mercredi 11 mai 2022

ROUSSEAU ET NIETZSCHE, ou pourquoi notre société est bien plus nietzschéenne que rousseauiste ?

 


"Périssent les faibles et les ratés : premier principe de notre amour des hommes. Et qu’on les aide encore à disparaître ! Qu’est-ce qui est le plus nuisible que n’importe quel vice ? La pitié active pour les ratés et les faibles : le christianisme" (L’antéchrist)

"Périssent les faibles et les ratés", c'est typiquement du Nietzsche. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une lecture tronquée, Nietzsche est cruel. Beaucoup trouvent dans cette cruauté un exutoire. Plus on monte dans l'échelle sociale plus les gens sont cruels, ce que Nietzsche appelle l'air des cimes pour échapper aux mauvaises odeurs du populo. Nietzsche revendique une morale aristocratique ne s'encombrant pas de moraline. Je pense qu'il a un assez mauvais fond, plutôt que de vouloir changer la société il recommande d'accepter le monde tel qu'il est, et aux victimes de se suicider plutôt que de contaminer par leur négativité le reste de la communauté.

Nietzsche se veut juste mais pas justicier, aussi juste que peut l'être la vie, ni plus ni moins, et la vie est cruelle. Il veut accompagner le mouvement de la vie contre toute forme de ressentiment et propose une morale pour les forts.

Les nazis pangermanistes ont fait une mésinterprétation dans la mesure où il disait que les Juifs avaient vocation à devenir les guides et les maîtres de l'Europe. Les nazis et les fascistes ne peuvent se revendiquer de lui, car finalement c'est bien le ressentiment contre ce qui est supérieur qui les animait.

C'est dans Aurore qu'il dit que les Juifs ont vocation à devenir les guides et les maîtres de l'Europe, mais qu'ils ne devront pas faire honte à ceux qu'ils seront amenés à dominer... ou alors gare au retour du bâton !

Nietzsche vomissait Rousseau qu'il comparait à un malade, et adorait Voltaire pour son esprit. Nietzsche vomissait aussi les socialistes donc par voie de conséquence Marx, mais je ne crois pas qu'il le cite dans son oeuvre. Et enfin il vomissait les antisémites et les pangermanistes. Il n'avait d'égards que pour ce qui lui apparaissait comme supérieur.

La supériorité des Juifs n'est pas un complot comme voulait le faire croire Le protocole des sages de Sion, qui de notoriété publique est un faux, car c'est dans leur nature de dominer le reste de l'Occident auquel ils appartiennent. Autrement dit cette domination est naturelle, et n'a rien d'artificielle comme pourrait l'être un complot - alors que les nazis étaient parvenus au pouvoir en complotant.

Comme les Juifs ne partagent pas, tout comme les nobles ne partageaient pas avec le peuple, pour se consoler il faut bien se dire aussi qu'il y a eu d'autres époques, et qu'ils n'ont pas toujours eu et n'auront peut-être pas toujours vocation à dominer le reste de l'Occident. De plus leur domination ne concerne que l'Occident et pas les grandes puissances que sont la Chine, la Russie ou l'Inde. 

Cependant l'Occident est complètement mité de l'intérieur, il n'y a qu'à voir les élections en France avec trois blocs complètement hétérogènes. Je fais bien plus confiance à des empires cohérents, comme la Chine, l'Inde, ou même la Russie. Poutine a bien raison d'avancer ses pions face aux décadents déchirés que nous sommes. Je ne crois pas du tout en l'avenir de l'Occident. Plus tôt s'effondreront les États-Unis dont nous sommes les valets soumis, le mieux ce sera pour tout le monde. L'Occident ne représente que les intérêts d'une infime minorité et pas celui des peuples. La société occidentale ne laisse que très peu de choix, c'est dominer pour une infime minorité, accepter d'être dominé avec bonne humeur pour la très grosse majorité, ou alors sombrer dans le désespoir pour les dépressifs.

Ce qui est sain pour Nietzsche est de nature aristocratique, et ce qui est malade est dénaturé par le christianisme et ses avatars modernes comme le socialisme ou l'antisémitisme, pétris de ressentiment pour ce qui est supérieur - comme aujourd'hui l'islamo-gauchisme ou l'antisionisme, bref le mélenchonisme.

Ce sont les faibles qui selon Nietzsche appellent méchants ceux qui leur semblent supérieurs, par ressentiment. À la distinction gentils/méchants, Nietzsche propose de substituer la différence entre mauvais (ceux pétris de ressentiment)/bons. Les bons pour Nietzsche sont ceux qui sont le plus conformes à la nature humaine et à l'acceptation de sa cruauté intrinsèque. Pour Nietzsche les antisémites sont mauvais, les Juifs sont bons, et ces derniers apparaissent comme méchants aux yeux des faibles qui parfois s'emparent du pouvoir pour les combattre comme les nazis. Ou comme aujourd'hui tentent de s'emparer du pouvoir des franges antisémites du spectre politique de l'extrême gauche à l'extrême droite. Les méchants c'est-à-dire en réalité les bons, sont sains, ne sont pas malades. Cruauté sociale que ne supportait pas un Rousseau par exemple, en raison de son histoire personnelle ; alors que Voltaire s'en accommodait fort bien grâce à son grand esprit. L'esprit c'est une forme de cruauté qui s'exerce par la parole que maîtrisent très bien ceux qui se réclament des Juifs d'affirmation comme BHL, c'était le passe-temps favori de l'aristocratie française.

Tout groupement humain fait généralement preuve de cruauté pour ce qui sort du lot : là c'est encore un autre problème que l'aristocratie. Rousseau rêvait juste d'une société sans classes, avec un peu moins de mépris, un peu moins de haine, plus de justice, moins d'inégalités ; il se voulait l'avorteur du capitalisme naissant, dont il avait l'intuition qu'il se développerait dans la négation des valeurs de la République : liberté, égalité, fraternité. Apparemment ce n'est pas conforme à la nature humaine ! Se voulant justicier, il est peut-être finalement moins juste que Nietzsche. La vérité est cruelle !

Céline appartient évidemment à la catégorie de ceux pensant combattre les méchants, comme tout anarchiste de droite (on pense aussi à Eastwood ou Gibson), alors qu'ils combattent les bons.

Dans cette perspective-là, on peut dire que ma mère est une femme méchante, et elle s'en enorgueillit comme s'il s'agissait du contraire d’un vice, d’une vertu, alors que dans le cas d'une femme et a fortiori d'une mère, c'est une complète dénaturation. Ma mère est un pauvre type, un type dégénéré.

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