samedi 29 janvier 2022

Que penser des manifestations anti-pass ?

 

Mein Kampf n'était pas un écrit artistique, incisif, scandaleux et choquant comme ont pu l'être certains écrits subversifs, transgressifs, comme ceux de Sade, Artaud, Genet, Pasolini ou encore Céline, qui ont pu être censurés, interdits, parce qu'ils n'entraient pas dans la norme. Mais un écrit normatif, lu par des millions de gens, qui était pourtant directement un appel au meurtre. Comment des millions de gens ont pu se laisser duper et adhérer ? C'est cela qui constitue un grand motif d'étonnement, un énorme scandale qui a fait quand même plus de 80 millions de morts à travers le monde - dont on a mesuré malheureusement l'énormité, seulement dans le temps de l'après-coup. Aujourd'hui on constate que des millions de gens se laissent duper par cette histoire de vaccins qui n'en sont pas puisqu'il s'agit d'ARN messager, parce que ça leur semble être la norme. Et quand c'est la norme personne n'est choqué, scandalisé, cela n'a pas vocation cathartique comme dans l'art qui se situe hors de la norme ; et l'on serait prêt à tuer pour rester dans la norme, pour ne pas être exclu du troupeau, quitte à désigner des bouc-émissaires ! C'est pour cela que certains ont raison de souligner ce danger insidieux qui s'insinue d'abord chez les esprits les plus conformistes (la banalité du mal) puis par contagion chez à peu près tout le monde. Et après on leur reproche d'être antisémites ? Alors que justement ils cherchent à devancer l'après-coup, avant que le désastre ait eu lieu. Cherchez l'erreur !

Je vous parle d'esprit boomer, d'esprit soi-disant subversif, se voulant transgressif, et qui est devenu la norme. En réalité nous sommes tous devenus des boomers subversifs et transgressifs, toutes générations confondues, mais dans nos actes de consommation seulement. Celui qui a un look de motard par exemple, qui s'achète une grosse moto Harley-Davidson, il se croit rebelle, subversif ; il a l'état d'esprit boomer, "il est interdit d'interdire" ou encore "jouir sans entraves". Les slogans de mai 68 qui se voulaient subversifs sont en réalité devenus des slogans publicitaires normatifs = perversion de l'idéal révolutionnaire et libertaire des jeunes boomers en néolibéralisme pur et dur, quand ils sont devenus mûrs et que le profit est devenu pour eux plus important que les idéaux de jeunesse. C'est pour cela aussi, parce que la norme instrumentalise désormais la transgression à des fins mercantiles, qu'aujourd'hui les vrais subversifs comme pouvaient l'être Sade en son temps, Céline, Artaud, Genet ou encore Pasolini, bref les artistes dits rebelles, sont devenus absolument inaudibles.

Or ce n'est pas un hasard si la tranche d'âge où l'on trouve le plus de partisans du pass vaccinal, est encore la génération des baby-boomers, n'hésitant pas à dire leur haine des non-vaccinés : "qu'ils crèvent !" Et ils accusent les anti-pass de conspirationnisme, voire dans le cas de certains, qui font la comparaison entre le sort réservé aux non-vaccinés et le statut des Juifs sous l'Occupation, d'antisémitisme...

Non que je sois personnellement obsédé par cette question du pass-vaccinal, mais pour montrer que désormais la transgression est devenue inaudible, hors le champ du consumérisme, et que les subversifs sont désormais les conspirationnistes, ceux que l’on veut écarter du troupeau par la force, ou qui s’en écartent d’eux-mêmes.

mercredi 26 janvier 2022

Les psys sont-ils les curés du monde contemporain ?

 


Le problème avec les psys est qu'ils se croient les curés des temps modernes et effectivement ils le sont. Nietzsche de droite ? D'abord il s'adresse avant tout à une élite du futur dont la principale caractéristique serait d'être une élite d'artistes en rupture totale avec le christianisme. Pas sûr que Nietzsche se soit posé la question de cette élite en ces termes de droite et de gauche. C'est plus compliqué que ça je pense. Nietzsche avait surtout le projet d'asseoir les fondations d'une société d'artistes créateurs seuls capables de supporter l'air raréfié des cimes, une élite du futur capable de créer de nouveaux dieux en rupture totale avec le christianisme, dont il aurait été le maître à penser avec un décalage dans le temps puisqu'il se pensait intempestif et inactuel pour son époque - selon lui incapable de le comprendre.

Sauf que selon Heidegger il n'achève pas la métaphysique de la subjectivité initiée par Descartes, au sens de la destruction ou de la déconstruction, mais en constitue l'achèvement au sens de l'accomplissement. En remontant encore plus loin, non seulement il ne renverserait pas le platonisme mais en réalité il adopterait exactement la même démarche que Platon, sauf qu'au lieu de subjuguer la vérité au bien, il subjuguerait la vérité à des valeurs certes aristocratiques mais avant tout par-delà bien et mal. Nietzsche se veut immoraliste, mais Platon n'était-il pas lui-même un aristocrate ?

Ainsi donc Nietzsche contrairement à ce qu'il croit (le philosophe au marteau), ne renverserait-il pas toute la métaphysique occidentale depuis Platon mais en réalité l'achèverait au sens de l'accomplirait. Or c'est bien toute cette métaphysique occidentale remontant à Platon que Heidegger se propose de déconstruire par le biais du dasein, en bon disciple de Husserl et de la phénoménologie ; chez Heidegger une autre façon d'achever la métaphysique occidentale, au sens de liquider, c'est-à-dire aussi de rompre, est de remonter aux présocratiques. S'il y a bien une philosophie dont la French Theory est l'héritière - French Theory qui nous revient comme un boomerang des campus américains par le biais du wokisme ; c'est bien davantage encore celle de Heidegger - qui déconstruit le sujet souverain (masculin et blanc) sur lequel se fonde la vérité par le biais de la certitude - que celle de Nietzsche.

Oui, nous vivons dans un monde absolument horrible qui ne donne plus sa chance qu’à ceux qui n’en ont pas besoin : les forts. Mais c'est davantage dû selon moi au néolibéralisme qu'à la philosophie de Nietzsche qui certes contrairement à celle de Schopenhauer, prône le rejet de la compassion et de la pitié, sans doute parce que Nietzsche y voyait la présence du christianisme, c'est-à-dire une façon pour la caste des prêtres d'avoir « une emprise sur les personnes. « Périssent les faibles et les ratés, on va même les y aider ! » À travers cette formule très provocatrice, c'est avant tout d'après moi cette emprise que combat Nietzsche plus que la compassion elle-même ; effectivement souvent Nietzsche prend le parti des criminels ou des victimes (souvent ce sont les mêmes) contre les juges... Autrement dit, Nietzsche combat l'emprise des faibles (les prêtres) sur les forts - qui pourraient être pour Nietzsche les artistes, à condition qu'ils soient libérés de cette emprise qui peut notamment faire d'eux des criminels ou des victimes ; ce qui fait toute la matière de sa philosophie, et ce qui ne l'a pas empêché de devenir fou, selon la légende au spectacle d'un cocher martyrisant un pauvre cheval récalcitrant à Turin. Sans doute un retour violent et fatal du refoulé compassionnel.

Or qui sont les prêtres aujourd’hui ? Ce sont les psys.

Les curés je ne connais pas très bien, mes parents ont dogmatiquement refusé que je me fasse baptiser, mais je crois que comme pour les psys il y avait une grande diversité des écoles ; qu'ils pouvaient être jésuites, dominicains, salésiens, franciscains... Les moines pouvaient être cisterciens, trappistes... Il y avait aussi mille et une façons pour les chrétiens de soigner les maux de l'âme. C'est le libéralisme qui le premier s'est montré franchement sceptique sur la capacité de soigner les maux de l'âme par la vertu. À la suite des libéraux (Mandeville, Smith...), les psys se sont engouffrés dans la brèche pour devenir les "curés", les régulateurs, de nos sociétés néolibérales où le vice privé fait la vertu publique. Notre mal vient évidemment de beaucoup plus loin que la seule génération des baby-boomers, mais disons qu'au lieu d'atténuer le mal, elle l'a exacerbé.

La vertu est une notion totalement obsolète dégradée par les libéraux, avec Mandeville en précurseur psy avant l'heure. Plus généralement la discipline psy est axiologiquement neutre tout comme la société libérale, elle ne se pose pas la question des valeurs en termes de bien ou de mal, elle ne se pose peut-être même plus la question des valeurs mais tout en termes de pragmatisme, de rendement et d'efficacité ; Kant est le dernier maître de la morale à part entière, après lui viennent les philosophes du soupçon et les psys. Les psys avec Freud s'inspirant de Schopenhauer et de Nietzsche voire avant eux de Mandeville, ont accompli une révolution copernicienne : c'est n'est plus le sujet pensant cartésien souverain (le cogito ergo sum) qui décide en nous, mais pour la plus grande part notre inconscient, la part immergée de l'iceberg, ou encore la volonté de Schopenhauer, cela remettant en cause le libre-arbitre et constituant pour l'orgueil humain une profonde blessure narcissique. Je crois que le rôle des psys est avant tout de remettre les gens sur les rails des relations humaines constructives, sereines, apaisées, dans le bon sens aussi. Parce qu'il y en a qui ont dû dérailler sur un aiguillage (les mauvais choix), d'autres ayant déraillé dont les roues continuent à tourner à plein régime (ce qui entraîne une surchauffe psychique entièrement stérile), d'autres allant dans le mauvais sens, etc. Le rôle des psys n'est pas de juger la société dans laquelle ils vivent mais de pousser leurs patients à s'y adapter : le fameux principe de réalité !

Commentaire envoyé (et publié dans son blog) à Florence de Mèredieu spécialiste d’Antonin Artaud.

« On vous censure peut-être parce que l'on vous reproche votre « violence » verbale ou à tout le moins votre franchise dans un monde hypocrite et profondément pervers ; c’est une hypothèse : vous êtes tabou en raison de votre absence d'auto-censure dans un monde consensuel et de l’entre-soi sous la coupe des baby-boomers - dont vous faites d’ailleurs partie ; fait inédit dans toute l’histoire occidentale, cette génération a omis de transmettre le monde tel qu’elle l’avait reçu (mais c’est encore plus compliqué que ça car les boomers sont avant tout des enfants du chaos et de la destruction). Traître à votre classe, car les boomers sont une classe sociale à eux seuls, une caste dirigeante dont ils ont exclu leurs propres enfants réduits à la déculturation et au consumérisme, c’est-à-dire la servitude volontaire. Je crois que vous vous exprimez avec une grande douceur et sensibilité pour masquer le feu qui bouillonne en vous, mais précisément on vous a démasquée ; vous n’arrivez pas à le cacher : vous « êtes » une violente.

LA RESPONSABILITÉ ÉCRASANTE DES BABY-BOOMER DANS L'ORIGINE DE LA CRISE ACTUELLE.

Il faut avoir selon moi un minimum de sentiment de culpabilité sans tomber dans les excès du christianisme qui in fine servent les intérêts, la volonté de puissance, des prêtres, en rabaissant les ouailles dans la servitude volontaire. Il faut avoir un minimum de sentiment de culpabilité et de sens du sacrifice pour pouvoir s'inscrire dans une filiation et pouvoir transmettre aux générations qui suivent le monde tel qu'on l'a reçu. Or les boomers l'ont considérablement dégradé le monde qu'ils avaient reçu en héritage. Mais cela s'explique peut-être par leur petite enfance et leur sentiment de dénuement (peu de jouets au pied du sapin à Noël quand il y en avait un, sniff-sniff, ouin-ouin !!!) quand leurs parents n'avaient rien et avaient tout à reconstruire, ils sont fondamentalement des enfants issus du chaos et du néant ; des destructions, des ruines, dues à la seconde guerre mondiale. Berlin année 0 ! En raison de ce dénuement originel, globalement les baby-boomers accumulent des richesses, dépensent beaucoup aussi, prennent l'avion pour aller à l'autre bout du monde, donc polluent beaucoup, mais ils se soucient de l'avenir de leurs enfants comme de leur première chemise, et ils ne redistribuent strictement rien, après eux le déluge !

La violence verbale, la provocation par le verbe, provoquent éventuellement le scandale et l'indignation, on a le droit d'être choqué, surtout chez ceux qui préfèrent regarder le doigt plutôt que ce qu'il montre – c’est ce que provoque la plupart des écrits d’Artaud. Mais cela n'a rien à voir avec la violence physique, l'interprétation par des violents d'écrits scandaleux ne regarde que les violents. Les appels à la violence physiques sont des écrits violents, souvent normatifs, étant des appels au meurtre, mais à ne pas confondre avec les écrits subversifs, scandaleux, choquants, cependant fondamentalement non-violents, puisque l’émotion contagieuse y passe par l'écrit plutôt que par la brutalité physique. Même Céline est fondamentalement non-violent, et il s'en explique souvent dans ses textes, idem pour Pasolini, idem pour Houellebecq et ses punchlines agressives et foncièrement drôles, idem même pour Zemmour selon moi - bien qu'il soit à la fois essayiste de talent et politique, c'est là où ça se corse ; Mein Kampf c'est une autre histoire, c'est un appel au meurtre. Bref l'écrit, dans le cas de la transgression, peut être une catharsis souvent mal interprétée par ceux n'ayant que les moyens d'opérer cette catharsis par la violence physique. La violence est certainement la plus contagieuse des émotions, bien plus que la catharsis non-violente qui s'opère par le biais d'un écrit subversif chez l'auteur et ses lecteurs. D'où l'erreur d'interprétation commise par les nazis des écrits de Nietzsche mais aussi de ceux de Hegel et de Kant - la banalité du mal propre à un Adolf Eichmann qui pour sa défense disait qu'en bon kantien il se contentait d'obéir aux ordres. D'où l'erreur des communistes soviétiques concernant les écrits de Marx. Enfin l'erreur de Robespierre et de ses sbires à l'origine de la Terreur, concernant les écrits de Rousseau. »

Faut-il voter pour Zemmour ? Ce dernier ne fait-il pas preuve d'une démarche volontariste et optimiste quant à la capacité des Occidentaux français d'origine européenne de se ressaisir ?

Zemmour a entièrement raison de parler du suicide français, mais si les Français veulent réellement se suicider collectivement - et dans son livre il pensait plus particulièrement à la génération qui a fait mai 68, c'est-à-dire les baby-boomers - que peut-il y faire ? Que peut-il y changer ? Les parents ont tout donné à leurs enfants baby-boomers, au point de se sacrifier pour eux, pour qu'ils réussissent. Qu'ont fait les baby-boomers du sacrifice de leurs parents ? Ils ont ironisé dessus, ramassé leur pognon, rejeté leurs valeurs, et décidé qu'il n'y avait plus rien à transmettre aux générations qui venaient après, que de toute façon en se fiant aux leçons de l'Histoire, elles n'en valaient pas la peine. C'est ce que Zemmour appelle à juste titre la haine de soi, certains comme mon cousin germain, sont passé à l'acte, se sont réellement suicidés très jeunes, en raison de la haine que leurs parents leur vouaient sans se l'avouer bien sûr. La haine née du sentiment de se voir mourir, vieillir à tout le moins, à travers la jeunesse de ses propres enfants.

Globalement, vous les baby-boomers, êtes des idoles, des dieux pour vos enfants, évidemment vous avez capté tout l'héritage de 2000 ans de civilisation chrétienne et n'avez rien redistribué. Comme on dit votre melon a tellement enflé que vous ne touchez plus terre. Tout remise en question vous est ontologiquement impossible. Vous avez fait barrage à la culture, éliminé la tradition, pour que vos enfants demeurent niais et incultes et ne puissent pas vous critiquer. Et en plus, globalement, vous n'avez aucun sens de l'humour, vous vous prenez toujours autant au sérieux alors même que vous glissez lentement vers l'Éternité.

Encore une fois ne vous offusquez pas, car il s’agit d’une généralisation qui est une conceptualisation, cependant il ne s'agit pas d'une conceptualisation au sens des membres biologiques de cette génération, mais au sens de type, d'esprit baby-boomer. Beaucoup d'enfants de baby-boomers ont l'esprit baby-boomer car ils sont à l'image de leurs parents, mais en plus petits : on pense à beaucoup de journalistes ou d’intellectuels qui tentent de faire perdurer l’esprit libertaire et de dérision de leurs parents, de fait ils se retrouvent souvent à devoir manier les ciseaux de la censure pour préserver un héritage impossible contre tous les populistes, conspirationnistes et obscurantistes. Et puis il y en a qui appartenaient biologiquement à cette génération et qui n'en ont pas l'esprit : ceux-là je les admire plus que tout, ce sont d'authentiques résistants.

Le problème ce sont davantage les populations autochtones qui se font hara-kiri en ne croyant plus du tout en l'avenir, en ne faisant pas d'enfants, que les populations allogènes qui se contentent de répondre à une demande du marché du travail. Ce qui fait davantage question c'est cette pulsion de mort, cette volonté de néant, qui animent les populations vieillissantes de l'Europe occidentale. Longtemps j'ai cru que c'était une sorte de complot des patrons, une ruse du néolibéralisme pour faire du profit avec une main d'œuvre à meilleure marché, mais non, je constate de plus en plus qu'il s'agit d'une démarche délibérée, plus ou moins consciente, de suicide collectif chez les Occidentaux d'origine européenne. C'est un peu trop facile de pointer du doigt les allogènes comme des bouc-émissaires et les responsables de tous nos maux, si nous ne voulons plus vivre et aimer nos enfants ils n'y sont pour rien. 

Mais je conçois que certains, par une sorte de masochisme très répandu, puissent préférer les enfants d'allogènes exotiques plutôt que leurs propres enfants biologiques ; un symptôme profond de décadence selon moi, un réflexe de fin de race. Au nom de ce droit à l’amour pour tous, beaucoup hélas, s'interdisent d'aimer leurs propres enfants biologiques ; car ce serait "injuste" vis à vis des enfants allogènes : un genre de discrimination positive au sein des familles s'installe et pas seulement au sein de l'École, où elle est déjà, depuis assez longtemps, très répandue. Je crois malheureusement que les familles allogènes pour le dire pudiquement, alors que je pense très fort, musulmanes, n’ont pas ce genre de scrupules. Les musulmans ne s’interdisent pas d’aimer leurs propres enfants plus que ceux des autres ; les Juifs aussi ont gardé leurs traditions. Personnellement ma mère n'a pas cessé de me dévaloriser et de me mettre des bâtons dans les roues parce que précisément j'étais blanc, mâle, d'origine chrétienne ; elle a pratiqué sur moi un genre de discrimination négative, c’est du vécu !

J’entends bien le discours des psys : « Les psychanalystes sont des opérateurs symboliques : ils se disposent à être ce que le patient/client fera d'eux. Ils ne le mettent sur aucun rail et ne l'invitent pas à s'adapter à la société de leur temps. Ils s'emploient à vous laisser découvrir votre désir ; votre ressort intime. En dehors des séances, il s'agit souvent de médecins doués de sensibilité et d'empathie. Le curé croit en Dieu, l'analyste croit en vous, en votre pouvoir d'évoluer, qui que vous soyez. »

Discours spinoziste, pratiquement impossible à mettre en œuvre dans la réalité, mais ce sont de très belles paroles et de très nobles sentiments qui vous honorent. Je crois hélas plus trivialement que vous vous payez de mots. J'ai fréquenté énormément de psys, ma mère est psy, les amis de ma mère, puis en tant que patient. Je ne dirais pas que ce sont tous des escrocs, ce serait excessif, mais plus pragmatiquement ils ont tous des objectifs de rendement, d'efficacité, de retour sur investissement. Dans le cas singulier de ma mère, et de la dernière clinique psychiatrique que j'ai fréquentée, pour leur pomme d'abord. Désolé de doucher un peu votre idéalisme psy, les derniers psychiatres que j'ai fréquentés au sein de la clinique où j'ai séjourné étaient avant tout préoccupés de faire du chiffre, de leurs superbes demeures bauloises, de leurs énormes bagnoles rutilantes, et de leurs vacances de rêve. Mais je reconnais qu'ils peuvent faire beaucoup de bien tout en étant très égoïstes, ils sont eux-mêmes très adaptés à la société néolibérale et son leitmotiv énoncé par Mandeville dès 1714 : vice privée, vertu publique.

mercredi 19 janvier 2022

La communauté politique contre l'individualisme des droits de l'homme

 


Tout ce qui est alternatif et néo ne fait pas de racines, termine en eau de boudin.

Blanquer comme tous les ministres de l'Éducation nationale est avant tout l'ennemi des profs. L'effet pervers de l'École est de contribuer à bâtir une caste de CSP++ coupée du reste de la communauté. Nous vivons dans une pseudo-démocratie où il n'y a pas de communauté politique car les intérêts des uns et des autres divergent trop et entrent constamment en conflit entre eux.

Moi je te parle d'un système de solidarité dans les campagnes bretonnes qui était enraciné et qui a duré pendant des siècles voire des millénaires, et que le néolibéralisme, l'individualisme, le darwinisme social a anéanti en deux générations.

Alors me fait pas chier avec tes néos et tes alternatifs.

Toi tu parles toujours en termes de néos et d'alternatifs, bref de quasi-clandestinité. Non la révolution des mentalités si elle doit avoir lieu doit être généralisée à l'ensemble de la société : mais ça n'a strictement jamais marché en réalité, sauf dans les rêves des philosophes. C'est pour cela qu'il faut plutôt revenir en arrière (ce qu'on appelle péjorativement réaction), sur des systèmes qui ont déjà fait leurs preuves et en y apportant quelques touches d'humanité, d'humanisme et d'amélioration du bien-être général.

Le progrès c'est globalement du bidon. Les Lumières c'est globalement nous faire prendre des vessies pour des lanternes.

Rousseau a échoué, la société post révolutionnaire est bien pire que celle d'avant la Révolution, et Rousseau serait entièrement d'accord sur ce triste constat. Rousseau voulait un système égalitaire, rural et démocratique, il avait prédit que le triomphe des intérêts individuels organisés en partis et le monde de la finance, anéantiraient la démocratie, on y est.

Pour qu'une démocratie fonctionne il faudrait que chacun soit prêt à sublimer son intérêt personnel au profit la communauté politique : c'est ce qui se passait dans les campagnes bretonnes. Personne n'était laissé à la rue, les orphelins étaient systématiquement recueillis par des oncles, des tantes, des aïeux...

Tout fonctionnait en harmonie sur le principe de la solidarité, et la communauté communiait dans l'Eucharistie sans avoir besoin de se chercher des bouc-émissaires au sein du groupe social - la France forme-t-elle encore une entité politique, c'est-à-dire une communauté de destin ?

Certes l'ennemi jadis c'était d'autres communautés, comme les Anglais. L'ennemi héréditaire avait la fonction de bouc-émissaire, contre qui se soude la communauté ; on voit bien qu'un Zemmour se réfère assez souvent à un tel modèle de communauté politique.

Aujourd'hui la communauté de ceux qui votent pour Macron (de droite, de gauche), les CSP++ des grands centres urbains, les bobos de gauche progressistes fonctionnent dans l'entre soi ; tout le reste de la population, ceux qui habitent la France périphérique, sont rejetés. La communauté très minoritaire des grands centres urbains ne tend une main intéressée que vers les minorités ethniques et religieuses ayant trouvé refuge à la périphérie de ces grands centres urbains, mais attention, sans se mélanger quand même ! Car en réalité la mixité sociale entre blancs et minorités ethnico-religieuses n'existe nulle part, même pas dans une petite ville de province profonde comme Redon en Ille-et-Vilaine.

Les bouc-émissaires de la communauté des urbains surdiplômés CSP++, ce sont les habitants de la France périphérique qui votent mal, ces populistes que l'on appelle aussi des déplorables.

Je ne te parle pas des bourgeois bretons ni même des nobles, le peuple breton formait une communauté politique prenant des décisions quant à la gestion de ses affaires, de la famille. Il y a une anecdote qui dit que même un paysan breton issu de la plus basse extraction ne se courbait jamais devant le plus grand seigneur de Rohan, car il pouvait absolument légitimement lui rétorquer : "moi aussi je suis breton !" Quant aux bourgeois, ils constituent une classe qui est une perversion de la Révolution française, une classe qui s'est enrichie bien plus que la noblesse de l'exploitation de l'homme par l'homme.

Tout n'est pas à jeter dans le progrès, idéalement il aurait dû servir à améliorer le système en améliorant les conditions de vie de chacun. Or non, en réalité le progrès a tout détruit. C’est cet ancien système populaire, de décence commune, qu’il faudrait réhabiliter sur le plan politique pour toute la France, en y ajoutant modérément ici et là quelques touches de progrès afin d’améliorer les conditions de vie et le bien-être général : il n’y a pas besoin de davantage, sinon on tombe dans la démesure, l’hybris.

Avec cette histoire de pandémie de vaccinés on y est en plein, dans la démesure, et les effets pervers du progrès. Une "démocratie" qui repose sur des intérêts financiers, en l'occurrence ceux de big pharma notamment, avec à sa tête un banquier, n'est plus une démocratie.

samedi 15 janvier 2022

Que pense Macron des Deschiens ?



La méthode scientifique, le scientisme, et la croyance.

Le scientisme relève de certaines superstitions, pas la méthode scientifique. Heureusement tous les scientifiques ne sont pas scientistes, voire de moins en moins car c’est passé de mode, se contentant d’être pragmatiques à l’anglo-saxonne et le croient-ils débarrassés de tout préjugé idéologique. Je pensais surtout à la psychanalyse qui relève du scientisme mais pas du tout de la science, et dont Onfray peut-être de façon excessive et caricaturale, l’effet bulldozer qui lui est propre, a souligné la part d’ombre, la dimension gourou aussi, induites par la personnalité de Freud, plutôt autoritaire avec des sympathies avoués pour le fascisme de Mussolini (en qui il se reconnaît ?), et par sa propre idiosyncrasie dont il s’est inspiré pour en tirer des lois générales applicables à l’ensemble du genre humain – hormis les Irlandais réfractaires selon lui à sa médecine (selon moi pour des raisons de croyance ce qui est un comble pour ce qui se veut une démarche scientifique donc universelle). La psychanalyse n’est pas une méthode très rigoureuse et scientifique, relèvant davantage du culte de la personnalité et de l’adhésion inconditionnelle de ses adeptes en la personne du gourou, avec toute la part de dogmatisme et de superstitions que cela peut comporter à l’instar de toute croyance, voire culte de la personnalité – on se souvient que dans Le meilleur des mondes, le livre d’Aldous Huxley, les protagonistes invoquent indifféremment notre Ford ou notre Freud dans leurs prières.

Au fond Freud qui se voulait le pourfendeur des religions dans « L’avenir d'une illusion » notamment, n'a-t-il pas remplacé une croyance par une autre croyance, une religion révélée par un pansexualisme ?

Quant à la méthode scientifique et au développement des technosciences, les progrès des sciences se nourrissent de ceux de la technique et vice et versa, ils sont sans doute utiles (au sens de l’utilitarisme ; ce qui est selon moi péjoratif) et source de progressisme au sens idéologique (ce qui venant de moi est péjoratif), car le progrès augmente le bien-être et la quête de ce dernier par des progrès sociétaux. Mais 1) selon Heidegger « la science ne pense pas » ; 2) la technique repose sur l'arraisonnement de la nature sur le mode de la provocation avec une explosion d'effets pervers qui sont l'impensé du progrès, qui se fait selon Arendt « derrière le dos des hommes en chair et en os » : au fond les bénéfices retirés comme le bien-être ne se paient-ils pas de désavantages plus grands encore - comme la solitude ? 3) la méthode scientifique elle-même a pour fondement une métaphysique de la subjectivité, qui fait du sujet (res cogitans) le seul critère de vérité de cette méthode par le biais de la certitude – qui elle-même découle du doute dans ses fondements métaphysiques cartésiens ; au détriment des phénomènes et du monde tel qu'il est (res extensa). D’autant plus Descartes affirmant qu’une fois posés les fondements métaphysiques de la méthode scientifiques, il n’était plus utile de revenir sur eux. Il a fait l’expérience du doute systématique et radical, hyperbolique, pour en délivrer ses successeurs une bonne fois pour toute, afin de faire table rase du passé et tirer de son expérience métaphysique - presque une révélation d’ordre mystique, une intuition géniale, sur le statut de la vérité - la substantifique moelle ; à savoir la méthode scientifique moderne débarrassée de ses présupposés grecs sur le statut de la vérité.

En voulant débarrasser la méthode scientifique de toute superstition, Descartes annonce une nouvelle superstition qui animera ses successeurs positivistes, francs-maçons, scientistes, progressistes sociétaux... celle de l’absence de doute concernant les vertus du progrès scientifique, du progressisme sociétal ; bref une nouvelle forme de croyance aveugle.

C’est sur le statut de la vérité venant des Grecs anciens, occulté depuis Descartes par la méthode scientifique, que Heidegger ne cesse de revenir pour déconstruire la métaphysique de la subjectivité, et la souveraineté du sujet pensant sur le monde tel qu’il est, celui des phénomènes voire du bon sens ; pour déconstruire l'hégémonie de la res cogitans sur la res extensa à laquelle appartiennent tous les animaux réduits à la condition de machines.

Contre la certitude propre à la métaphysique de la subjectivité, le scepticisme et la suspension du jugement d’un Montaigne.

Personnellement je m'efforce de prendre exemple sur Montaigne, je m’interdis de penser de façon partisane, dans un camp contre un autre, en l’occurrence le camp du Bien contre celui de la fachosphère et du complotisme ; c’est tellement réducteur et injuste, et puis c’est une façon confortable de se donner bonne conscience à moindres frais : comme toute la gauche bobo, délivrant ses bonnes paroles moralisatrices venant des centres urbains des grandes métropoles vers la France périphérique qui pense mal, voire nécessite d'être rééduquée ; je préfère encore suspendre mon jugement en bon sceptique. Je n'ai jamais vraiment goûté l'"humour" de Canal + sur la beaufitude de la France profonde (dixit les élites) avec un programme comme les Deschiens.

Oui effectivement j’ai lu pas mal de livres de Zemmour et l’avantage est qu’il est un des seuls hommes politiques à ne pas penser comme un technocrate apte uniquement à gérer les affaires courantes et « après moi le déluge », il écrit aussi très bien contrairement à la majorité de ses pairs qui ont recours à des conseillers en communication pour rédiger leurs livres.

Concernant l’esprit partisan c’est ce qui entraîne des guerres civiles selon Montaigne, il encourage plutôt à la tolérance et au dialogue sans esprit de censure : il n’y a pas de camp du Bien pour Montaigne, et c’est même ce qui encourage selon lui l’intolérance et peut être même source d’obscurantisme et d'ostracisme, d'autant plus quand le camp du Bien se réclame du Bien avec un grand B comme de nos jours : « Quand on me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère : je m'avance vers celui qui me contredit, qui m'instruit » - tout le contraire du « je ne parle pas aux cons ça les instruit » bien plus consensuel (dans une époque de vulgarité et de méchanceté généralisées) de Michel Audiard inspiré de Céline, drôle certes mais intolérant. Que de progrès techniques incontestables depuis Montaigne, mais peu d’avancées sur le plan de l’éthique, une stagnation voire une régression. « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà », cette citation que l’on attribue à Pascal a en réalité pour origine une citation de Montaigne voulant dire exactement la même chose ; elle demeure plus que jamais d’actualité en nos temps troublés, obscurantistes, partiaux et ostracisants – souvent au nom des droits de l’homme, le plus petit dénominateur commun quand toute communauté politique digne de ce nom a été abolie.

Les Bretons sont-ils des monstres avec leur rire démoniaque ?

Ce rire de bon sens exprime plutôt un scepticisme quant aux prétentions exorbitantes du progressisme sociétal représenté aujourd’hui par le duo Macron/Schiappa.

Je me souviens juste que quand j'avais vers 10-11 ans, ma mère avait invité des intellectuels juifs  (je sais c'est un pléonasme, encore qu'il ne faille jamais essentialiser) dans la maison familiale de Quiberon. Par défi et par jeu, ils avaient revendiqué leur identité juive qui avait selon eux servi à civiliser la Bretagne (qu'ils assimilaient à l'âge de pierre), la France (quand même un peu plus civilisée), voire le monde entier, alors par défi j'avais revendiqué mon identité bretonne, mais je n'étais qu'un môme. Cette même « identité » m'a servi aussi à lutter contre la volonté d'emprise délétère et sexuelle de mon paternel, grâce à mes grands-parents qui m'accueillaient avec le cœur sur la main sans avoir conscience qu'ils me protégeaient d'un monstre, eux qui parlaient breton avec enthousiasme le plus souvent en riant très fort - un peu à la façon d'un Le Pen père (qui parle lui français, mais d'un français directement issu d'un caractère breton et qui avait dû entendre ses aïeux parler en langue bretonne) qui vient d'ailleurs de la même région du Morbihan que ma famille du côté de ma mère, peut-être un cousin ?

C’est un exemple de ressenti phénoménologique qui n’a rien d’une méthode scientifique fondé sur la certitude.

vendredi 14 janvier 2022

anéantir

 


Peut-être que Houellebecq ne souffre pas la comparaison avec Céline. Ou alors donnons une définition de Houellebecq comme étant encore plus nihiliste et décadent que Céline, parce que l'époque - le début du XXIème siècle - est bien plus nihiliste et décadente que le début du XXème siècle. D'Extension du domaine de la lutte à anéantir, l'œuvre de Houellebecq est comme l'époque, elle ne s'améliore pas avec le temps, elle décroît à mesure que la Matière prend le pas sur l'Esprit ; c'est en cela qu'elle est intéressante : elle décroît à mesure que l'artiste grimpe dans l'échelle sociale et y perd peu à peu son esprit de révolte initial et sa rage intrinsèque contre l'injustice qui lui a été initialement faite - lui un être si intelligent et si sensible, traité comme un déchet par la collectivité humaine, et plus particulièrement par les femmes. Finalement un peu comme Zuckerberg, qui a créé un réseau social puis a fait fortune pour se venger de sa petite amie qui l'avait plaqué.

On sent la maladie, l'avachissement, la vieillesse, une forme de lassitude rendant incapable de mener un quelconque projet au bout (on pense à toutes ces pistes laissées vacantes en cours de route dans son dernier roman), s'inscruster peu à peu dans son œuvre, pour finalement totalement l'envahir, comme une cité naguère prospère, féconde et imaginative, mais ruinée et désertée, pourrait l'être par la végétation ; les arbres, les racines, des lianes, recouvrant tout peu à peu, des animaux faisant leurs abris dans les temples et les palais naguère remplis de vie sociale. L'artiste laissant faire l'œuvre de destruction de la nature sur la culture, et le résultat n'étant pas si moche que ça, à l'instar de ces vieilles cités mayas, incas, ou cambodgiennes, rendues à la jungle. À mesure qu'il n'a plus rien à prouver et a été hissé au rang d'idole par ses contemporains qui avaient commencé par l'humilier, l'artiste n'a plus à se donner la peine de rien, il en est le parasite sacré en en ayant conscience ; ayant atteint le sommet comme il l'avoue lui-même, il n'a plus qu'à se laisser aller en roue libre dans la descente.

"L'homme par qui le désert croît" ; Nietzsche. On pourrait rajouter exponentiellement par-dessus le marché, et citation dont Houellebecq est la parfaite illustration, le miroir tendu à nos contemporains dans un dernier éclat de rire, un ricanement cynique voire obscène, de ce principe d'entropie qui n'affecte pas seulement nos vies individuelles, mais les bases de notre civilisation dans ses fondements ; comme le couple hétérosexuel et la famille. L'énergie qui a servi à fonder notre civilisation, se disperse dans des luttes intestines, stériles et fratricides, dont le wokisme constitue la quintessence caricaturale.

Le déclin il est avant tout dans la tête de Houellebecq, il s'exprime jusque dans son physique et sa dégaine qui dégagent un très fort degré d'avachissement dont il joue et jouit par provocation - voir les films dans lesquels il joue étant jubilatoires, tant son personnage de Droopy perspicace et désarmant est soigneusement peaufiné. Houellebecq a vaincu la fatalité de son propre caractère, il en a triomphé par un coup de force contre l'anéantissement qui lui était promis par les circonstances. Bel exemple pour nous tous de résilience réussie ; l'esprit chez lui a vaincu la matière, on y trouve bien des éléments de nostalgie pour la vieille France catholique qui déplaisent tant aux progressistes. Autrement dit l'esprit survit en lui alors que la matière anéantie par le modernité et le progressisme est déchue : en ressemblant à un clochard il reste en réalité fidèle à lui-même et à ses débuts prometteurs.

« Famille et conjugalité, tels étaient les deux pôles résiduels autour desquels s’organisait la vie des derniers Occidentaux en cette première moitié du XXIe siècle. D’autres formules avaient été envisagées, en vain, par des gens qui avaient eu le mérite de pressentir l’usure des formules traditionnelles, sans pour autant parvenir à en concevoir de nouvelles, et dont le rôle historique avait donc été entièrement négatif. La doxa libérale persistait à ignorer le problème, tout emplie de sa croyance naïve que l’appât du gain pouvait se substituer à toute autre motivation humaine, et pouvait à lui seul fournir l’énergie mentale nécessaire au maintien d’une organisation sociale complexe. De toute évidence c’était faux, et il paraissait évident à Paul que l’ensemble du système allait s’effondrer dans un gigantesque collapsus, sans qu’on puisse jusqu’à présent en prévoir la date, ni les modalités - mais cette date pouvait être rapprochée, et les modalités violentes. Il se trouvait ainsi dans cette situation étrange où il travaillait avec constance, et même avec un certain dévouement, au maintien d’un système social qu’il savait irrémédiablement condamné, et probablement pas à très long terme. » anéantir, page 539.

On a beau savoir tous les méfaits du néolibéralisme et de l'appât du gain comme système structurant et "civilisationnel", on ne fait rien contre car les progressistes - les médias mainstream notamment, le système judiciaire (que Zemmour critique à juste titre), même le système scolaire etc. - sont dans le déni et pourtant c'est comme le nez au milieu de la figure... Le système tient grâce à une minorité de gens qui y trouvent des bénéfices sans commune mesure, liés à la volonté de puissance ou volonté de volonté ; voire la perversion selon Dany-Robert Dufour.

Il y aurait beaucoup à dire sur le système judiciaire qui est désormais contre la famille et le couple hétérosexuel, au nom des droits de l'homme c'est-à-dire du plus petit dénominateur commun ; l'individu réduit à sa plus simple expression c'est-à-dire un élément atomisé privé de toute communauté politique où s'épanouir. Communauté dont les derniers rogatons sont en voie de décomposition, car le pouvoir "politique" représenté notamment par Macron en France s'acharne à détruire la moindre de ses expressions. Les particules élémentaires c'est l'atomisation de la société, l'anéantissement de toute communauté que jadis la famille et son socle religieux servaient à souder. Progrès ou déclin ?

Malgré la disparition programmée du christianisme par le libéralisme, la recherche de bouc-émissaires reste in fine le principe structurant de nos sociétés en déclin, d'autant plus qu'elles sont en déclin à cause du déni de ce principe structurant contrairement au christianisme - lire René Girard. Dans anéantir, les bouc-émissaires sont les vieux, tous les "inutiles", voire en extrapolant un peu les artistes que Houellebecq définit comme des parasites sacrés de la société ; il y voit d'ailleurs une supériorité de la société musulmane qui n'abandonne pas ses vieux, sur les sociétés libérales occidentales.

Le projet sous-jacent sans doctrine explicite du néolibéralisme, c'est d'anéantir la fin de vie, l'agonie, la mort, derrière le dos des vieux en chair et en os. Il n'en parle peut-être dans son dernier roman que très peu mais c'est le projet du transhumanisme - le destin du néolibéralisme ; beau projet d'immortalité s'il était réalisable, or selon moi il n'en est rien : il s'agit d'un simple fantasme de riche omnipotent sur le plan matériel mais si pauvre sur le plan spirituel, ne supportant pas de se voir mourir au même titre qu'un "pauvre hère" après avoir pu jouir d'absolument tout sur terre.

HOUELLEBECQ INACCEPTABLE !!!

Houellebecq en dit beaucoup sur la nullité de l'époque, d'une part parce que son destin était sans doute d'être un homme moyen voire médiocre, d'autre part parce qu'à travers son regard d'homme moyen qui provoque spontanément de grands éclats de rire (la grande force de sa prose plate et monotone ponctuée de punchlines drolatiques), on s'aperçoit, tellement ce regard est perçant, qu'en réalité on est souvent très loin d'être aussi intelligent et perspicace que lui ; d'où la honte aussitôt ressentie de recevoir des leçons d'un tel individu qui physiquement ressemble vaguement au SDF en bas de l'immeuble. À travers lui on perçoit surtout la médiocrité des élites. Il joue dans notre société le rôle d'un Diogène le cynique, on dirait aujourd'hui d'un bouffon (comme l'était finalement Molière à la cour du Roi-soleil), disant à tous les arrogants Alexandre : « ôtez-vous de mon soleil » - en langage moderne « foutez-moi la paix » !

Alors évidemment un tel comportement provoque des jalousies énormes chez tous les pisse-vinaigres, les pisse-froids, qui souvent ont un petit talent, rarement un grand talent, et absolument jamais du génie. Un tel comportement apparaît chez tous les médiocres de la littérature ou autres, chez des critiques, des biographes, comme une provocation énorme, inacceptable.


samedi 8 janvier 2022

Capitalisme en phase terminale

 

Capitalisme en phase terminale - le wokisme : une arme entre les mains du capital.

Les Français veulent des chefs, et tout le monde veut être le petit chef de son voisin, y compris en le dénonçant ; personne ne veut penser la société sans classe et le communauté politique par le biais de la démocratie directe étant la seule véritable démocratie, tout le reste étant oligarchie, capitalisme financier et exploitation de l'homme par l'homme, subtilement, sans doctrine explicite - à la différence des régimes fascistes, de ségrégation raciale, et/ou explicitement patriarcaux.

Il n'y a plus de relations humaines, mais uniquement de l'oppression, y compris au sein des familles - viol de l'innocence et de l'intimité des enfants ; globalement les rapports humains se judiciarisent et font la fortune des avocats et des magistrats, par incapacité de viser la bonne cible on se rabat sur son prochain pour l'oppresser et on exalte l'homme du lointain (forcément, lui, par exemple le Ouïghour, ne nous "emmerde" pas !) et les minorités locales - avec qui on évite quand même de se mélanger, mais sont utiles pour rendre des services, à condition qu'elles soient parquées loin des regards dans les zones péri-urbaines.

En société néolibérale en phase terminale, tout est prétexte pour se faire la guerre afin d'obtenir une petite place au soleil, pour sa gueule : le racialisme est une guerre des races sous couvert de progressisme et sous les traits du wokisme ; le néoféminisme est une guerre que les sexes se livrent en pointant le relativisme du genre et l'oppression patriarcale tout au long des siècles ; le pass vaccinal est un combat ostracisant mené par le pouvoir et les moutons virulents, sur le terrain de la citoyenneté ; etc.

Il n'y a que la guerre des classes, la plus brûlante de toutes en réalité, la mère de toutes les autres en régime néolibéral, qui soit soigneusement occultée, cachée, tabou, comme si elle n'existait pas et n'avait jamais existé - la guerre des classes n'existe pas car elle a été discréditée par le goulag (Soljenitsyne), et les « nouveaux philosophes » (sic) : Glucksmann, Bruckner, BHL, notamment, et beaucoup d'autres.

La lutte des classes est un non-dit, l'impensé des sociétés postmodernes. C'est peut-être aussi tout simplement passé de mode, et semble ringard au plus précarisé des salariés préférant faire confiance aux méthodes de développement personnel pour s'en sortir par soi-même, sans les autres mais plutôt contre les autres.

Pendant que le peuple, et les victimes en son sein de tout genre de discrimination sociétale réelle ou imaginaire se font une guerre intestine afin d'obtenir des avantages victimaires, des bénéfices secondaires - car demander une vraie réparation ce serait remettre en question tout l'édifice social et les rapports de classe, pour sortir collectivement du statut de victime, de la souffrance salariale et de la précarisation, étant un esclavagisme moderne par le biais de l'ubérisation. Les vainqueurs de la mondialisation, les habitants des grandes métropoles intramuros, les bobos de gauches progressistes, bref tous ceux qui se sentent représentés par le néolibéralisme incarné par Macron se frottent les mains : diviser pour mieux régner.

Même en phase terminale, le capitalisme a encore de beaux jours devant lui, effectivement pour lutter contre il faudrait des gens unis et solidaires, tout ce qu’empêche le monde du travail sous l’égide du néolibéralisme asocial et apolitique (le contraire du politique au sens de la communauté politique et de la démocratie directe) et l’idéologie progressiste qu’il véhicule dont le projet est de diviser - wokisme. La capitalisme mourra tout en étant obèse et impotent, et sans doute de son obésité et de son impotence...

De toute façon nous n'aurons pas le choix, soit nous sortirons du capitalisme, soit le capitalisme aura notre peau à tous. Et je ne crois pas à des réformes réussissant à instaurer un développement durable au sein du capitalisme. La croissance du capitalisme repose sur la cupidité des acteurs économiques, et cette cupidité qui permet l'enrichissement de la société n'a rien de rationnel et s'accompagnent de tout un tas d'effets pervers - le narcissisme notamment. En outre un tel projet a été théorisé en premier par Mandeville il y a plus de 300 ans, le petit ruisseau exaltant la perversion des élites et la cupidité des patrons, s'est transformé en énorme torrent boueux ravageant tout à la surface du globe.