samedi 21 juillet 2018

Manifeste pour un socialisme conservateur en rupture totale avec la gauche libérale



Concernant l'homme moyen des sociétés occidentales, l'homo œconomicus, son impolitesse et son agressivité caractéristiques, ne sont peut-être que l'expression de la volonté de puissance à l'œuvre dans la métaphysique du sujet si je vous ai bien compris (il s'agit encore d'un interlocuteur du forum du magazine Causeur). Sans compter que cette volonté de puissance trouve sa pleine expression à notre époque, qu'elle s'exprime effectivement d'avantage qu'il y a 50 ans et qu'il y a fort à craindre qu'elle ne s'exprime encore plus dans 50 ans. Un slogan de mai 68 proclamait, "cours camarade, le vieux monde est derrière toi !", il faudrait le remplacer par la mise en garde suivante : "ralentis mon ami, le monde de la Silicon Valley est devant toi !". Il y a tout lieu d'être pessimiste, à moins que l'on n'infléchisse la courbe de son développement, et avec lui du nihilisme.
Il n'est pas question de créer un homme nouveau, bien au contraire, mais de renouer avec les solidarités entre les hommes. L'homme est naturellement un « animal » social, c'est la construction idéologique libérale qui le considère comme un Robinson seul sur une île déserte, capable de se construire lui-même à la façon d'un self made man, qui en a fait un atome isolé au sein de la société (la fameuse guerre de tous contre tous n'est pas un mythe mais une réalité). Or cette conception pauvre et pessimiste de l'homme figure bien dans les prémisses de l'idéologie libérale, à travers les écrits de ses premiers fondateurs.

Je vois les religions comme des formes primitives de socialisme, ce sont bien des principes d'intersubjectivité qui placent la relation plutôt que la conduite égoïste au cœur de leurs principes, seuls susceptibles de nous transcender et énoncés dans les religions, qui devraient dicter notre conduite. Et en France la religion qui a permis la construction du pays fut la religion catholique, pourquoi en changer ?
La religion musulmane est dangereuse pour l'Europe et le monde entier d'ailleurs, car elle se transcende dans la conquête et la persécution des mécréants. La religion catholique se transcende plutôt dans la création artistique, il n'y a qu'à voyager un peu en Europe, et admirer toutes les créations du passé pour s'en rendre compte.
Mais l'on s'aperçoit aussi à l'œil nu des dégâts du libéralisme, qui ébranle les fondements de tout ordre stable, sape les communautés traditionnelles, ruine la morale usuelle. De plus la cadence infernale imposée par le libéralisme ne permet plus de s'en rendre compte sereinement et de façon détachée d'autant plus chacun d'entre nous est juge et partie du système, comme vous même l'admettez, par "dressage" dites-vous.
Pour s'y adapter, et l'on a fait de l'adaptation la condition naturelle de l'homme, alors qu'il s'agit d'une construction idéologique qui est le darwinisme social, l'homme dont la seule justification aux efforts consentis est de rester compétitif, dispose de la seule raison à l'oeuvre qui est la raison hypothétique (pour arriver à faire ceci il faut faire cela, ou encore atteindre des objectifs de la meilleure façon possible en fonction des contraintes, et pour les plus cynique "la fin justifie les moyens", comme de mentir, sacrifier autrui, voire tuer pour s'enrichir), la raison pratique ou morale (il faut faire ou ne pas faire ceci ou cela) est absente.
En outre notre époque devient de plus en plus stérile sur le terrain de la création, puisque le projet indépassable qu'elle s'est fixée est l'enrichissement exponentiel pour l'enrichissement exponentiel (qui ne profite au passage qu'aux renards dans le poulailler, ceux que vous vous refusez de stigmatiser, les riches et les puissants), la croissance et l'innovation pour la croissance et l'innovation, cela évidemment au détriment de tous les équilibres environnementaux et anthropologiques, de la morale, de la philosophie, de l'architecture, de l'art, de la politique (désormais soumise à l'économie). N'oubliez pas non plus le protestantisme et encore plus précisément le calvinisme que je vois à l'origine de l'idéologie libérale, qui avait fixé comme signe d'élection et donc de salut spirituel, l'enrichissement personnel, et condamnait la dépense (qu'elle soit sexuelle ou financière sauf concernant l'investissement permettant de s'enrichir encore plus), ce qui a donné le puritanisme anglo-saxon qui s'est pleinement épanoui en Amérique du Nord..
Je suis d'accord qu'il n'y a pas de différence de nature entre les pauvres et les riches, qu'ils sont empreints du même nihilisme se caractérisant par la volonté de puissance, même si le comportement des riches est bien plus immoral que celui des pauvres, ne serait-ce que parce qu'ils devraient montrer l'exemple, ce qu'ils ne font pas, c'est même tout le contraire.
Les choses se sont notablement aggravées depuis que la révolution culturelle des sixties a convergé avec la révolution économique des années Reagan. L'hédonisme : l'idée de plaisir comme mode de vie, est devenu la justification culturelle, sinon morale, du capitalisme

Il s'agit dans l'optique d'un penseur comme George Orwell, aujourd'hui d'un philosophe comme Michéa qui s'en inspire, de renouer avec la nature profonde de l'homme, et non pas de créer je ne sais quel « homme nouveau ». Le communisme a lamentablement échoué en voulant vaincre le libéralisme sur le même terrain de l'économie que lui, par la guerre économique contre le monde occidental, en favorisant le développement des moyens de production au détriment d'ailleurs de tout projet de redistribution et donc en sacrifiant le peuple, puisque c'est une nomenklatura qui s'est octroyé tous les bénéfices et les privilèges sans du tout tenir compte des aspirations au bonheur du peuple, ce qui était pourtant la vocation initiale du communisme.

Michéa, dont je m'inspire beaucoup mais qui ne constitue pas non plus une icône ou un homme providentiel, bataille contre l'idéologie libérale et tout ce qu'elle renferme, devenue obligatoire, qui nous contraint à considérer favorablement toute nouveauté et à mépriser le passé, à vivre sans héritage ni horizon de sens partagé. Pour lui, c'est la modernité elle-même, avec sa consommation frénétique d'un présent perpétuel, son agitation stérile et sans direction, qui est le couronnement du libéralisme.

Mais si c'est toute la gauche qui doit être taxée de "libérale" - et Michéa y inclut Toni Negri et Alain Badiou ! (effectivement Badiou voit d'un bon œil le développement du capitalisme pour créer un homme nouveau qui brisera ses chaînes le moment venu : le damné de la terre d'origine musulmane) - comment sortir du libéralisme ? Qui pourrait bien se rapprocher de l'idéal d'un socialisme qui serait du côté de "la décence des gens ordinaires" prônée par Orwell - et non de la transgression esthète des normes et de la négation des valeurs ?
L'homme n'a pas d'autre choix que de renouer avec la transcendance, se surpasser dans la création pour accéder au divin, c'est ce qui fait le propre de l'homme, nous caractérise et nous distingue des autres animaux selon moi.
Le socialisme peut ne pas être contradictoire avec ce projet là, à condition que ses promoteurs soient de bonne foi, ce que ne furent jamais les socialistes français qui furent majoritairement des libéraux de gauche, depuis la Commune de Paris (qu'ils ont participé à durement réprimer) et a fortiori depuis le tournant libéral des années 80, et l'alignement de la politique de Mitterrand sur l'idéologie néolibérale thatchéro-reaganienne.

Il s'agirait selon moi de promouvoir un socialisme conservateur ne tirant pas un trait sur le passé, mais s'en inspirant afin de faire revivre toutes les formes de transcendance et de solidarité susceptibles de nous faire renouer avec notre condition humaine.

4 commentaires:

  1. Hello, I log on to your blog daily. Your humoristic style is
    witty, keep it up!

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    1. Hello dear man (or woman) of mystery « ? ». If you speak to me like that in English, is it a sign of election, gratitude (recognition) ? Be you the ghost been reincarnated of George Orwell ? Or a mediator between him and me ?

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  2. C'est une réflexion intéressante qui permet de valider la théorie de Nietzsche sur la morale du ressentiment. Ce qu'il dit est intéressant mais Nietzsche reste un iconoclaste quand même. Oui la morale du ressentiment donc dans le christianisme puis au fond, le socialisme. C'est assez flagrant quand dans le texte vous dites "vous refusez de stigmatiser les riches et les puissants". Ma question est vous voulez les stigmatiser parcequ'ils sont riches et puissants où parceque certains, pas tous pourraient avoir (comme certains pauvres) des comportements critiquables ? Êtes-vous dans l'essentialisation à ce moment là d'un bouc émissaire de tous nos problèmes ? Sinon le socialisme certainement avec le péril qui nous attend mais convenez qu'il n'y a a ce jour aucune personnalité qui pourrait porter un projet crédible de transformation radicale. Ça n'est pas melenchon, paranoïaque vociferant qui peut porter un tel projet où il sera important d'avoir un vrai discours raisonnable et non contestable. Autre point également. Vous faites de l'islam une religion guerrière et ma foi j'en suis d'accord quoiqu'on en pense. Mais notons que les conversions criminelles d'Amérique latine n'ont pas été du fait des musulmans. Et que de fait la religion quelle qu'elle soit peut tantôt servir tantôt asservir.

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    1. Les riches sont globalement plus immoraux que les pauvres ou même l'homme moyen, c'est normal des moyens plus grands engendrent un appétit plus grand, ils sont totalement éloignés de toute décence commune. Leur enrichissement est désormais totalement déconnecté de la réalité, le plus riche possède à lui tout seul l'équivalent du PIB d'un pays comme la Bulgarie, voire deux fois le PIB de la Bulgarie, enfin peu importe, cela donne le vertige. Nietzsche qui est un philosophe stimulant que j'apprécie a dit aussi pas mal de conneries, c'est normal il a tout dit... et son contraire... Pour lui le moyen d'échapper au nihilisme est la volonté de puissance, alors qu'en réalité la volonté de puissance constitue le nihilisme contemporain lui-même, ce nihilisme qui constitue bien le destin de l'Occident.

      On ne va quand même pas continuer à être les esclaves de riches qui continuent à s'enrichir en milliards de dollars sous prétexte que lutter contre, constituerait selon Nietzsche une morale du ressentiment ! C'est quoi la morale de Nietzsche ? « Laissez vous tondre par les riches et les puissants, parce que ce sont des forts et qu'il faut protéger les forts du ressentiments des faibles » ? D'ailleurs sont-ce vraiment des forts ? Ne sont-ils pas animés d'un ressentiment envers toutes les traditions et coutumes qui généraient de la beauté sur terre par le biais de l'art, en remplacement duquel ils ont suscité des vocations au sein de l'art contemporain, un art qui effectivement flatte l'instinct de prédation de psychopathe, qui est bien le caractère dominant d'un riche ou d'un puissant.

      Il ne s'agit pas d'essentialiser les riches et de les bouc émissariser, mais de leur mettre un frein et de les faire redescendre sur terre, car ce sont aussi eux qui sont aux manettes de l'économie et imposent leurs diktats aux Etats désormais moins puissants que des multinationales. Et puis les riches et les puissants donnent un très mauvais exemple au reste de la population, qui n'a plus comme désir que de leur ressembler.

      Au passage la petite bourgeoisie est également totalement corrompue par des valeurs mercantiles, Nous sommes tous au mieux des petits bourgeois qui "sentent mauvais" (au pire de la racaille violente), au ras du caniveau de nos petits désirs mesquins et sales qui reflètent une volonté de domination sur autrui alors qu'il s'agit toujours d'une illusion, et de notre misérable volonté de puissance globalement homicide. Les valeurs qui devraient dominer la société devraient être des valeurs de décence commune d'origine populaire, et non des valeurs de prédation propres aux riches et aux puissants.

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