dimanche 28 janvier 2018

Réactions d'un poète philosophe à mon dernier billet sur la question de la technique


Le poète philosophe : « Ouf ! Bravo ! Belle récitation ! J’ai beaucoup aimé Hawking et le réchauffement climatique ! Vous avez quand même oublié les rendements décroissants, ce n’est pas très sérieux.
Sinon, je vous mets un B+, encore un effort et vous allez atteindre la perfection du psittacisme anti-libéral, maintenant essayez l’antithèse : démontrez en termes ronflants et éculés que le libéralisme est l’avenir de l’humanité. »

Moi : « Vous voulez la synthèse en même temps ? »

Le poète philosophe : « Oui, ce serait bien, et n’oubliez pas Heidegger et l’autonomie de la technique, c’est pas mal non plus. »

Moi : « Si vous voulez bien éclairer ma lanterne sur ce que vous vous en avez compris de l'autonomie de la technique, on pourrait partager nos impressions... »

Le poète philosophe : « Inutile, vous avez bien compris qu’il n’est pas question ici de réfléchir mais de réciter. »

Moi : « De toute façon je croyais que Heidegger était définitivement hors-jeu, à cause de ses « cahiers noirs », non ? Alors pourquoi le citer ? Pour m'attirer dans un piège. Les ficelles sont trop grosses, désolé ! J'apprécie évidemment ce philosophe, mais les boules puantes que l'on a lancées sur sa mémoire, en font un pestiféré posthume. »

Le poète philosophe : « Tout le monde n’est pas Farias ou Faye, et Heidegger pour avoir été une belle crapule n’en était pas moins un grand philosophe, mais peu importe, si on fait référence à Nietzsche on peut se permettre Heidegger. »

Moi : « Nietzsche est davantage poète que philosophe, ou tout du moins les deux en même temps, on peut donc beaucoup plus lui pardonner qu'à Heidegger. De toute façon vous aurez bien compris qu'à la limite je préfère Schopenhauer à Nietzsche. Nietzsche est certainement supérieur à Schopenhauer au niveau de l'interprétation que l'on peut faire de l'absurdité de la vie. Mais pour les interprétations que l'on a pu faire de Nietzsche, ce dernier est critiquable, car beaucoup plus dangereux, d'ailleurs n'a-t-il pas affirmé qu'il faut vivre dangereusement ? Je crois effectivement qu'Hitler avait lu Nietzsche et qu'il s'en est inspiré pour en faire une singulière interprétation, tout comme mai 68 en constitue aussi une interprétation. Nietzsche est sans doute trop riche, trop divin, pour la plupart des médiocres mortels que nous sommes. »

Le poète philosophe : « Et Heidegger, ami de René Char, grand poète et grand résistant, ne voyait pas d’autres issues que la poésie ou un Dieu pour sortir de la crise. »

Moi : « Tenez j'ai apporté une petite modif à mon long développement psittaciste : Le nouveau dogme a connu un coup de fouet sous l'ère Thatcher/Reagan et semble être à son apogée (mais il peut en réalité encore "mieux faire"), c'est-à-dire que son aspect globalisant/totalisant est en train de séduire et de convertir la planète entière sous son "emprise" sans aucune autre alternative possible, plus que sous son "empire" d'ailleurs. Car la séduction qu'il exerce se fait dans l'intimité de chacun, dans ce que chacun a de plus profond en lui, et non pas seulement de façon superficielle comme les régimes totalitaires comme le nazisme ou le stalinisme, contre lesquels on pouvait toujours résister par les armes ou bien par l'esprit (la vie intérieure). »

Le poète philosophe : « Mais justement vous tenez là votre antithèse, la technique n’exerce-t-elle pas cette même fascination ? Le libéralisme est soumis aux mêmes terribles pressions que les autres idéologies. Comment disait-il déjà ? "la mécanisation de la Wermacht est un acte métaphysique" (si je me souviens bien) »

Moi : « Fascination ne veut pas dire adhésion, et j'y résiste de toutes mes (humaines trop humaines) "forces", conscientes en tout cas. Puisque je sais que je suis dévoré de l'intérieur par la fascination du progrès technique, comme à peu près tout le monde, sous peine d'ailleurs de périr. C'est plus une fascination encore qu'une adaptation à un milieu, car le progrès est séducteur, et nous range sous son emprise. Comme une drogue il provoque accoutumance et processus de sevrage. »

Le poète philosophe : « C’est la drogue du néotène ! C’est notre quête insatiable depuis toujours, l’écriture, puis la presse, puis Internet, ça s’accélère c’est tout. Bien sûr que nous adhérons : serions-nous là sinon ? Nous sentons simplement que ça nous échappe et que de ce fait un danger inédit nous menace. »

Le poète philosophe : « Vous êtes trop méfiant, mon propos est tout autre. Ce que vous reprochez au libéralisme est à mon sens hors de propos. On peut toujours trouver en germes toutes les explications que l’on veut dans dans les origines des idéologies dominantes. Le romantisme a engendré le nazisme et Hegel le communisme. Ce que vous attribuez au libéralisme pourrait être attribué à la métaphysique occidentale toute entière. Ne serait-il pas temps de sortir des anathèmes et réfléchir à ce qui nous arrive sans chercher des responsables occultes. Attali est bien sûr à l’abri du besoin mais est-il à l’abri des courants de pensée qui nous dominent tous.
La volonté de volonté est-elle spécifiquement libérale ? »

Moi : « Ce que j'apprécie effectivement c'est d'essayer de remonter toujours le plus haut possible dans une chaîne de causalité. Après la cause première du bien ou du mal sur terre, on ne la trouvera jamais, elle est comme une petite source qui depuis bien longtemps s'est perdue dans les sables d'un vaste désert.
Il y en a qui disent aussi que c'est Hegel qui a engendré le nazisme (à cause de sa pensée dialectique de l'histoire), et je verrais plus Marx à l'origine du communisme, même si la pensée de Hegel fut à l'origine de celle de Marx, c'est exact. Mais un messianisme d'origine judéo-chrétienne peut aussi être à l'origine du messianisme communiste, et la pensée judéo-chrétienne (j'appelle pensée judéo-chrétienne l'alliance du nouveau et de l'ancien testament, même si on l'a vu par l'expérience, judaïsme et christianisme sont rarement compatibles, c'est-à-dire conciliables, et aujourd'hui réconciliables) peut aussi être à l'origine de toute la métaphysique occidentale. Qu'est-ce qui alors est à l'origine de la pensée judéo-chrétienne ? Et s'agit-il d'une pensée ou d'une croyance ? »

Moi : « Il se trouve qu'en ce moment nous vivons sous un régime libéral-libertaire totalisant selon moi, car sans alternative audible en tout cas et possible. Et c'est cela le danger, cette absence d'alternative, car la démocratie repose sur la pluralité des partis politiques en matière d'idéologie, l'alternative fournit un espoir à ceux qui se sentent opprimé par un régime quel qu'il soit. Le fait est qu'aujourd'hui il n'y a plus qu'une seule idéologie dominante, puisque toutes les autres sont systématiquement discréditées ; c'est le libéralisme libertaire
Quant il n'y a plus d'alternative politique à un régime, il ne reste que la colère et le désespoir, et l'histoire nous a montré où cela pouvait mener. Les interpétations les plus folles de telle ou telle idéologie peuvent alors avoir libre cours, et c'est alors que s'opère la recherche de bouc-émissaires, et le développement contemporain d'un phénomène comme la pensée complotiste ou théorie du complot.
C'est bien parce que je cherche plus haut dans la chaîne des causes une éventuelle responsabilité, que vous ne pouvez pas me réduire à quelqu'un qui formule des anathèmes et qui ne réfléchit pas à ce qui nous arrive en cherchant des responsables occultes
Attali surfe sur une vague dont il n'est aucunement l'initiateur, mais c'est vrai aussi que depuis les années 80, il joue un rôle prépondérant en matière de communication et de stratégie, dans l'élection de certains présidents. On dit même que c'est lui qui aurait choisi Macron, ou bien Minc, alors que le jeune homme ne se destinait nullement au métier de président. »

Moi : « Houellebecq aussi ne voit qu'un Dieu pour sortir de la crise. Mais qui dit Dieu dit religion et on repart dans la même chaîne de causalité avec tous ses massacres liés à l'intolérance. C'est pour cela qu'il vaut mieux faire confiance au passé et aux religions déjà existantes et qui ont fait leur preuves (en bien ou en mal d'ailleurs), la connaissance du passé et non pas son abandon pur et simple au nom du progressisme et du politiquement correct, peut structurer les nouvelles générations sur l'expérience des ancêtres ("l'humanité est faite de plus de morts que de vivants"), plutôt que sur un avenir incertain qui fait fi de tout passé et de tout héritage.
Et je dirais même plus, dans le grand sac où je range pêle-mêle les "responsables" de la crise, et là je me rapproche pour moi, dans ce qui est de l’ordre de mon vécu de l'origine de la "crise" (mon "expérience intérieure" de la crise comme la qualifie Bataille) ; disons qu'il y a mes parents, les amis de mes parents et leurs amis, et les amis des amis de leurs amis etc.
Bref presque tout le petit microcosme bobo parisien baby-boomer, et maintenant leurs enfants, mais ces derniers sont incapables de s'entendre et se font la guerre, faute d'une morale commune. Faute d'une spiritualité ou vie intérieure commune. Il y a bien quelques petits malins qui croient faire l'unanimité et qui pensent qu'ils vont s'en sortir comme ça, sur le culte de leur personnalité à l'égard de leur entourage. Mais personnellement je n'y crois pas trop, aux leaders grandes gueules, qui aujourd'hui font un peu la loi partout de la famille au monde du travail et jusque dans la politique. En l'absence de vie intérieure commune, c'est-à-dire en l'absence de spiritualité en commun, l'avenir de la France c'est l'islam, si nous n'y prenons pas garde... » 

La prof : « Je ne connais pas ce genre de microcosme en général et parisien en particulier. Quant à l'épouvantail islam, je pense que notre pays a assez de ressources intellectuelles et matérielles pour ne pas tomber dans la "soumission". Les enclaves islamistes peuvent être neutralisées, en premier lieu par l'éducation si l'état y met les moyens nécessaires. Cela arrivera fatalement quand les Français commenceront à exprimer leur raz-le-bol de façon plus pressante en espérant de ne pas tomber dans une violence stérile. »

Le poète philosophe : « Oui, bien sûr, le monde occidental traverse une crise profonde, mais dire que cette crise est due au libéralisme est dangereusement réducteur. On a l’impression de se retrouver deux siècles en arrière avec les mêmes arguments des romantiques contre les Lumières : vous apportez la division, l’appartenance à un peuple n’est pas de même nature que l’appartenance à un club, etc. Pour ce qui est de l’anathème, pardon, mais invoquer le réchauffement climatique et les données bidonnées du GIEC, ça se pose un peu là. Ce n’est de toute façon pas le libéralisme qui est en cause mais notre nature profonde : nous transformons notre environnement depuis toujours. Ce n’est pas moi qui vous réduit à quoi que ce soit, mais bien plutôt les stéréotypes que vous avez employé. Nous savons tous qu’il y aura toujours des gens avides, mais est-ce bien le fond du problème ? À utiliser sans cesse ce terme de libéralisme à toutes les sauces nous ne savons plus de quoi nous parlons. Quant à la rage impuissante, elle ne vient pas tant du fait qu’il n’y ait pas d’alternative idéologique que du nihilisme pur et simple. C’est de spiritualité que nous manquons, pas d’alternatives politiques. Le plus grand mouvement romantique en Occident, c’est effectivement le jihadisme, cela devrait nous interpeller(comme on dit). La chaîne des causes est sans fin, c’est une aporie connue, et c’est justement le vertige qui nous prend quand nous la considérons qui est notre véritable problème, nous qui ne considérons que la raison.
Est-ce vraiment en abattant le libéralisme que nous allons surmonter cette crise ? »

Moi : « Oui j'ai les mêmes arguments que les romantiques car mes ancêtres ont réellement été persécutés par les bleus, les sans-culottes, les révolutionnaires ; et que le mouvement romantique puise peut-être certaines de ses racines en Bretagne. Cela a provoqué un traumatisme dans ma famille, qui par un déni profond et totalement inconscient et injuste de la part de ma génitrice (qui a pris fait et cause pour la bourgeoisie de façon quasi fanatique et surtout totalement inconsciente dans tous les sens du terme), a provoqué le rejet de son traumatisme sur la génération d'après pour s'en prémunir, remontant ainsi jusqu'à moi (le traumatisme). Voilà pour l' « expérience intérieure » et la psychanalyse. Il s'agit de sa part de quelque chose comme le syndrome de Stockholm : elle a pris le parti de ceux qui l'ont pris en otage et lui ont fait oublier que leurs ancêtres avaient massacré les siens. Je ne développerai pas plus avant, vous avez bien compris la teneur du problème. Mais vous allez me dire que mon argument auto-justificatif est lui-même empreint de romantisme !
Pour ce qui est de rejeter la responsabilité du développement des techno-sciences qui nous aliènent en même temps qu'elles nous fascinent, sur le libéralisme... oui peut-être que j’exagère. La technique est protéiforme, et elle a pris le masque du libéralisme comme elle aurait pu prendre un autre masque, celui du communisme par exemple. Je veux bien que ce soit par la spiritualité que l'on puisse le mieux s'opposer à la « volonté de volonté », j'adhère à cette idée. Mais comment comptez vous vous y prendre et que proposez-vous ? Une réconciliation des juifs et des chrétiens pour faire la peau des islamistes qui menacent notre belle civilisation ? »

Le poète philosophe : « Je n’en sais rien malheureusement, je fais comme vous je demande à ceux que je rencontre. Ce qui est encourageant, c’est que d’une façon ou d’une autre de plus en plus de gens se posent la question. »

Le militant de la « France insoumise » : « Moi aussi j'aimerais réagir à votre dernier billet. Il n'y a pas de judéité dans la culture française. L'impact des juifs est anecdotique.
La culture française est sur des bases chrétiennes. Point. Les religions sont soit l'outil du pouvoir, soit le pouvoir. Avec l'évolution sociale, l'instruction et la culture, en Europe, tout du moins en France, de moins en moins de gens croient à leurs balivernes. Ayant moins de "fidèles", elles ont perdu pas mal de pouvoir.
Même si l'arrivée de l'islam donne un coup de fouet aux 2 autres. Mais c'est passager. Reagan et Tchatcher était des pratiquants et c'est au nom de leur religion qu'ils appliquaient un libéralisme sordide. Les religions ont un discours qui ne correspond pas aux actions de la nuée d'hypocrites et de parasites qui vivent sur la bête. Tout bon chrétien devrait être un partisan de la "vraie" gauche. Alors que dans les faits....
L'ultralibéralisme n'est que la continuité de l'hypocrisie des religions. Quant à Hawkin, ce pauvre fou croit, dur comme fer, aux extraterrestres dont il envisage sérieusement l'arrivée imminente car il espère que leur technologie permettra de le guérir..... Pathétique en fait. Alors, ses divagations sur l'avenir de l'humanité et de la planète n'ont pas plus de poids que celles de n'importe qui !
Plus précisément, n'importe qui ne dirait pas des âneries comme les siennes car en prenant l’hypothèse que l'accroissement de la démographie serait linéaire et équivalente à celle de ces 50 dernières années, dans 600 ans, la terre porterait 60 milliards d'humains. »

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