mardi 7 juin 2011

Pourquoi certains profs peuvent modifier votre vie?

J’ai connu dans ma carrière d’étudiant en philosophie, une prof. Ce qui m’a frappé de prime abord c’est sa bonté. Pour elle et sa bonté, j’ai consenti à des efforts inouïs, que je n’aurais jamais faits si elle avait mis d’abord en valeur son intelligence. Intelligence et culture qui sont pourtant chez elle immenses. Mais elle ne la ramenait pas pour ne pas nous inhiber.

Elle mettait avant tout en avant son fond naturel : un fond compatissant et bon.
Je crois que ça doit être ça un bon prof, quelqu’un qui ne la ramène pas trop avec son intelligence, quelqu’un capable aussi parfois de se mettre au niveau de ses élèves, pour les aider ensuite à mieux s’élever. L’intelligence et la culture peuvent provoquer la jalousie et l’envie chez l’élève, alors que si vous mettez en avant la bonté, si vous êtes capable de compatir aux souffrances des élèves, alors ils vous suivront partout. Plus difficile à mettre en œuvre en terminale, où certains élèves sont déjà quasiment des petits salauds bourrés de certitudes, et qui sont là pour faire la peau du maître, surtout si ce dernier est engagé et ne cache rien de son engagement.

En tout cas, ce qui me frappe chez cette prof, c’est qu’elle s’est mise à écrire vraiment à partir de sa retraite. Je l’ai lue et  je crois que si j’avais connu l’étendue de sa culture et de son intelligence et même ses opinions, je n’aurais pas pu faire autant d’efforts pour elle. D’autant plus qu’elle a des opinions très tranchées et très radicales d’un point de vue idéologique : pas du tout ce qu’elle nous montrait en cours, où elle semblait parfois hésitante, voire hébétée, elle avait aussi des talents de comédienne et savait nous faire rire. Quelquefois elle nous sortait : « oh vous savez Hegel j’y comprends rien » et d’autres phrases du même tonneau qui avaient l’air de traduire une complicité où elle se mettait au même niveau que nous, nous autres pauvres étudiants qui avions du mal à comprendre Hegel dans le texte. En réalité elle connaissait évidemment par cœur Hegel et le comprenait peut-être mieux que Hegel ne se comprenait lui-même (ceci dit elle ne le comprenait pas peut-être au sens où elle ne partageait pas ses opinions, ce que je viens de réaliser après coup), et tous les autres philosophes d’ailleurs, du plus facile au plus ardu.

Ceci dit je pense qu'elle a voulu m'aider à un moment, et que je n'ai pas su saisir ma chance. Pour que la vérité sorte, j'ai du me faire violence, et faire violence aux autres. Une telle violence! Insupportable pour les autres. On peut dire que durant ma carrière d'étudiant en philosophie j'ai accouché d'un enfant mort-né et dans la douleur en plus!

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