mercredi 26 janvier 2022

Les psys sont-ils les curés du monde contemporain ?

 


Le problème avec les psys est qu'ils se croient les curés des temps modernes et effectivement ils le sont. Nietzsche de droite ? D'abord il s'adresse avant tout à une élite du futur dont la principale caractéristique serait d'être une élite d'artistes en rupture totale avec le christianisme. Pas sûr que Nietzsche se soit posé la question de cette élite en ces termes de droite et de gauche. C'est plus compliqué que ça je pense. Nietzsche avait surtout le projet d'asseoir les fondations d'une société d'artistes créateurs seuls capables de supporter l'air raréfié des cimes, une élite du futur capable de créer de nouveaux dieux en rupture totale avec le christianisme, dont il aurait été le maître à penser avec un décalage dans le temps puisqu'il se pensait intempestif et inactuel pour son époque - selon lui incapable de le comprendre.

Sauf que selon Heidegger il n'achève pas la métaphysique de la subjectivité initiée par Descartes, au sens de la destruction ou de la déconstruction, mais en constitue l'achèvement au sens de l'accomplissement. En remontant encore plus loin, non seulement il ne renverserait pas le platonisme mais en réalité il adopterait exactement la même démarche que Platon, sauf qu'au lieu de subjuguer la vérité au bien, il subjuguerait la vérité à des valeurs certes aristocratiques mais avant tout par-delà bien et mal. Nietzsche se veut immoraliste, mais Platon n'était-il pas lui-même un aristocrate ?

Ainsi donc Nietzsche contrairement à ce qu'il croit (le philosophe au marteau), ne renverserait-il pas toute la métaphysique occidentale depuis Platon mais en réalité l'achèverait au sens de l'accomplirait. Or c'est bien toute cette métaphysique occidentale remontant à Platon que Heidegger se propose de déconstruire par le biais du dasein, en bon disciple de Husserl et de la phénoménologie ; chez Heidegger une autre façon d'achever la métaphysique occidentale, au sens de liquider, c'est-à-dire aussi de rompre, est de remonter aux présocratiques. S'il y a bien une philosophie dont la French Theory est l'héritière - French Theory qui nous revient comme un boomerang des campus américains par le biais du wokisme ; c'est bien davantage encore celle de Heidegger - qui déconstruit le sujet souverain (masculin et blanc) sur lequel se fonde la vérité par le biais de la certitude - que celle de Nietzsche.

Oui, nous vivons dans un monde absolument horrible qui ne donne plus sa chance qu’à ceux qui n’en ont pas besoin : les forts. Mais c'est davantage dû selon moi au néolibéralisme qu'à la philosophie de Nietzsche qui certes contrairement à celle de Schopenhauer, prône le rejet de la compassion et de la pitié, sans doute parce que Nietzsche y voyait la présence du christianisme, c'est-à-dire une façon pour la caste des prêtres d'avoir « une emprise sur les personnes. « Périssent les faibles et les ratés, on va même les y aider ! » À travers cette formule très provocatrice, c'est avant tout d'après moi cette emprise que combat Nietzsche plus que la compassion elle-même ; effectivement souvent Nietzsche prend le parti des criminels ou des victimes (souvent ce sont les mêmes) contre les juges... Autrement dit, Nietzsche combat l'emprise des faibles (les prêtres) sur les forts - qui pourraient être pour Nietzsche les artistes, à condition qu'ils soient libérés de cette emprise qui peut notamment faire d'eux des criminels ou des victimes ; ce qui fait toute la matière de sa philosophie, et ce qui ne l'a pas empêché de devenir fou, selon la légende au spectacle d'un cocher martyrisant un pauvre cheval récalcitrant à Turin. Sans doute un retour violent et fatal du refoulé compassionnel.

Or qui sont les prêtres aujourd’hui ? Ce sont les psys.

Les curés je ne connais pas très bien, mes parents ont dogmatiquement refusé que je me fasse baptiser, mais je crois que comme pour les psys il y avait une grande diversité des écoles ; qu'ils pouvaient être jésuites, dominicains, salésiens, franciscains... Les moines pouvaient être cisterciens, trappistes... Il y avait aussi mille et une façons pour les chrétiens de soigner les maux de l'âme. C'est le libéralisme qui le premier s'est montré franchement sceptique sur la capacité de soigner les maux de l'âme par la vertu. À la suite des libéraux (Mandeville, Smith...), les psys se sont engouffrés dans la brèche pour devenir les "curés", les régulateurs, de nos sociétés néolibérales où le vice privé fait la vertu publique. Notre mal vient évidemment de beaucoup plus loin que la seule génération des baby-boomers, mais disons qu'au lieu d'atténuer le mal, elle l'a exacerbé.

La vertu est une notion totalement obsolète dégradée par les libéraux, avec Mandeville en précurseur psy avant l'heure. Plus généralement la discipline psy est axiologiquement neutre tout comme la société libérale, elle ne se pose pas la question des valeurs en termes de bien ou de mal, elle ne se pose peut-être même plus la question des valeurs mais tout en termes de pragmatisme, de rendement et d'efficacité ; Kant est le dernier maître de la morale à part entière, après lui viennent les philosophes du soupçon et les psys. Les psys avec Freud s'inspirant de Schopenhauer et de Nietzsche voire avant eux de Mandeville, ont accompli une révolution copernicienne : c'est n'est plus le sujet pensant cartésien souverain (le cogito ergo sum) qui décide en nous, mais pour la plus grande part notre inconscient, la part immergée de l'iceberg, ou encore la volonté de Schopenhauer, cela remettant en cause le libre-arbitre et constituant pour l'orgueil humain une profonde blessure narcissique. Je crois que le rôle des psys est avant tout de remettre les gens sur les rails des relations humaines constructives, sereines, apaisées, dans le bon sens aussi. Parce qu'il y en a qui ont dû dérailler sur un aiguillage (les mauvais choix), d'autres ayant déraillé dont les roues continuent à tourner à plein régime (ce qui entraîne une surchauffe psychique entièrement stérile), d'autres allant dans le mauvais sens, etc. Le rôle des psys n'est pas de juger la société dans laquelle ils vivent mais de pousser leurs patients à s'y adapter : le fameux principe de réalité !

Commentaire envoyé (et publié dans son blog) à Florence de Mèredieu spécialiste d’Antonin Artaud.

« On vous censure peut-être parce que l'on vous reproche votre « violence » verbale ou à tout le moins votre franchise dans un monde hypocrite et profondément pervers ; c’est une hypothèse : vous êtes tabou en raison de votre absence d'auto-censure dans un monde consensuel et de l’entre-soi sous la coupe des baby-boomers - dont vous faites d’ailleurs partie ; fait inédit dans toute l’histoire occidentale, cette génération a omis de transmettre le monde tel qu’elle l’avait reçu (mais c’est encore plus compliqué que ça car les boomers sont avant tout des enfants du chaos et de la destruction). Traître à votre classe, car les boomers sont une classe sociale à eux seuls, une caste dirigeante dont ils ont exclu leurs propres enfants réduits à la déculturation et au consumérisme, c’est-à-dire la servitude volontaire. Je crois que vous vous exprimez avec une grande douceur et sensibilité pour masquer le feu qui bouillonne en vous, mais précisément on vous a démasquée ; vous n’arrivez pas à le cacher : vous « êtes » une violente.

LA RESPONSABILITÉ ÉCRASANTE DES BABY-BOOMER DANS L'ORIGINE DE LA CRISE ACTUELLE.

Il faut avoir selon moi un minimum de sentiment de culpabilité sans tomber dans les excès du christianisme qui in fine servent les intérêts, la volonté de puissance, des prêtres, en rabaissant les ouailles dans la servitude volontaire. Il faut avoir un minimum de sentiment de culpabilité et de sens du sacrifice pour pouvoir s'inscrire dans une filiation et pouvoir transmettre aux générations qui suivent le monde tel qu'on l'a reçu. Or les boomers l'ont considérablement dégradé le monde qu'ils avaient reçu en héritage. Mais cela s'explique peut-être par leur petite enfance et leur sentiment de dénuement (peu de jouets au pied du sapin à Noël quand il y en avait un, sniff-sniff, ouin-ouin !!!) quand leurs parents n'avaient rien et avaient tout à reconstruire, ils sont fondamentalement des enfants issus du chaos et du néant ; des destructions, des ruines, dues à la seconde guerre mondiale. Berlin année 0 ! En raison de ce dénuement originel, globalement les baby-boomers accumulent des richesses, dépensent beaucoup aussi, prennent l'avion pour aller à l'autre bout du monde, donc polluent beaucoup, mais ils se soucient de l'avenir de leurs enfants comme de leur première chemise, et ils ne redistribuent strictement rien, après eux le déluge !

La violence verbale, la provocation par le verbe, provoquent éventuellement le scandale et l'indignation, on a le droit d'être choqué, surtout chez ceux qui préfèrent regarder le doigt plutôt que ce qu'il montre – c’est ce que provoque la plupart des écrits d’Artaud. Mais cela n'a rien à voir avec la violence physique, l'interprétation par des violents d'écrits scandaleux ne regarde que les violents. Les appels à la violence physiques sont des écrits violents, souvent normatifs, étant des appels au meurtre, mais à ne pas confondre avec les écrits subversifs, scandaleux, choquants, cependant fondamentalement non-violents, puisque l’émotion contagieuse y passe par l'écrit plutôt que par la brutalité physique. Même Céline est fondamentalement non-violent, et il s'en explique souvent dans ses textes, idem pour Pasolini, idem pour Houellebecq et ses punchlines agressives et foncièrement drôles, idem même pour Zemmour selon moi - bien qu'il soit à la fois essayiste de talent et politique, c'est là où ça se corse ; Mein Kampf c'est une autre histoire, c'est un appel au meurtre. Bref l'écrit, dans le cas de la transgression, peut être une catharsis souvent mal interprétée par ceux n'ayant que les moyens d'opérer cette catharsis par la violence physique. La violence est certainement la plus contagieuse des émotions, bien plus que la catharsis non-violente qui s'opère par le biais d'un écrit subversif chez l'auteur et ses lecteurs. D'où l'erreur d'interprétation commise par les nazis des écrits de Nietzsche mais aussi de ceux de Hegel et de Kant - la banalité du mal propre à un Adolf Eichmann qui pour sa défense disait qu'en bon kantien il se contentait d'obéir aux ordres. D'où l'erreur des communistes soviétiques concernant les écrits de Marx. Enfin l'erreur de Robespierre et de ses sbires à l'origine de la Terreur, concernant les écrits de Rousseau. »

Faut-il voter pour Zemmour ? Ce dernier ne fait-il pas preuve d'une démarche volontariste et optimiste quant à la capacité des Occidentaux français d'origine européenne de se ressaisir ?

Zemmour a entièrement raison de parler du suicide français, mais si les Français veulent réellement se suicider collectivement - et dans son livre il pensait plus particulièrement à la génération qui a fait mai 68, c'est-à-dire les baby-boomers - que peut-il y faire ? Que peut-il y changer ? Les parents ont tout donné à leurs enfants baby-boomers, au point de se sacrifier pour eux, pour qu'ils réussissent. Qu'ont fait les baby-boomers du sacrifice de leurs parents ? Ils ont ironisé dessus, ramassé leur pognon, rejeté leurs valeurs, et décidé qu'il n'y avait plus rien à transmettre aux générations qui venaient après, que de toute façon en se fiant aux leçons de l'Histoire, elles n'en valaient pas la peine. C'est ce que Zemmour appelle à juste titre la haine de soi, certains comme mon cousin germain, sont passé à l'acte, se sont réellement suicidés très jeunes, en raison de la haine que leurs parents leur vouaient sans se l'avouer bien sûr. La haine née du sentiment de se voir mourir, vieillir à tout le moins, à travers la jeunesse de ses propres enfants.

Globalement, vous les baby-boomers, êtes des idoles, des dieux pour vos enfants, évidemment vous avez capté tout l'héritage de 2000 ans de civilisation chrétienne et n'avez rien redistribué. Comme on dit votre melon a tellement enflé que vous ne touchez plus terre. Tout remise en question vous est ontologiquement impossible. Vous avez fait barrage à la culture, éliminé la tradition, pour que vos enfants demeurent niais et incultes et ne puissent pas vous critiquer. Et en plus, globalement, vous n'avez aucun sens de l'humour, vous vous prenez toujours autant au sérieux alors même que vous glissez lentement vers l'Éternité.

Encore une fois ne vous offusquez pas, car il s’agit d’une généralisation qui est une conceptualisation, cependant il ne s'agit pas d'une conceptualisation au sens des membres biologiques de cette génération, mais au sens de type, d'esprit baby-boomer. Beaucoup d'enfants de baby-boomers ont l'esprit baby-boomer car ils sont à l'image de leurs parents, mais en plus petits : on pense à beaucoup de journalistes ou d’intellectuels qui tentent de faire perdurer l’esprit libertaire et de dérision de leurs parents, de fait ils se retrouvent souvent à devoir manier les ciseaux de la censure pour préserver un héritage impossible contre tous les populistes, conspirationnistes et obscurantistes. Et puis il y en a qui appartenaient biologiquement à cette génération et qui n'en ont pas l'esprit : ceux-là je les admire plus que tout, ce sont d'authentiques résistants.

Le problème ce sont davantage les populations autochtones qui se font hara-kiri en ne croyant plus du tout en l'avenir, en ne faisant pas d'enfants, que les populations allogènes qui se contentent de répondre à une demande du marché du travail. Ce qui fait davantage question c'est cette pulsion de mort, cette volonté de néant, qui animent les populations vieillissantes de l'Europe occidentale. Longtemps j'ai cru que c'était une sorte de complot des patrons, une ruse du néolibéralisme pour faire du profit avec une main d'œuvre à meilleure marché, mais non, je constate de plus en plus qu'il s'agit d'une démarche délibérée, plus ou moins consciente, de suicide collectif chez les Occidentaux d'origine européenne. C'est un peu trop facile de pointer du doigt les allogènes comme des bouc-émissaires et les responsables de tous nos maux, si nous ne voulons plus vivre et aimer nos enfants ils n'y sont pour rien. 

Mais je conçois que certains, par une sorte de masochisme très répandu, puissent préférer les enfants d'allogènes exotiques plutôt que leurs propres enfants biologiques ; un symptôme profond de décadence selon moi, un réflexe de fin de race. Au nom de ce droit à l’amour pour tous, beaucoup hélas, s'interdisent d'aimer leurs propres enfants biologiques ; car ce serait "injuste" vis à vis des enfants allogènes : un genre de discrimination positive au sein des familles s'installe et pas seulement au sein de l'École, où elle est déjà, depuis assez longtemps, très répandue. Je crois malheureusement que les familles allogènes pour le dire pudiquement, alors que je pense très fort, musulmanes, n’ont pas ce genre de scrupules. Les musulmans ne s’interdisent pas d’aimer leurs propres enfants plus que ceux des autres ; les Juifs aussi ont gardé leurs traditions. Personnellement ma mère n'a pas cessé de me dévaloriser et de me mettre des bâtons dans les roues parce que précisément j'étais blanc, mâle, d'origine chrétienne ; elle a pratiqué sur moi un genre de discrimination négative, c’est du vécu !

J’entends bien le discours des psys : « Les psychanalystes sont des opérateurs symboliques : ils se disposent à être ce que le patient/client fera d'eux. Ils ne le mettent sur aucun rail et ne l'invitent pas à s'adapter à la société de leur temps. Ils s'emploient à vous laisser découvrir votre désir ; votre ressort intime. En dehors des séances, il s'agit souvent de médecins doués de sensibilité et d'empathie. Le curé croit en Dieu, l'analyste croit en vous, en votre pouvoir d'évoluer, qui que vous soyez. »

Discours spinoziste, pratiquement impossible à mettre en œuvre dans la réalité, mais ce sont de très belles paroles et de très nobles sentiments qui vous honorent. Je crois hélas plus trivialement que vous vous payez de mots. J'ai fréquenté énormément de psys, ma mère est psy, les amis de ma mère, puis en tant que patient. Je ne dirais pas que ce sont tous des escrocs, ce serait excessif, mais plus pragmatiquement ils ont tous des objectifs de rendement, d'efficacité, de retour sur investissement. Dans le cas singulier de ma mère, et de la dernière clinique psychiatrique que j'ai fréquentée, pour leur pomme d'abord. Désolé de doucher un peu votre idéalisme psy, les derniers psychiatres que j'ai fréquentés au sein de la clinique où j'ai séjourné étaient avant tout préoccupés de faire du chiffre, de leurs superbes demeures bauloises, de leurs énormes bagnoles rutilantes, et de leurs vacances de rêve. Mais je reconnais qu'ils peuvent faire beaucoup de bien tout en étant très égoïstes, ils sont eux-mêmes très adaptés à la société néolibérale et son leitmotiv énoncé par Mandeville dès 1714 : vice privée, vertu publique.

3 commentaires:

  1. J'ai bien aimé votre texte mais je pense que vous faites sans doute une erreur dans la compréhension de la philosophie de Nietzsche; je vous cite: "Nietzsche avait surtout le projet d'asseoir les fondations d'une société d'artistes créateurs seuls capables de supporter l'air raréfié des cimes, une élite du futur capable de créer de nouveaux dieux en rupture totale avec le christianisme, dont il aurait été le maître à penser". Jamais le surhomme nietzschéen n'aura pour ambition de créer de nouveaux dieux, il n'a pas d'ambition pour lui-même , il "est" car il s'est libéré du fardeau des anciennes valeurs, qu'elles soient religieuses ou non.Son prototype est certes l'artiste qui échappe au conformisme en créant de la nouveauté, en se dépassant lui-même. La philosophie de Nietzsche est celle de l'auto-dépassement.
    Quant à la rupture avec le christianisme, qui était déjà vacillant à son époque, elle n'est pas proposée par Nietzsche comme une solution. Il prend juste le "chrétien"comme exemple de l'homme "religieux" réactif écrasé par sa croyance (le monde musulman par exemple). Même l'homme "supérieur" qui lui succède en ayant "tué" Dieu (et qui pour cela se croit libre) et s'appuie sur les valeurs dites humanistes (les occidentaux de notre époque en sont à ce stade) est lui aussi assujetti à ces valeurs humaines dont il porte le fardeau (valeurs humaines que Nietzsche appelle « trop humaines » car limitées à la petitesse humaine: « la morale remplace la religion, l’utilité remplace le progrès, l’histoire elle-même remplaçant les valeurs divines »).Mais à terme, même les valeurs humaines finiront aussi par être niées par l’homme supérieur qui finira par penser que tout est vain sur cette terre, que sa vie se dirige vers le néant et qu’il vaut mieux pour lui s’éteindre passivement : ce sera l’apparition du « dernier homme », qui n’a plus de désirs, qui préfère ne plus avoir de volonté plutôt qu’une volonté du néant (l'homme du futur numérique). Nietzsche écrit:
    « Hélas ! Le temps approche où l’homme ne lancera plus par-delà l’homme la flèche de son désir, où la corde de son arc ne saura plus vibrer ! Je vous le dis : il faut encore porter en soi le chaos, pour être capable d’enfanter une étoile dansante. Je vous le dis : vous portez en vous un chaos. Hélas ! Le temps est proche où l’homme ne mettra plus d’étoiles au monde. Hélas ! Le temps est proche du plus méprisable des hommes qui ne sait plus se maîtriser lui-même. Voici ! Je vous montre le dernier homme. » – Ainsi parlait Zarathoustra – Prologue – § 5
    «… et je vis une grande tristesse s’étendre sur les hommes. Les meilleurs se fatiguèrent de leurs œuvres. Une doctrine fut répandue, et elle était accompagnée d’une croyance : « tout est vide, tout est égal, tout est révolu ! … Toutes les sources sont taries pour nous et la mer s’est retirée. Tout sol se dérobe, mais l’abîme ne veut pas nous engloutir ! Hélas ! Où y a-t-il encore une mer où l’on puisse se noyer ? Ainsi raisonne notre plainte, – par-dessus les plats marécages. » – Ainsi parlait Zarathoustra – Livre deux – Le devin.
    Cette volonté du néant ne peut être niée par le dernier homme (il ne peut nier sa volonté), elle persiste en lui et elle se retourne bientôt contre les forces réactives humaines affaiblies qui restent sa seule raison de vivre et l’amènent à vouloir se détruire activement ; au-delà du dernier homme apparaît alors "l’homme qui veut périr" qui est le stade ultime du nihilisme. À ce point d’achèvement du nihilisme , les forces réactives divines ou humaines ont été détruites et tout est prêt pour une «transmutation » de l’homme qui veut périr et l'irruption du "surhomme", esclave devenu maître.

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  2. Le premier texte du premier livre du plus célèbre ouvrage de Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, s’intitule « Des trois métamorphoses » et débute ainsi :
    « Je vais vous énoncer trois métamorphoses de l’esprit : comment l’esprit devient chameau, comment le chameau devient lion, et comment enfin le lion devient enfant. ».
    Le philosophe Gilles Deleuze écrit à ce sujet: « Le chameau est l’animal qui porte : il porte le poids des valeurs établies, les fardeaux de l’éducation, de la morale et de la culture. Il les porte dans le désert, et, là, se transforme en lion : le lion casse les statues, piétine les fardeaux, mène la critique de toutes les valeurs établies. Enfin il appartient au lion de devenir enfant, c’est-à-dire Jeu et nouveau commencement, créateur de nouvelles valeurs et de nouveaux principes d’évaluation." (Nietzsche- PUF-1963)
    On retrouve dans ce texte l’idée qui sous-tend toute l’œuvre de Nietzsche: l’esprit l’homme ne peut échapper au néant de l’existence qu’en mettant à bas les anciennes valeurs qui l’oppriment afin de renaître en toute innocence, accepter pleinement la vie telle qu’elle est et créer de nouvelles valeurs. Nietzsche voulait sans doute apporter une réponse optimiste (et non religieuse) au pessimisme de Schoppenhauer vis à vis de l'homme sans Dieu confronté au néant.

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  3. Soyez tranquille, je suis loin de m'offusquer. Il n'y a rien de moral là dedans. Ce phénomène est cyclique à travers l'histoire. La génération des boumeurs a connu son équivalent avant 1940. J'ai lu ça dans un livre américain The Fourth Turning: What the Cycles of History Tell Us About America's Next Rendezvous with Destiny et j'ai mis de côté ce visuel qui résume l'affaire: la roue des 4 tournants. Comme le cycle des saisons les boumeurs jeunes adultes étaient l'été; nous sommes au milieu de l'hiver.

    https://images%2Eapp%2Egoo%2Egl/pztpCzoFSF2RCBAc6

    Un des auteurs, Neil Howe, est encore vivant et l'explique dans des video Youtube comme celle ci (en VO):

    https://youtu%2Ebe/K8Ndnpfw69w

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