mercredi 1 juillet 2015

Contrairement à ce que me disait mon père, l'existence est en réalité triste, longue et ennuyeuse

C'est quand même très difficile à entendre "comme la majorité des Français", cela équivaut à une condamnation : "tu as tout raté mon gars, tu n'as pas évolué." Mais qui sont-ils les autres ? quels sont tes critères pour échapper à la masse? C'est la circonstance qui fait le héros, pour l'instant ni toi ni moi sommes des modèles pour le reste de la société, tu admires peut-être plus que moi les grands modèles, mais cela ne fait pas de toi un modèle, pour l'instant tu es un petit capésien, avec son blog ; quant à la politique, excuse-moi mais ta gloire est minuscule et très locale, tu ne parviens même pas à percer dans ton propre parti : tu es un militant de base. De plus les petits-bourgeois sont très susceptibles, ils ne supportent pas qu'on leur disent leurs quatre vérités. Tu ne dois pas te faire que des amis. Autre chose j'ai perdu un "ami" d'adolescence en utilisant un ton mordant, "moussien", avec lui. La petite bourgeoisie a peut-être des qualités, mais c'est aussi un gros sac à merde plein de pulsions de ressentiment et de frustration.
Tu es en fait beaucoup plus proche de ma mère, que de moi, ma mère elle aussi admire éperdument des modèles, cela en a fait avec le temps ce que je considère comme "une pute". Pute est évidemment une expression à ne pas prendre au sens littéral, elle est dans son genre une pute d'un système qui la dépasse, qui est le petit monde de l'intelligentsia bas de gamme, parisienne, très arrogante et sûre d'elle, mais au fond assez médiocre et implacable, sans pitié pour les ratés : "la majorité des Français". Ceci dit malgré le fait que je sois un "nain social" ou pour reprendre l'expression de Nietzsche "un nain rampant", j'arrive quand même a susciter la jalousie et le désir chez des plus petits que moi.
Pourquoi j'ai peu d'admiration pour les grands hommes, les modèles ; parce que je sais au fond de moi que j'aurais dû être l'élu, mais la société ne m'a pas reconnu, tout au mieux comme autiste congénital, je me sens des affinités avec Artaud ou Van Gogh, mais même eux furent finalement reconnus comme des grands hommes ou des génie, ce qui n'arrivera peut-être pas pour moi, mais crois moi je me bats de toutes mes forces pour ça, contrairement à ce que pourraient laisser croire les apparences. Je sais je me donne des excuses : mon rapport au cannabis, ma relation avec mes parents. Mais parce que j'en suis convaincu, c'est ça qui ne m'a pas permis de saisir ma chance, c'est ça qui a abîmé mon système nerveux, et avec un système nerveux défaillant, on ne peut pas aller bien loin. L'humanité devra se passer de moi, plus que le contraire. Je pense effectivement que mon échec actuel constitue une perte pour l'humanité, plus que le fait que je doive quoi que ce soit à la société. Je ne dois rien à la société, je suis trop généreux pour ça, trop haut ; c'est la société qui doit me donner, pour me remercier de ma générosité : voilà ce que j'aurais dû être et que je ne serai sans doute malheureusement pour l'humanité (pas pour moi), jamais.
Ah ça te fait rire hein, tu dois te dire au mieux : pense-t-il vraiment ce qu'il dit ? Au pire "pauvre type", il est tellement loin de son idéal. Oui je suis vraiment très loin de ce que je fus à 15 ans, une fusée prête à être mise sur orbite, et sabotée par papa. En cela j'ai des affinités avec Arthur Rimbaud, génie trop précoce, sans doute gâté par l'absinthe, qui a détruit son système nerveux, il a vécu 2 ou 3 ans, puis il a gâché le reste de sa vie. Au moins a-t-il laissé une oeuvre et un souvenir impérissable. Nous nous battons tous pour ça Emmanuel, du plus petit au plus grand, pour l’Éternité. Tu n'as pas le droit de réduire les hommes, si médiocres soient-ils à autre chose que leur désir d’Éternité, nous nous battons tous pour ce même idéal : la vie éternelle. Maintenant, ton désir de rangement et ton ressentiment, te fait ranger les hommes dans des petites cases, dans des catégories, "petit bourgeois", "dernier homme", "anarchiste de droite, "narcissique"," hédoniste","ramolli", si cela te rassure ! 
Je suis un peu déçu de ne pas avoir réussi à "changer". Si tu savais, j'ai "changé" trop tôt à l'âge de 15 ans, très en avance sur les autres, suscitant la jalousie de mon père qui s'est amusé, car il s'est beaucoup amusé, à me démolir (papa si tu me lis je t'attends, espèce de vieille fiotte). Bon mais n'épiloguons pas je ne changerai plus, je ne parviendrai pas à la gloire et à la reconnaissance sociale, dans une autre vie peut-être !
Ce qui me définit : je me fais chier dans l'existence. Comme les friqués, les gens connus, les people et les artistes s'amusent plus ! Les intellectuels ? Je sais que c'est au fond un fardeau lourd à porter, la fille de Balibar a fait le bon choix, elle s'est allégée du fardeau paternel. Mais il y en a aussi des jouisseurs comme intellectuels, ceux-là ont l'air de bien s'amuser, les romanciers plus que les philosophes : Bruckner plus que Finkielkraut.
Napoléon n'a pas fait que prendre, il a aussi beaucoup donné à ses hommes, il leur a donné ce qu'ils désiraient : la gloire ; et les militaires l'adoraient pour cela. J'aurais aimé être Napoléon ou rien : c'est certainement une des existences les plus riches sur cette terre. Mais bon, la guerre, les morts, le prix à payer pour une telle gloire est trop exorbitant. Non finalement le mieux est d'être un artiste du style de Pasolini, qui a donné aussi beaucoup à ses acteurs non professionnels, qu'il recrutait dans les bas-fonds de la société. Il a beaucoup donné, sans tuer ; il a eu une mort assez horrible, mais au fond à la hauteur d'une légende telle que la sienne.

C'est bizarre qu'en fait considérer chaque élève comme un cas unique, avec le respect de sa différence qui va avec, aboutit à l'effet contraire de celui recherché : notre système produit finalement des clones, mais plus d'êtres d'exception, plus de génies, au mieux des gens qui ont un grand talent.

1 commentaire:

  1. En disant aux autres ce qu'on pense être la vérité, on garde tous ses amis (qui ne sont jamais très nombreux) et on perd tous ses faux amis (qui sont légion, pas seulement sur Facebook, mais aussi en politique). Et c'est très bien comme ça.

    Tes remarques sur moi sont très justes ( militant de base, gloire minuscule, simple capésien, etc), mais elles sont déformées par ton prisme petit-bourgeois, qui repose sur le besoin de reconnaissance, totalement étranger à ma psychologie (sinon, je m'y prendrais autrement pour "réussir" au sein du PS, dont je connais parfaitement les codes de sociabilité).

    Oscar Wilde, de mémoire, disait ceci : "l'ambition, c'est le dernier refuge des ratés". A cette différence que le beau mot d'"ambition" me semble bien supérieur à ce que Wilde en réalité moquait, et qui est en effet méprisable : le besoin de reconnaissance, passion petite-bourgeoise par exemple.

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