dimanche 1 janvier 2017

La servitude volontaire


Et toi, tu te définirais comme le "justicier" de la société, donc de la "morale commune" contre l'affreuse Le Pen ? Tintin, Batman ou Zorro ? Mais penses-tu qu'il y a encore une morale commune dans une société convertie aux valeurs de l'ultra libéralisme, et où les gens dans leurs rapports entre eux ne manifestent plus la moindre "décence commune", pour reprendre une expression d'Orwell ? Personnellement concernant les "autres", au fond je m'en fous, comme tout le monde. Mauvais calcul d'ailleurs, car si tous mes compatriotes étaient contaminés par la peste je le serais aussi un jour ou l'autre. D'autre part la "peste" idéologique du libéralisme et sa propagande publicitaire en premier lieu, commencent aussi à contaminer la planète entière au niveau de l'environnement. Attendons-nous à des catastrophes climatiques de plus en plus fréquentes, car il est hors de question pour chacun de nous pris séparément, de remettre en question d'un iota son "sacro-saint mode de vie".
Mais là où cela m'embête le plus, c'est quand je constate la "contamination" au sein de ma propre famille, où les gens ne se parlent plus, et se comportent désormais comme des "seigneurs", mais de l'époque du Moyen-Age, avec de grosses "armures idéologiques" pour se défendre de leur prochain au sein même d'une société dite "ouverte" (Karl Popper). Comme des "seigneurs" ("saigneurs" du fondement anthropologique humain et de la planète en réalité), quand ils ont ce que Bourdieu appelle le "capital symbolique" qui leur permet de faire valoir toute leur vanité et leurs prétentions narcissiques. Mais il vaudrait mieux dire qu'ils se comportent comme les prêtres qui répandent une idéologie, nous allons voir au service de quels "seigneurs"...
Mais reconnaissons que ce sont ceux qui ont le capital financier et qui sont le plus souvent liés à ceux qui détiennent le capital symbolique, (ces derniers leur apportant la caution morale à leurs actes de destruction), qui sont dans un passage à l'acte d'un processus de dépersonnalisation et de destruction des individus, mais également dans un schéma de destruction de la planète entière au nom du profit. Ceux qui ont le capital symbolique sont un peu les prêtres de la société sous le règne de l'économie de marché, et ceux qui ont le capital financier en sont les seigneurs guerriers (pour reprendre une image empruntée au Moyen-Age). Pour ma part je préfère dire les "saigneurs" (dont les "simples gens" et la planète, sont les victimes).
Deuxième alternative dans ma famille notamment, les gens ont été démolis par les valeurs libérales d'individualisme et d'égoïsme que la société nous impose d'en haut : c'est évidemment le cas le plus fréquent, car la "réussite" est l'exception et suppose forcément le sacrifice d'un tiers, le plus généralement des parents qui en retirent une gratification narcissique.
Je tiens à ajouter que la société ne tiendra plus longtemps avec de pures valeurs d'égoïsme et d'individualisme pour la soutenir, malgré le "calcul" de nos théoriciens libéraux (les Minc et les Attali, mais il y en a tellement d'autres... en général la majorité de ceux qui détiennent le "capital symbolique", et qui sont dans une démarche de servitude volontaire, et de pétainisme idéologique, face aux valeurs de l'économie de marché) du "cercle de la raison". Ces derniers naïvement ou cyniquement (pour réussir aujourd'hui, en période de compétition globalisée, il vaut mieux être cynique que naïf), font confiance à "la main invisible" pour retirer des vices particuliers de chacun mis bout à bout, une forme de bénéfice et de gratification idéologique et purement théorique, car vérifiée nulle part, résidant dans une vertu collective à l'échelle mondiale, et donc selon eux in fine, résidant dans le "bonheur des peuples" (qui n'existe en réalité nulle part aujourd'hui, alors qu'hier davantage...).
Ou encore troisième alternative dans ma famille, les gens se comportent moralement comme des "prostitués," qui ne donnent leurs attentions qu'à ceux qui représentent le pouvoir, quelle que soit sa manifestation ou son expression.
Quelle que soit la façon dont on retourne le problème, il faut le dire, le répéter, le marteler... Non le vice individuel, l'égoïsme et l'individualisme de chacun mis bout à bout, n'aboutira jamais à une prospérité collective apte à assurer le bonheur des peuples. Puisque aujourd'hui la prospérité financière n'est même pas redistribuée, mais ne profite qu'aux plus riches qui s'enrichissent outrageusement (les 62 personnes les plus riches détiennent autant de richesses que la moitié la moins riche de la population mondiale). Ensuite parce qu'un vice à l'échelle individuelle comme l'égoïsme, resterait un vice même si il aboutissait à un enrichissement collectif. Car une tare morale reste une tare morale, et cette tare aujourd'hui submerge le monde de ses méfaits. Ce n'est pas la prospérité, ni même l'immigration qui nous submerge en réalité, mais c'est notre propre égoïsme individuel mis bout à bout à l'échelle du globe.
La réforme des consciences nécessaire, doit avoir au contraire pour racine chaque individu c'est-à-dire chacun de nous, qui doit se faire plus solidaire avec son prochain, penser plus "collectif", si nous voulons "changer le monde", et en réalité bien plus modestement si nous voulons que le monde ne disparaisse pas. Sous les coups d'une part du changement de paradigme anthropologique qui consiste en une dépersonnalisation collective des êtres humains, par des conditions de travail de plus en plus inhumaines (dont le conflit autour de la plateforme Uber, constitue un bon exemple). D'autre part pour que le monde ne disparaisse pas sous les coups des dérèglements climatiques, dont nous voyons aujourd'hui les prémisses, mais qui seront bientôt non maîtrisables.
Si nous voulons que les choses changent, car nous en mesurons désormais l'urgente nécessité, nous devons changer tous et individuellement, mis bout à bout collectivement. Mais comment un tel miracle serait-il susceptible de s'opérer ? 
Je laisse la question en suspens, et je recherche des solutions pour moi-même que je ne suis même pas sûr d'avoir trouvées, avant de faire la leçon aux autres ; mais il est évident que cela doit commencer par une rupture radicale et définitive avec les valeurs imposées d'en haut par le libéralisme. Car ce ne sont tout simplement pas des valeurs démocratiques (c'est-à-dire ayant pour racine un fondement anthropologique, reposant sur des émotions de liberté, d'égalité ou de fraternité réellement ressenties), mais aujourd'hui pré-totalitaires et demain complètement totalitaires, avec le consentement des peuples à leur servitude volontaire.
L'égoïsme n'est pas la base de la nature humaine. C'est une erreur de raisonnement des premiers penseurs libéraux, qui nous a conduit à la situation aporétique dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Les penseurs des "véritables" Lumières (en excluant Adam Smith, ses précurseurs et ses héritiers) avaient raison, la base de la nature humaine se trouve dans des émotions de liberté, d'égalité et de fraternité, réellement, c'est-à-dire démocratiquement ressenties pour qu'elle trouve à s'épanouir.


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