mardi 16 juin 2015

Michel Onfray et Sade

Voilà Onfray n'aime pas Sade, parce que c'était réellement le même homme que ce qu'il décrit dans ses livres, Sade a violé torturé et même peut être tué profitant de ses privilèges de noble qui avait tous les droits dans la France de l'ancien régime, Sade est quand même allé en prison avant la Révolution puis sous la Révolution et après la Révolution ; essentiellement pour ses frasques. C'était un vrai salaud, un monstre. Ensuite un poète, Apollinaire s'est chargé de le réhabiliter, pour des raisons de snobisme intellectuel, essentiellement. Dans sa lignée les surréalistes, puis Bataille, puis Lacan, Barthes, Foucault et Marcuse ont théorisé et réhabilité la pensée de Sade, passant sous silence ses exactions, pour des raisons idéologiques. 
Or ce qui fait le plus penser à la vision de Sade, comme Les 120 journées de Sodome, c'est bien un camp de concentration ou d'extermination nazie, qui en constitue le passage à l'acte. La plupart des intellectuels ne se sont pas posés cette question, on peut quand même évoquer Pasolini qui fait le rapprochement.
Quoiqu'il en soit mai 68 s'est réclamé de l'œuvre de Sade, pour ce qui concerne le droit à la jouissance sans entrave, même quand elle est sadique dixit Marcuse.
Donc Onfray fait quand même une petite critique de mai 68 quand ce mouvement se réclame du droit au sadisme dans la sexualité.
C'est la seule limite qu'il met à ce mouvement qu'il considère par ailleurs nécessaire pour abattre le dogme judéo-chrétien, au moins aussi dégoûtant pour Onfray que le sadisme. Onfray se réclame d'une éthique libertaire et hédoniste dans la lignée de 68, mais n'accepte pas sa dérive sadienne.
Personnellement je pense qu'heureusement qu'il y a eu Sade, pour penser la perversion, que sans Sade on n'aurait pas cette grille de lecture. Sade n'est absolument pas responsable du nazisme, il fait réfléchir sur la nature du nazisme, et sa perversion constitutive. Et puis sans Sade il n'y aurait pas eu ce magnifique film de Pasolini, son dernier de 1975, le plus fort, juste avant son assassinat sur une plage d'Ostie à Rome. Ce film constitue moins selon moi une critique du nazisme par la vision de Sade, que d'une critique de nos sociétés contemporaines et modernes, destructrices des cultures ancestrales, par la vision de Sade. De plus Pasolini avait en horreur le mouvement de mai 68, qu'il qualifiait de profondément bourgeois ou plutôt d'enfants de bourgeois, donc profondément pervers.
Onfray dis que Sade est le chaînon manquant entre Kant et le nazisme, mais même sans Sade il y aurait eu le nazisme, alors que sans Kant ce n'est pas sûr. La société est de plus en plus perverse, mais ce n'est pas la faute à Sade, c'est la faute à la politique et aux cadences infernales imposées par la modernité : donc c'est plutôt un des effets non voulu par son auteur, de la philosophie de Kant. C'est plus précisément la responsabilité du calcul égoïste à l'oeuvre dans la technique, qui se fait derrière le dos des hommes en chair et en os.

Etre féministe est-il revendiquer pour la femme autant de droits sexuels que pour l'homme ? Donc n'est-ce pas revendiquer pour la femme d'être aussi sale que l'homme ? La fuite en avant dans la sexualité est comme le disait Gainsbourg sans issue. Les œuvres de Sade apparaissent aujourd'hui comme une gentille bluette à côté de l'industrie du porno, de l'industrie du sexe tout court, et même du tourisme sexuel, qui exploite la misère du tiers-monde, donc qui est abject. Le sexe est-il propre ? Non assurément, c'est moins le sexe qui est dégoûtant que ses dérives ; mais c'est un passage obligé si l'on ne veut pas sombrer dans la folie comme Nietzsche.

3 commentaires:

  1. Quant à Onfray, il dit aussi pas mal de conneries.

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  2. Relier "Onfray - Sade - Apollinaire - Bataille - Lacan - Barthes - Foucault - Marcuse - Pasolini - Kant - Gainsbourg - Nietzsche" en n'omettant pas de passer par les camps de concentration nazis (et pourquoi pas ceux de France au Cambodge via l'URSS, les USA et tous les autres d'Afrique, d'Amérique du Sud, d'Asie ou d'Amérique centrale) à un billet intitulé "La dernière heure de cours" du dénommé "Mousset", voilà qui est véritablement singulier et même incompréhensible... Et pourquoi pas "la 25ème heure" ?
    Un ancien élève qui lors de son passage sous la férule du professeur ayant proposé toutes les références citées dans cette intervention les aurait mal digérées ?

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  3. A anonyme du 18 juin 14:04 : nazisme en tant que paradigme de tous les autres totalitarismes à travers le monde, du Cambodge, au Rwanda, en passant par Pinochet et la Bosnie-Herzégovine, la Tchétchénie et la Palestine et tant d'autres, d'où les USA, l'URSS et même la France se sont salis les mains pour ne pas citer l'Angleterre, la Chine et maintenant la Russie
    Ensuite pour ce qui est des références mal digérées, je dirais qu'elles n'ont même pas étés ingurgitées, donc il n'y a pas eu digestion. La qualité d'une œuvre dépend moins de son auteur que de la qualité du lecteur, donc de l’interprétation que ce dernier en fait. Foucault allait même jusqu'à dire que l'auteur n'avait aucune importance, que le plus important c'était la lecture et l'interprétation : il n'y a jamais eu de passage à l'acte de cette idée géniale, car aucun auteur ne veut renoncer ou ne le peut, à ses droits d'auteur, pas même Foucault, comme le souligne ironiquement Onfray. Il n'y a aucun argument d'autorité à donner. L'autorité que représente tous ces grands auteurs ne m'impressionne pas et ne doit impressionner personne. Internet et les blogs, la piraterie des œuvres en chargement libre et gratuit, sont peut-être une chance de s'affranchir du droit d'auteur, donc de mettre en pratique la théorie de Foucault. Une fois de plus, on voit l'hypocrisie des ex soixante-huitards, qui après avoir réclamé la disparition de l'autorité, exigent son retour en espèces sonnantes et trébuchantes, et sont les plus grands pourfendeur du téléchargement "illégal". La notion de droit d'auteur est une notion récente qui n'existait pas avant le XVIIIème, avant tout le monde se copiait et se paraphrasait ; le plus grand plagiaire de l'histoire de la littérature fut sans doute Montaigne, cela ne l'empêchait pas d'être génial. Je suis pour un retour à l'esprit de la renaissance italienne et française.

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