jeudi 14 janvier 2021

Taisez-vous Monsieur Finkielkraut !

Pas un mot sur Finkielkraut dans les colonnes du magazine Causeur pour l'instant. Est-ce qu'on estime qu'il ne s'agit que d'une boule puante à l'endroit de l'éminent philosophe, qui ne mérite même pas une réplique ? Ou alors peaufine-t-on longuement dans les coulisses du journal une réponse à la hauteur de l'affront ? Ou alors pense-ton que le philosophe n'a aucune excuse et qu'il est indéfendable (hypothèse peu crédible !) ?

Je ne sais pas quoi penser de la "libération pédophile" des années 70 ? Est-ce une expérience qui méritait d’être poursuivie dans un cadre bienveillant et d’une libération généralisée des mœurs jusque chez les enfants ? La libération sexuelle de toute façon a été dépassée par sa droite, le sexe comme tant d'autres activités humaines est devenue une machine à générer du profit. Et avec la pornographie la sexualité a totalement perdu son innocence. Le capitalisme corrompt tout, jusqu'aux sentiments les plus purs et jusqu'aux actes les plus innocents. La libération sexuelle a donc été récupérée par la marchandisation du monde, et chaque fantasme a trouvé sa réalisation grâce à l'industrie de la pornographie. En même temps la société s’est puritanisée, disneylandisée, et on dénonce toute forme d'abus sexuel exercée sur des femmes ou des enfants lorsqu'elle quitte le champ de l'image pornographique pour devenir réelle.

Mais où se situe la frontière du consentement ? Le tâtonnement plus ou moins fécond des années 70, la recherche de nouvelles frontières, a laissé la place à une chasse aux sorcières et à une criminalisation des comportements qui s'exerce notamment contre Polanski, Matzneff et aujourd'hui O. Duhamel, tandis que dans le domaine de la pornographie virtuelle, activité solitaire, égoïste et individualiste, tout est autorisé ; la zoophilie, la nécrophilie et même la pédophilie pourvu qu'elles soient virtuelles.

La génération des baby-boomers a détruit le dernier « père » bienveillant et responsable de la nation en la personne de De Gaulle, et n’a produit globalement que de la merde consumériste et divertissante. Normal qu’il y ait une réaction, malheureusement sans doute beaucoup trop tardive.

Les baby-boomers ont beaucoup réfléchi à leur épanouissement personnel, avec force intellectuels pour les soutenir dans leur recherche de « la beauté, de la liberté, de l’art et de l’amour » ; mais ils ont totalement laissé de côté la question de la transmission du monde tel qu’ils l’avaient trouvé, aux générations futures. D’où la crise actuelle. Je crois que cela Finkielkraut a le courage de le condamner.

Quant aux États-Unis, comme s’ils n’étaient pas impérialistes ! Et comme si les peuples qui le subissent étaient les seuls responsables de ne pas pouvoir exister par eux-mêmes.

La société s’américanise, donc se protestantise et se puritanise. Certains devraient être contents, surtout ceux que j’ai toujours connu faire l’apologie des États-Unis.

À la Renaissance, la pédophilie était évidemment condamnée formellement mais dans les faits je crois que c’était toléré. Notre époque produit beaucoup plus de « richesses » matérielles que la Renaissance, pourtant elle est très peu créatrice ; ou alors c’est du bidon, du divertissement, du temps de "cerveau disponible" pour mieux vendre de la camelote à des esprits épuisés et hébétés par le travail salarié, étant une nouvelle forme d'esclavage.

C’est en réaction à une forme de corruption de l’église catholique qui tolérait notamment la pédophilie et bien d’autres choses, en échange d’argent dans le cadre du commerce des indulgences, que le protestantisme a réagi dans un mouvement de purification morale et de puritanisme. Mais l’église catholique ne protégeait-elle tout simplement ses adeptes de la présence du mal, par la création artistique comme moyen de rédemption, ce que le protestantisme n’a jamais compris ?

Le monde s’est enlaidi depuis beaucoup plus longtemps qu’on ne le croit, et cet enlaidissement découle de la crise du catholicisme en Occident et de la Réforme ; et bien avant encore, de la chute de la civilisation gréco-romaine. Mais cela ne vaut que pour ceux qui placent l’art au-dessus de la morale pour soigner le monde de ses maux. Dans une société qui tolérait la pédophilie comme celle des Grecs anciens par exemple, elle n’entraînait aucun dégât psychique mais aidait au contraire les jeunes à s’élever à hauteur de leurs tuteurs.

Les protestants quant à eux subordonnent l’art à la morale et n’ont que faire de la grâce, pour lutter contre la corruption. Mais de nouvelles formes de corruption et de violence apparaissent quand on fait de l’argent le seul moyen de trouver son salut à la manière des protestants, comme une justice de classe pourrie comme la nôtre par exemple.

Les dégâts psychiques ne sont le fruit que de la puritanisation de la société, que je déplore, mais ils sont réels dans le cadre de notre société hyperprotégée et formatée. Donc Polanski, Woody Allen ou Matzneff sont condamnable car leurs actes ont suscité l’incompréhension et la sidération de leurs victimes. Il ne s’agit pas d’une simple chasse aux sorcières, car il y a eu de jeunes gens dont l’innocence a été bafouée dans le cadre d’une société puritaine et hygiéniste qui n’a plus la compréhension de la rédemption par l’œuvre d’art et la beauté qui s'en dégage.

L’argent de la même façon peut aider à améliorer le cadre de vie, mais ne saurait constituer à lui tout seul un moyen de salut, c’est là que ses idolâtres comme les protestants et les néolibéraux contemporains font fausse route. La rédemption est une affaire purement personnelle, et les catholiques qui pensaient la trouver dans la grâce notamment au moyen de l’art, étaient certainement plus proches de la vérité.

Dans une société comme la nôtre qui a la compréhension du salut uniquement par le confort que prodigue l'argent et une bonne situation sociale, la pédophilie est donc absolument impardonnable ; car elle vous empêche quand vous en êtes la victime d'accéder à ce genre de condition. On ne peut donc trouver aucune excuse à Finkielkraut et à sa défense inconditionnelle de tout forme de pédophilie chez ses amis de la très haute société française (notamment Polanski, Matzneff ou O. Duhamel) ; je ne l'ai jamais vu en outre, prendre la défense d'un vulgaire pédophile issu des basses couches de la société.

Cependant pour modérer mon propos sur Alain Finkielkraut (qui appartient à la génération des baby-boomers) l’appréciant par ailleurs, je dirai constatant juste que dans une civilisation comme la civilisation grecque où le Pharmakon (remède et poison) était l'art et la beauté, la pédophilie pouvait aider les adolescents à s'élever à la hauteur de leurs tuteurs ; même si en échange ils y perdaient leur innocence. Mais ne dit-on pas du tout premier rapport sexuel, qu'il déniaise ; et d'un niais qu'il est innocent ?

Dans une civilisation totalement matérialiste et laide comme la nôtre, la pédophilie bousille irrémédiablement.

Effectivement la pédophilie c'est aussi une affaire de contexte : à notre époque elle est absolument inacceptable, d'autant plus que les soixante-huitards (dans la mouvance de ce mouvement on trouve Finkielkraut mais pas Zemmour) ont trahi tous leurs idéaux d'émancipation du genre humains pour les remplacer par des valeurs consuméristes et mercantiles. Il ne s'agit pas d'un nouvel ordre moral absolu remplaçant les vieux dieux gaulliens plus tolérants d'antan, cela est un épiphénomène bien qu’il existe. Le phénomène actuel est qu'il s'agit du dieu fric régnant depuis le tournant néolibéral des années 80 ; la génération des boomers ayant été globalement dans son ensemble pédophile pendant un temps avec ses propres enfants (dans les années 70, surtout du côté de la gauche libertaire), s'est sagement rangée sous le dogme de l'économie libérale et du nouvel ordre moral, sans aucune considération pour le sacrifice qu’elle leur avait demandés.

Dans un monde sans considération pour la beauté, la pédophilie est un crime absolu : il n'y a plus que des victimes réduites à l'état de déchets consommés, quand elles auraient pu s'élever dans une civilisation plus évoluée spirituellement à hauteur de leurs tuteurs et amants, dépassant ainsi leur statut de "victimes". Je n'en démords pas malgré tous les travaux des spécialistes en neurosciences sur la psychologie de l'enfant, l'inceste, le viol, la pédophilie. C'est notre société consumériste et matérialiste qui produit des victimes en masse et cela à tout point de vue, dont l'obsolescence a été programmée, une société de traumatisés incapable de se prendre en charge, et non pas la pédophilie en soi qui est un mal absolu. C'est en cela que l'on peut comprendre Finkielkraut quand il parle d'une « société victimaire », il se place peut-être d'un point de vue gréco-latin, ou issu de la Renaissance, où effectivement il existait des adolescents consentants et reconnaissants ainsi que des tuteurs qui se donnaient pour tâche de les élever sans autre considération morale : un simple échange. Oui la vie était bien plus belle jadis, et elle a perdu en intérêt ce qu'elle a gagné en terme de sécurité et de longévité. Nous vivons plus longtemps, en bonne santé et en sécurité, dans un monde laid et d'un ennui abyssal.


1 commentaire:

  1. Le plus gros budget de l'État est la santé ; plus de 50 % des dépenses de soins de santé concerne les 6 derniers mois de vie. Et crever sous eux ... Sans compter sur leur amour immodéré des Tatars et leur soif de justice universelle ... Ah, les belles âmes ! Comme nous sommes petits, aigris et mesquins à côté d'eux. Après cela, ils s'étonnent que la morale soit tombée dans les mains de petites frappes sans scrupules. Il faut bien voir que ces petites frappes sont d'abord le résultat d'une éducation par la terreur. Notez qu'ils ont aussi oublié de transmettre la logique, la syntaxe, le vocabulaire, la religion de leurs pères et la foi en quoi que ce soit. Cela aurait pu modérer les ardeurs de nos nouveaux gardiens du temple du Bien.

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