dit au premier degré, et non pas comme du second degré provocateur.

Alors que les philosophes de son siècle évoquaient les effets bénéfiques de la providence, il en décrit avec une certaine complaisance les effets délétères (il décrit une anti-providence) : des gens qui perdent leur âme, l’innocence systématiquement bafouée, l’impossibilité d’arriver à une quelconque forme de salut ; et de ce spectacle, il tire une forme de jouissance.

Sade était tout sauf un naïf, le reproche que l'on peut faire aux autres philosophes du XVIIIème siècle. Il y a bien des similitudes entre la conception du monde de Sade et celle des capitalistes : ces derniers ont une vision très pessimiste de la nature humaine et pensent qu'ils peuvent bafouer l'innocence et détruire le monde.



Nietzsche, précurseur du nazisme ?



Les Juifs ont surtout gardé la mémoire de toute la culture européenne que les autres ont oublié aveuglés par leur nationalisme, et ils ont fait le lien entre tous les pays d'Europe. Ils ont apporté un message d'universalisme dans une Europe déchirée par les nationalismes à partir du début du XIXème jusqu'à 1945. La Shoah constitue d'autant plus une catastrophe qu'elle a contribué à anéantir cette mémoire que nous ne retrouvons pas. Et nous nous enfonçons chaque jour un peu plus dans un matérialisme techniciste délétère privé de tout élan culturel, selon moi.

C’est Nietzsche qui disait qu'en raison de leur expérience singulière, les Juifs seraient amenés à devenir les guides et les maîtres de l'Europe. Nietzsche détestait la dérive antisémite des Allemands. Les nazis ont fait du Nietzsche pour grands débutants, ils ont globalement mésinterprété son œuvre et n’ont retenu que la volonté de puissance pour eux-mêmes. Il faut dire que Nietzsche est assez insaisissable et peut faire l'objet d'interprétations contradictoires.

Nietzsche n'a cessé de se livrer à des interprétations, quelquefois contradictoires, et voulait que ses lecteurs soient à leur tour les interprètes de son œuvre et non des lecteurs passifs. Ce sont des lecteurs avec des préjugés antisémites qui ont interprété son œuvre dans le sens du national-socialisme allemand, alors qu'il exécrait les antisémites allemands. Erreur fatale d'interprétation.

Nietzsche reprend le postulat de Schopenhauer comme quoi la vie est absurde, parce qu'on ne peut remonter aux causes premières permettant de lui donner un sens. Même la science nous dit Schopenhauer sera toujours incapable de le faire, c'est pour cela que les scientistes sont si naïfs aux yeux du philosophe. Schopenhauer recommandait la compassion pour tout ce qui est vivant à la manière des bouddhistes, et il avait bien raison. Je pense que globalement Nietzsche s'est livré à un jeu bien trop dangereux et potentiellement destructeur. C'est d'ailleurs Nietzsche qui a dit qu'il fallait vivre dangereusement.

Nietzsche disait de lui-même qu'il était de la dynamite. On a vu effectivement quelques dizaines d'années plus tard le résultat. C'est pour cela que je préfère la compassion recommandée par Schopenhauer, même si sa lecture est moins stimulante et explosive. Il faut dire que la sœur de Nietzsche qui était antisémite a pas mal déformé son œuvre pour la rendre accessible aux Allemands (globalement trop grossiers selon Nietzsche pour le comprendre). Nietzsche ne s'adressait pas à ses contemporains mais à la postérité (il se disait inactuel, intempestif), encore moins aux Allemands, il n'était pas nationaliste, il s'adressait à l'Europe entière, son œuvre avait vocation à l'universalisme.


vendredi 6 août 2021

Le peuple luthérien et les Gaulois réfractaires au changement

 


Je pense que l'on est en droit de critiquer la politique d'Israël en Palestine sans être automatiquement soupçonné d’antisionisme. Quant au droit des Juifs à s’installer en terres ancestralement arabes, certes les victimes de la Shoah pèse dans la balance ainsi qu’une ancestralité encore bien plus ancienne que celle des Palestiniens, mais ce choix de lieu est discutable selon moi. C’est un peu comme si les Bretons allaient revendiquer 1500 ans après, leur retour dans leurs terres ancestrales de Grande-Bretagne. Et ce sont les Arabes qui en font les frais alors qu’ils n’ont rien eu à voir dans cette histoire occidentalo-occidentale que constitue la Shoah. Il aurait fallu faire payer les responsables, à ce que je sais les Allemands, plus globalement presque tous les Européens, afin qu’ils trouvent une terre pour leurs victimes ; par exemple en Europe même. Sinon il s’agit encore et toujours d’une forme de colonialisme de l’Occident en terres arabes, qui peut expliquer la résurgence d'une forme d'islamisme virulent sous la forme du terrorisme en terres européennes.

Je ne suis absolument pas islamo-gauchiste et tiens pour un effet délétère du capitalisme la mise sous esclavage déracinée et déculturée des masses indifférenciées, sous les traits séduisants d'united colors of Benetton.

Les Palestiniens sont un peu comme les Amérindiens, ils n'avaient pas d'acte de propriété en bonne et due forme alors on leur dénie le droit d'habiter leur terre ancestrale parce qu'ils ne sont pas aussi avancés en droit que le peuple de la Loi. Pourtant on peut habiter une terre autrement que par un texte sacré qui le stipule et qui remonte à bien plus de 2500 ans. On peut même habiter une terre juste par les cinq sens et la contemplation voire la célébration de la nature et des paysages, sans crayon et sans papier, sans technique pour la massacrer et l'exploiter, juste avec la parole donnée. Les Amérindiens sont-ils moins humains que ceux qui les ont exterminés parce qu'ils n'avaient pas de titres de propriété écrits, pas de frontières juridiques à leur nation, parce que du point de vue du droit qui repose sur l'écrit leur parole ne valait rien, parce qu'ils avaient juste leur parole à donner alors que les langues fourchues ne la respectaient jamais ?

À ce propos, le chanteur Renaud avait soutenu devant l'humoriste Timsit, chez Ardisson, que le génocide des Amérindiens lui paraissait pire que la Shoah ; ce qui lui avait valu une forme de désapprobation générale. C'est ce qu'on appelle la concurrence victimaire. Mais c'est vrai que les Amérindiens ne peuvent plus réclamer de droits en compensation, comme une terre pour s'établir : ils ont quasiment tous disparu.

Je constate juste qu'en Amérique centrale et du sud, les populations d'origine espagnole et portugaise se sont métissées, les Indiens ont survécu. Je connais beaucoup de Brésiliens qui ont du sang indien et ont conservé une mémoire de leurs origines indiennes (j'ai bien aimé le film La forêt d'émeraude de John Boorman, qui traite de cette question). Je constate que les seuls à ne pas vouloir se mélanger aux autres sont les Anglo-Saxons luthériens en Amérique du Nord, ils ont bien commis le génocide des Amérindiens avec certainement le concours de colons européens aux origines multiples mais minoritaires. Il y a de beaux films qui racontent cette histoire, je pense à un parmi d'autres : Danse avec les loups de Kevin Costner, et beaucoup de films des années 70. Les généraux de l'armée US au XIXème siècle avaient coutume de dire qu'"un bon Indien était un Indien mort". Les Anglo-saxons sont d'ailleurs les descendants de tribus germaniques qui ont colonisé la Bretagne antique (l'actuelle Grande-Bretagne), vous savez les mêmes que ceux se disant de race aryenne, de sang germanique, qui ont planifié la solution finale.

Je suis allé aux États-Unis, et j'ai vu quelques Indiens dans des caravanes au sein de réserves, ils ne respiraient pas la joie de vivre et l'opulence, mais plutôt la misère la plus crasse. Les Aborigènes ont aussi été exterminés en Australie, majoritairement par des colons anglais.

Même si les génocides des Indiens d'Amérique du Nord et des Aborigènes d'Australie n'ont pas été planifiés, ils ont eu lieu, sous l'impulsion de colons qui souhaitaient certainement conserver leur identité anglo-saxonne, leur pureté d'origine germanique. J'y vois une analogie avec le peuple juif en Israël vis-à-vis des Arabes. D'ailleurs le grand antagonisme a eu lieu entre Allemands (Germains) et Juifs, sur la question de la pureté originelle et de la notion d'élection. Je crois qu'Hitler disait qu'il ne pouvait pas y avoir deux peuples élus.

Même en France, les aristocrates pour se différencier du peuple revendiquaient leurs origines franques, c'est-à-dire germaniques par opposition aux origines supposées gauloises du peuple incluant la bourgeoisie. Ce qui leur a joué des tours puisque lors de la Révolution, c'est au nom de cette différence de nature affichée par les aristocrates pour faire valoir leurs droits à la souveraineté absolutiste, que la bourgeoisie instrumentalisant le peuple a trouvé un principe inégalitaire pouvant justifier leur décapitation.

Il faut croire qu'il y a des peuples qui se croient une vocation à la domination, contre tout principe égalitaire. Vous vous souvenez de De Gaulle disant : "ce peuple sûr de lui et dominateur" ? Après pourquoi certains peuples se croient-ils "élus" et aptes à dominer tous les autres peuples ? Je n'en sais rien ; pour les Germains (dont les Anglo-Saxons font partie) j'attribuerais ça au luthérianisme et à la notion d'élection qui s'en dégage.