samedi 15 janvier 2022

Que pense Macron des Deschiens ?



La méthode scientifique, le scientisme, et la croyance.

Le scientisme relève de certaines superstitions, pas la méthode scientifique. Heureusement tous les scientifiques ne sont pas scientistes, voire de moins en moins car c’est passé de mode, se contentant d’être pragmatiques à l’anglo-saxonne et le croient-ils débarrassés de tout préjugé idéologique. Je pensais surtout à la psychanalyse qui relève du scientisme mais pas du tout de la science, et dont Onfray peut-être de façon excessive et caricaturale, l’effet bulldozer qui lui est propre, a souligné la part d’ombre, la dimension gourou aussi, induites par la personnalité de Freud, plutôt autoritaire avec des sympathies avoués pour le fascisme de Mussolini (en qui il se reconnaît ?), et par sa propre idiosyncrasie dont il s’est inspiré pour en tirer des lois générales applicables à l’ensemble du genre humain – hormis les Irlandais réfractaires selon lui à sa médecine (selon moi pour des raisons de croyance ce qui est un comble pour ce qui se veut une démarche scientifique donc universelle). La psychanalyse n’est pas une méthode très rigoureuse et scientifique, relèvant davantage du culte de la personnalité et de l’adhésion inconditionnelle de ses adeptes en la personne du gourou, avec toute la part de dogmatisme et de superstitions que cela peut comporter à l’instar de toute croyance, voire culte de la personnalité – on se souvient que dans Le meilleur des mondes, le livre d’Aldous Huxley, les protagonistes invoquent indifféremment notre Ford ou notre Freud dans leurs prières.

Au fond Freud qui se voulait le pourfendeur des religions dans « L’avenir d'une illusion » notamment, n'a-t-il pas remplacé une croyance par une autre croyance, une religion révélée par un pansexualisme ?

Quant à la méthode scientifique et au développement des technosciences, les progrès des sciences se nourrissent de ceux de la technique et vice et versa, ils sont sans doute utiles (au sens de l’utilitarisme ; ce qui est selon moi péjoratif) et source de progressisme au sens idéologique (ce qui venant de moi est péjoratif), car le progrès augmente le bien-être et la quête de ce dernier par des progrès sociétaux. Mais 1) selon Heidegger « la science ne pense pas » ; 2) la technique repose sur l'arraisonnement de la nature sur le mode de la provocation avec une explosion d'effets pervers qui sont l'impensé du progrès, qui se fait selon Arendt « derrière le dos des hommes en chair et en os » : au fond les bénéfices retirés comme le bien-être ne se paient-ils pas de désavantages plus grands encore - comme la solitude ? 3) la méthode scientifique elle-même a pour fondement une métaphysique de la subjectivité, qui fait du sujet (res cogitans) le seul critère de vérité de cette méthode par le biais de la certitude – qui elle-même découle du doute dans ses fondements métaphysiques cartésiens ; au détriment des phénomènes et du monde tel qu'il est (res extensa). D’autant plus Descartes affirmant qu’une fois posés les fondements métaphysiques de la méthode scientifiques, il n’était plus utile de revenir sur eux. Il a fait l’expérience du doute systématique et radical, hyperbolique, pour en délivrer ses successeurs une bonne fois pour toute, afin de faire table rase du passé et tirer de son expérience métaphysique - presque une révélation d’ordre mystique, une intuition géniale, sur le statut de la vérité - la substantifique moelle ; à savoir la méthode scientifique moderne débarrassée de ses présupposés grecs sur le statut de la vérité.

En voulant débarrasser la méthode scientifique de toute superstition, Descartes annonce une nouvelle superstition qui animera ses successeurs positivistes, francs-maçons, scientistes, progressistes sociétaux... celle de l’absence de doute concernant les vertus du progrès scientifique, du progressisme sociétal ; bref une nouvelle forme de croyance aveugle.

C’est sur le statut de la vérité venant des Grecs anciens, occulté depuis Descartes par la méthode scientifique, que Heidegger ne cesse de revenir pour déconstruire la métaphysique de la subjectivité, et la souveraineté du sujet pensant sur le monde tel qu’il est, celui des phénomènes voire du bon sens ; pour déconstruire l'hégémonie de la res cogitans sur la res extensa à laquelle appartiennent tous les animaux réduits à la condition de machines.

Contre la certitude propre à la métaphysique de la subjectivité, le scepticisme et la suspension du jugement d’un Montaigne.

Personnellement je m'efforce de prendre exemple sur Montaigne, je m’interdis de penser de façon partisane, dans un camp contre un autre, en l’occurrence le camp du Bien contre celui de la fachosphère et du complotisme ; c’est tellement réducteur et injuste, et puis c’est une façon confortable de se donner bonne conscience à moindres frais : comme toute la gauche bobo, délivrant ses bonnes paroles moralisatrices venant des centres urbains des grandes métropoles vers la France périphérique qui pense mal, voire nécessite d'être rééduquée ; je préfère encore suspendre mon jugement en bon sceptique. Je n'ai jamais vraiment goûté l'"humour" de Canal + sur la beaufitude de la France profonde (dixit les élites) avec un programme comme les Deschiens.

Oui effectivement j’ai lu pas mal de livres de Zemmour et l’avantage est qu’il est un des seuls hommes politiques à ne pas penser comme un technocrate apte uniquement à gérer les affaires courantes et « après moi le déluge », il écrit aussi très bien contrairement à la majorité de ses pairs qui ont recours à des conseillers en communication pour rédiger leurs livres.

Concernant l’esprit partisan c’est ce qui entraîne des guerres civiles selon Montaigne, il encourage plutôt à la tolérance et au dialogue sans esprit de censure : il n’y a pas de camp du Bien pour Montaigne, et c’est même ce qui encourage selon lui l’intolérance et peut être même source d’obscurantisme et d'ostracisme, d'autant plus quand le camp du Bien se réclame du Bien avec un grand B comme de nos jours : « Quand on me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère : je m'avance vers celui qui me contredit, qui m'instruit » - tout le contraire du « je ne parle pas aux cons ça les instruit » bien plus consensuel (dans une époque de vulgarité et de méchanceté généralisées) de Michel Audiard inspiré de Céline, drôle certes mais intolérant. Que de progrès techniques incontestables depuis Montaigne, mais peu d’avancées sur le plan de l’éthique, une stagnation voire une régression. « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà », cette citation que l’on attribue à Pascal a en réalité pour origine une citation de Montaigne voulant dire exactement la même chose ; elle demeure plus que jamais d’actualité en nos temps troublés, obscurantistes, partiaux et ostracisants – souvent au nom des droits de l’homme, le plus petit dénominateur commun quand toute communauté politique digne de ce nom a été abolie.

Les Bretons sont-ils des monstres avec leur rire démoniaque ?

Ce rire de bon sens exprime plutôt un scepticisme quant aux prétentions exorbitantes du progressisme sociétal représenté aujourd’hui par le duo Macron/Schiappa.

Je me souviens juste que quand j'avais vers 10-11 ans, ma mère avait invité des intellectuels juifs  (je sais c'est un pléonasme, encore qu'il ne faille jamais essentialiser) dans la maison familiale de Quiberon. Par défi et par jeu, ils avaient revendiqué leur identité juive qui avait selon eux servi à civiliser la Bretagne (qu'ils assimilaient à l'âge de pierre), la France (quand même un peu plus civilisée), voire le monde entier, alors par défi j'avais revendiqué mon identité bretonne, mais je n'étais qu'un môme. Cette même « identité » m'a servi aussi à lutter contre la volonté d'emprise délétère et sexuelle de mon paternel, grâce à mes grands-parents qui m'accueillaient avec le cœur sur la main sans avoir conscience qu'ils me protégeaient d'un monstre, eux qui parlaient breton avec enthousiasme le plus souvent en riant très fort - un peu à la façon d'un Le Pen père (qui parle lui français, mais d'un français directement issu d'un caractère breton et qui avait dû entendre ses aïeux parler en langue bretonne) qui vient d'ailleurs de la même région du Morbihan que ma famille du côté de ma mère, peut-être un cousin ?

C’est un exemple de ressenti phénoménologique qui n’a rien d’une méthode scientifique fondé sur la certitude.

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