samedi 18 août 2018

Penser avec le peuple ou penser à sa place ?




Je cite l'extrait d'un article sur un forum politique : « La gauche laïque elle-même est partagée entre l’attachement réel à la démocratie et la tentation totalitaire : penser avec le peuple ou penser à sa place. » Or qu'est-ce que la tentation totalitaire, sinon une conception hégélienne de l'histoire ?

C'est-à-dire qu'au nom du progrès qui a pris aujourd'hui le nom de progressisme, des crimes peuvent être commis, qui seront commis même au nom, pourquoi pas, de l'antiracisme ou du multiculturalisme par exemple : dans la mesure où l'on dénie aux victimes leur statut de victimes, parce qu'elles sont majoritairement « blanches et bourgeoises (ou bobos selon l'appellation d'aujourd'hui) » dans les attentats, et expriment donc une logique de domination à travers l'histoire récente.

Au fond aux yeux des progressistes d'extrême gauche, les attentats islamistes ne sont que des épiphénomènes, justifiés même dans la mesure où ils participent de la réforme nécessaire de la conscience de nos concitoyens de souche, blancs, chrétiens d'origine souvent perdue dans les sables de l’athéisme, ou encore circonstance aggravante « bourgeois (ou bobos) ». Ces derniers devant accepter que l'islam ne pose pas un problème religieux, nullement, mais un problème purement social, d'inégalité sociale avant tout. Et quand le problème du racisme sera réglé dans notre société, il n'y aura plus d'attentats : la façon la plus cynique de supprimer le racisme, étant évidemment de supprimer tous les racistes potentiels que constituent les blancs de souche d'origine essentiellement catholique en France.

Parce qu'on estime que l'homme nouveau dès lors fabriqué et créé, sera d'une telle perfection de la conscience ainsi réformée, que le bonheur universel sera bien plus facile à atteindre que pour les pauvres ères que nous sommes, franchouillards avec notre béret basque et notre baguette sous le bras (tant moqué par un dessinateur de BD comme Gotlib)....

L'histoire et même la grande Histoire, tant vantée par Hegel qu'il voyait comme une forme de réalisation de l'Absolu et de l'Esprit et donc de la philosophie, et qui se réalise dialectiquement en progressant toujours et comme fatalement, vers une forme d'Absolu, n'est au fond qu'un fait divers, parfois sordide mais toujours dérisoire.

Schopenhauer avait sans doute raison de tourner en dérision ce philosophe totalement mégalomane, dont l'influence philosophique est au passage plus ou moins directement responsable - dans l'éclosion aussi de philosophes ou de sociologues ultérieurs comme Marx et Engels, mais de bien d'autres également - des crimes du communisme et du nazisme.
Mais pour relativiser la responsabilité de Hegel ou de Marx et Engels, il faut toujours replacer une oeuvre dans le contexte qui l'a vu éclore, et ne jamais penser qu'un auteur aurait pu avoir pour visée des massacres sans nom. Il aura juste mal évalué les conséquences de ses dires, ou ne les aura pas évaluées du tout... Dans le cas de Hegel, il a sans doute pris la « grosse tête », qui rend sourd et aveugle au réel, et surtout incapable d'empathie pour la sensibilité singulière de chacun.

Le héros historique peut, comme Napoléon, agir en transgressant les lois de la morale et du droit, il peut écraser « mainte fleur innocente » , « ruiner mainte chose sur son chemin », mais son action est justifiée parce qu'en poursuivant son but, il contribue à l'actualisation de l'Absolu : l'Histoire du monde est aux yeux de Hegel, le tribunal du monde. Et Marx et Engels souscriront à cette vision, que d'aucuns pourraient aujourd'hui qualifier de profondément cynique, car dans le temps de l'après-coup on a pu en mesurer les résultats désastreux : avec les camps d'extermination nazis, les chambres à gaz et le Goulag, sans que nul Absolu n'en surgisse, sinon l'absolu dégoût !

Une histoire peu banale certes lorsqu'il s'agit d'un Grand homme comme Napoléon, mais cependant plus susceptible d’alimenter la rubrique nécrologique dans la catégorie : « chiens écrasés » ! Car n'oublions pas que les guerres napoléoniennes firent tout un tas de victimes anonymes, et globalement ruinèrent la France et ne lui firent jamais retrouver son niveau d'antan.

Et bien cette histoire peu banale c'est aussi la mienne, je m'explique :

« Robert mon père, a essayé de me noyer (comme il noyait les chiots devant moi en ricanant), lorsque j'étais un petit enfant au cours d'un bref séjour au bord de la mer, en camping. Je tiens d'ailleurs à préciser que ma mère était absente. Il a essayé de me noyer dans une vague, alors que je me tenais dans un bateau pneumatique, qu'il a sciemment retourné. Je n'y étais strictement pour rien, j'étais juste un enfant innocent, et lui un sale vicieux pervers aux pulsions meurtrières, c'est la seule chose que l'histoire qui n'est au fond qu'un fait divers absurde, retiendra.

Et quand on pense que la Justice de notre beau pays des Droits de l'Homme et de la Liberté d'expression m'oblige à me taire sur tout ce que mes deux parents m'ont fait endurer et subir (persécution concernant mon père, maltraitance pour ce qui est de ma mère), il y aurait pourtant matière à écrire un roman. Une histoire peu banale certes, mais cependant plus susceptible d’alimenter la rubrique nécrologique dans la catégorie : « chiens écrasés ».

Est-ce que ça, ce n'est pas un nouveau paradigme de société, qui exacerbe la concurrence de tous contre tous, et où même finalement les parents peuvent entrer en rivalité mimétique avec leurs enfants, occasionnant la plupart du temps leur destruction ? L'instruction et l'éducation de l'enfant font-elles encore consensus ou bien alors les rivalités internes et les jalousies au sein de la famille seront-elles de plus en plus amenées à prendre l'ascendant sur toute forme de statu quo, que jusqu'à il y a peu, l'École arrivait encore un peu à préserver ?
C'est donc sans doute que mon cas particulier n'est certainement pas isolé, et qu'il est directement lié au type d'homme dont la modernité accouche désormais, et où la notion d'adaptation joue un rôle primordial tout simplement comme si il était une animal comme les autres, suivant la théorie de l'évolution naturelle de Charles Darwin.
Or non, l'homme n'est pas un animal qui devrait s'adapter à son environnement comme les autres animaux, pour survivre. L'homme est plus compliqué que ça ! Il a besoin d'un « chez soi », pour s'épanouir. Du reste je pense que Darwin n'a jamais affirmé que l'homme était un animal comme les autres, mais que le « darwinisme social » est la déformation caricaturale faite de la théorie de l'évolution de Darwin, au profit de l'idéologie néolibérale au tournant des années 80 particulièrement.
Je sais que je suis le fruit du nihilisme occidental à travers la façon dont mes parents se sont occupés de moi, et je sais que dis comme ça, cela devrait me fournir une forme de soulagement, oui certes un peu, mais quand même pas totalement.
Même si désormais je cherche le détachement, le soulagement et la sérénité vis-à-vis de ces deux monstres, qui sont certes des baby boomers (mais un peu plus originaux que la moyenne), c'est-à-dire les derniers en date d'un point de vue générationnel, à qui la génération précédente a voulu transmettre un héritage culturel et/ou matériel ; alors qu'elle, s'en fout royalement pour sa progéniture, et envisage la vie comme si après elle le monde pouvait bien crever. » (fin du témoignage personnel).

Est-ce que la société actuelle ne court pas plusieurs dangers ?
D'abord au nom du progressisme antiraciste et multiculturaliste, de faire des victimes en continuant à encourager les flux migratoires et en minimisant leurs conséquences ?
Ensuite au nom du darwinisme social d'encourager toujours plus de burn out et de suicides au sein des entreprises en vue de l'efficacité, de la rentabilité et de l'adaptation aux marchés ?
Enfin au sein des familles le darwinisme social largement vulgarisé et répandu, ne risque-t-il pas d'encourager des formes de rivalités mimétiques entre parents et enfants, dans la quasi totalité des cas, au détriment de l'enfant bouc-émissarisé ?

Aujourd'hui c'est effectivement le néolibéralisme qui est dans une tentation totalitaire - ce que certains commentateurs qui s'inspirent de la pensée de Orwell (common decency) appellent le « soft totalitarisme », mais au passage est-il si soft, et n'est-il pas en train de devenir hard ? -, c'est-à-dire une conception hégélienne de l'Histoire qui broie tout sur son passage, les services publics et les individus en chair et en os, au nom d'une pure logique du profit qui ne dit pas son nom.
D'ailleurs le slogan d'Amazon n'est-il pas : « Work hard, have fun, make history. » ? Faire l'histoire, la grande Histoire, vraiment ? Ou ne s'agit-il pas plutôt d'une histoire qui risque de se transformer comme toutes les promesses de lendemains qui chantent, en sale histoire, voire en fait divers susceptible d'alimenter la rubrique nécrologique dans la catégorie : « chiens écrasés » ?
La Singularité Technologique (le remplacement de l'intelligence humaine par l'IA) qui sera le fruit du transhumanisme, constituant un genre de Parousie (l'équivalent finalement de l' « Absolu » de Hegel), pour les fondamentalistes du marché et du capitalisme financier tels Elon Musk ou Bezos. C'est bien le but ultime de l'histoire qu'ils nous proposent, à condition de « travailler dur ».
Dans le cas sans doute de Musk et de Bezos (qui pèse 150 milliards de dollars US), et de Hegel ou Marx par le passé, ils ont sans doute pris la « grosse tête », qui rend sourd et aveugle au réel, et surtout incapable d'empathie pour la sensibilité singulière de chacun. Comme le disait la philosophe Annah Arendt : « Le progrès accomplit son oeuvre derrière le dos des hommes en chair et en os. »

4 commentaires:

  1. De quel peuple s'agit il ?

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    1. La question est effectivement : s'agit-il du « peuple » des progressistes d'extrême gauche, ou du « peuple » des réactionnaires de droite ? Mais concernant la définition introuvable, je préconise d'essayer la voie du milieu, non excessive ni extrémiste, comme le préconisait Bouddha, et dans sa version occidentale, Schopenhauer.

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  2. eh ben, c'est du lourd.
    Que j'ai failli ne pas voir sans avoir cliqué sur "afficher" !

    L'homme est plus compliqué que ça ! Il a besoin d'un « chez soi », pour s'épanouir.
    Il est compliqué mais cela ne change rien à sa condition d'animal !

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